Le renouvellement des membres du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) en avril 2022 a vu l’arrivée de six « représentants d’associations de personnes malades et d’usagers du système de santé, d’associations de personnes handicapées, d’associations familiales et d’associations œuvrant dans le domaine de la protection du droit des personnes ». Il s’agit d’une première pour cette institution qui, depuis sa création en 1983, délivre ses avis aux décideurs à propos des problèmes éthiques et les questions de société liées aux progrès de la biologie, de la médecine et de la santé.
Voulu par François Mitterrand après la naissance du premier bébé issu d’une fécondation in vitro (FIV), le CCNE s’attache à trouver un équilibre entre la fascination pour ce que promettent les progrès de la recherche et la maîtrise des risques qu’ils induisent. « Ce n’est pas parce qu’on sait faire qu’on doit faire » met en garde Régis Aubry, président de la section technique, l’instance de régulation du CCNE. Les avis publiés par le CCNE sont élaborés par des groupes de travail pluridisciplinaires sur un temps suffisamment long pour entendre toutes les opinions et pas seulement celles des spécialistes du domaine. « Chaque avis rendu est à la croisée de l’analyse des données présentes dans la littérature, l’écoute de personnes qualifiées et la réflexion du groupe de travail » détaille Régis Aubry. L’évolution de la composition du CCNE vise donc à aller encore plus loin dans cette démarche pluridisciplinaire face à la complexité grandissante des questions éthiques.
Car la pensée, l'abord de la science et des techniques évoluent et chacune de ces avancées peut avoir des conséquences dans le domaine de la santé. Ainsi, le CCNE est amené à s’exprimer sur des sujets liés à l’impact de l’environnement ou plus récemment du numérique sur la santé. Par ailleurs, les nouveaux venus représentants des usagers apportent leur expertise et leur expérience de terrain. « Il paraissait étrange que l’on réfléchisse à la santé des personnes sans témoins directs », justifie le Pr Aubry. Parlant en connaissance de cause, les représentants des malades apportent leur expérience en tant que malades et usagers aux autres membres et viennent ainsi enrichir leur réflexion. « Il y a une expertise profane de ces personnes » approuve le professeur.
Composition
Les 6 nouveaux membres viennent renforcer les 39 membres du Comité déjà présents. Ces derniers sont choisis au sein du monde de la recherche, de la santé, du droit, de la justice ou encore du fait de leur appartenance aux principales familles philosophiques et spirituelles, de leurs compétences ou leur intérêt pour les enjeux éthiques. Cette diversité de profession et d’opinion fait du CCNE « un microcosme à l’image de notre société » souligne Régis Aubry, traversé par les mêmes tensions et divergences.
Sa place dans le système de santé
Le Comité consultatif national d’éthique est une instance indépendante dont les membres n’ont pas de compte à rendre aux autorités qui les ont nommés. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique veille à leur impartialité en recueillant leur déclaration d’intérêt.
Le CCNE peut se saisir des questions sur lesquelles il va travailler ou bien être sollicité par différents organismes ou institutions publiques tels que le président de la République, les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale, les membres du Gouvernement… Les avis publiés ont donc une influence sur l’orientation des politiques publiques en matière de santé et peuvent amener à une modification du droit notamment lors des révisions des lois de bioéthiques. « Les propositions formulées ne sont pas toutes reprises, le CCNE n’a pas vocation à se substituer au Parlement, tempère Régis Aubry, qui estime toutefois que « ses avis, en général très argumentés, sont pris en compte ».
Prises de position
Le Comité consultatif national d’éthique a été très actif au moment de la révision de la loi de Bioéthique en 2018. Dans son 129e avis, le CCNE s’est prononcé en faveur de l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de femmes, ainsi que pour la levée de l’anonymat pour les futurs donneurs de sperme. En ce qui concerne la fin de vie, le CCNE propose ne pas modifier la loi Clayes/Leonetti mais plutôt de la faire mieux connaître et mieux appliquer.
Dans son 130e avis de mai 2019 les membres du CCNE dressent un état des lieux de l’emploi des données massives dans le champ de la santé et envisagent les questions éthiques liées au développement de ces technologies. Ils y ont par exemple rappelé la nécessité d’une information compréhensible, précise et loyale sur l’utilisation de ces informations personnelles. Une autre recommandation de ce rapport propose qu’au cours de leur formation et tout au long de leur carrière, les professionnels de santé puissent bénéficier d’une formation adaptée aux technologies numériques.
Exergue : Trouver un équilibre entre la fascination pour les progrès de la recherche et la maîtrise des risques qu’ils induisent.
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