Plus de 40 % des généralistes rapportent au moins cinq rendez-vous non honorés par semaine, selon une enquête publiée lundi par nos confrères du « Généraliste ». Entre le 28 février et le 13 mars, l'hebdomadaire a sondé 344 praticiens sur ces fameux « lapins » qui pourrissent la vie des confrères dans un contexte de pénurie médicale. 92,7 % des répondants étaient généralistes – la moitié exerçait en cabinet de groupe ou en maison de santé, 40 % en exercice libéral isolé.
Dans le détail, chaque semaine, un généraliste sur cinq rapporte six lapins ou plus. Ils sont par ailleurs 18 % à compter cinq rendez-vous non honorés hebdomadaires. Selon une majorité de confrères, seulement un patient sur cinq prévient en cas d’annulation.
« Je les engueule »
Face au fléau, certains médecins tentent de s’organiser avec les moyens du bord. « Je les appelle et je les engueule », témoigne l’un d’eux. Surtout, 82 % des généralistes affirment avoir déjà refusé un patient poseur de lapin. Au bout de trois fois, « le patient est blacklisté définitivement avec note des honoraires non réalisés hors remboursement », raconte un autre confrère.
S’ils sont seulement 7 % à appliquer des pénalités financières (au demeurant interdites), 39 % des généralistes ont déjà tenté de sensibiliser leurs patients indélicats. Et 44 % affirment réaliser des rappels avant le rendez-vous « avec pour certains une obligation de confirmation pour le patient s’il ne veut pas voir son rendez-vous annulé », indique « Le Généraliste ».
Réclamées par certains syndicats, comme l’Union française pour une médecine libre (UFML-S), les amendes contre les patients qui n'honorent pas leurs rendez-vous sont plébiscitées par 64 % des médecins généralistes, qui s’y disent « tout à fait favorables ». Un chiffre très important – seuls 10 % des praticiens sondés s’y opposent fermement –, alors qu’un amendement voté au Sénat dans le cadre de l’examen de la loi Rist prévoit justement la mise en place d’une taxe anti-lapins, à définir.
Les nouveaux patients incriminés
En cas de faux bond, deux tiers des généralistes affirment en profiter pour réaliser des tâches « hors soins » – administratives notamment. 31 % d’entre eux utilisent ce temps supplémentaire pour rallonger leurs consultations, 30 % réaffectent de nouveaux créneaux.
Régulièrement pointés du doigt par de précédentes enquêtes, ce sont surtout les nouveaux patients qui ne se présentent pas en consultation (dans 57,6 % des cas). 4 généralistes sur 10 accusent plutôt les patients qui prennent rendez-vous en ligne, et 37 % les malades habituels de leur file active. Aussi, de façon plus paradoxale, dans un tiers des cas les confrères incriminent les patients qui avaient pris rendez-vous pour une urgence.
La sensibilisation peu utile ?
Lors de ses vœux aux soignants le 6 janvier, Emmanuel Macron s’était lui-même saisi du sujet des consultations non honorées, affirmant que « trop de temps médical était gaspillé par un excès d'imprévoyance et de la désinvolture ». Un travail sera engagé avec l’Assurance-maladie pour « responsabiliser les patients », avait annoncé le président de la République.
Mais pour un quart des praticiens sondés, une campagne de simple sensibilisation ne serait de toute façon « pas du tout utile », tout comme le fait de prévoir des plages de consultation sans rendez-vous. Une proposition inutile pour sept praticiens sur dix.
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