ANCIENNE directrice d’ARH, ex-directrice d’hôpital et ex-présidente de l’Association des paralysés de France, Marie-Sophie Desaulle évoluait en terrain connu, invitée aux Rencontres de La Baule sur le thème du raprochement des secteurs médical et médico-social.
Après avoir pointé les différences (« l’approche de soins est plutôt de court terme quand l’approche médico-sociale se situe davantage sur le moyen et le long terme »), elle a trouvé un point commun entre ces deux secteurs : la proximité. « C’est par cette proximité que l’articulation entre médical et médico-social peut se construire, considère-t-elle. L’ARS ne peut pas imaginer d’organisation sans s’appuyer sur les acteurs de terrain. » Un peu plus tôt, le Dr Patrick Gasser, président de l’Union régionale des médecins libéraux (URML), avait appelé ses confrères à être innovant pour trouver des solutions adaptées aux besoins de la population.
Trouver le bon référent.
La directrice générale de l’ARS s’est voulue précise… et incisive. « Que la solution de proximité soit maison de santé pluridisciplinaire, pôle de santé ou dénommée autrement, il faut intégrer la dynamique du médico-social, a-t-elle expliqué.Et de dérouler son raisonnement. « Aujourd’hui, on pense davantage le lien entre médecin, infirmière, kiné… que le lien avec les CLIC (1) ou les travailleurs sociaux. Or, la dynamique qui émerge autour de cette mosaïque se formalise autour d’une seule et même personne - le patient - pour qui on va plus parler de projet de vie que de projet de soins. La coopération entre professionnels découle de cette dynamique. Et la coordination peut être menée d’abord par le médecin puis par un autre professionnel. Si on arrive à sortir des querelles de chapelle, on pourra identifier le meilleur référent. Et après cette réflexion par territoire, on pourra définir le mode de rémunération… ».
Ce décloisonnement s’apparente à une mini-révolution. Alain Paraponaris, économiste à l’Inserm, justifie cette approche en rappelant le vieillissement de la population. La quadruple transition en cours (démographique, épidémiologique, économique et sociétale) milite pour l’ouverture (notamment culturelle) du corps médical vers le médico-social. Comment prendre en charge les quelque 733 000 personnes âgées, classées en 2008 entre le GIR 1 et 4 (niveau de dépendance), et plus particulièrement celles qui ne reçoivent aucune aide ? Comment accompagner les aidants ? Et comment répondre aux besoins des résidents des maisons de retraite, a interrogé un médecin généraliste de Vendée ? « On voit des petites structures ouvrir 15 lits pour des patients Alzheimer, mais avec un sous-effectif (...). Ces établissements ne prennent un médecin coordonnateur que quelques heures…».
Taille critique.
Question de moyens, a répondu en substance Jean-Paul Siret, PDG du groupe Noble Age. « Si on laisse des maisons de retraite fonctionner avec 40 lits, on ne donne pas les moyens au secteur d’embaucher suffisamment de médecins coordonnateurs, estime ce chef d’entreprise. Pourquoi le médico-social serait le seul secteur à ne pouvoir regrouper des établissements ? ».
En attendant, chacun des participants a campé sur ses positions. Quand Jean-Paul Siret fait allusion à la détérioration de la santé des résidents faute de coordination médicale, et aux coûts engendrés, le Dr Luc Duquesnel, médecin généraliste, réplique : « quand un soignant est seul la nuit pour 60 résidents, on nous dit : ça serait bien qu’ils dorment ! ». Et Quand Laurent Borella, directeur santé chez Malakoff Médéric (2), demande, provocateur, « que peut-on faire d’intelligent avec les médecins libéraux ? », Jean-Claude Labadie, vice-président de l’Urml d’Aquitaine, rétorque : « que peut-on faire d’intelligent avec les mutuelles et les assurances ? ».
Nombre de questions restent ouvertes, à écouter les professionnels de santé.Faudra-t-il que les médecins contractualisent avec l’ARS ? Avec les acteurs du secteur privé ? Quelle valorisation de l’acte médical ? Et quelle médecine demain...sans médecins ? Construire ce pont entre médical et médico-social sera sans doute le passage obligé.
(1)CLIC : centre local d’information et de coordination pour personnes âgées
(2) Groupe de protection sociale proposant des prestations de prévoyance, santé, épargne et retraite pour les entreprises et les particuliers.
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