« Une menace pour mon activité et la mise en danger de mes patients » : c'est en ces termes alarmistes qu'une médecin généraliste exerçant dans le XVe arrondissement parisien, le Dr Juliane Lumbroso, dénonce aujourd'hui la procédure de contrôle de la caisse primaire d'assurance-maladie de Paris à son encontre.
Depuis quelques mois, ses prescriptions d'arrêts de travail sont dans le viseur de l'assurance-maladie. Selon un courrier de la caisse primaire, adressé au médecin en décembre dernier, le Dr Lumbroso aurait prescrit une moyenne de « 3,71 journées d'arrêts de travail indemnisées par consultation » sur la période du 1er mars au 30 juin 2016, alors que la moyenne régionale est de 1,11 jour par consultation (soit un écart du simple au triple). Ses prescriptions seraient également en croissance de 34 % par rapport à l'année 2015, alors que la médecin s'était engagée à les réduire « lors d'un appel confraternel en février 2016 ». La caisse l'a donc informée de sa volonté d'engager une procédure à son encontre « de mise sous accord préalable pour une durée de trois mois ».
Profil de patientèle
« On me reproche de prescrire trop d'arrêts de travail et d'être au-dessus d'une moyenne régionale, alors que le volume de mes prescriptions en pharmacie est par exemple bien en dessous avec 45 euros par ordonnance contre 78 euros pour la moyenne régionale », se défend la généraliste également titulaire d'un diplôme de psychothérapeute.
Elle met ainsi en avant le « profil » de sa patientèle qui consulte fréquemment pour des troubles psychologiques comme « le burn-out ou la dépression ». Mais pour la caisse, ces arguments ne sont « pas en mesure de justifier le niveau de prescription » de la généraliste en matière d'arrêts de travail.
Dans le cadre de cette surveillance renforcée, la généraliste a donc été placée sous accord préalable (MASP) – ce qui signifie que chaque arrêt de travail est subordonné à l’accord préalable du service du contrôle médical – depuis le 1er septembre et jusqu'au 30 novembre 2017. « En gros, on me demande de dire à mes patients de ne plus venir me voir, fulmine le Dr Lumbroso, 69 ans, en cumul emploi retraite. Après tant d'années de soins sans aucun problème, je ne comprends pas. »
Les IJ, poste sous surveillance
Jointe par « le Quotidien », la caisse primaire de Paris souligne que la mise sous entente préalable est « une procédure tout à fait réglementée », et non pas une sanction au doigt mouillé. « Il y a eu plusieurs entretiens avec le service médical, une période d'échanges écrits et oraux avec ce médecin, ainsi que la réunion d'une commission des pénalités avant d'en arriver là », énumère la direction, précisant que ces contrôles se font dans le cadre d'une campagne annuelle nationale.
« Chaque année, nous mettons en œuvre des surveillances de la prescription d'arrêts de travail sur un trimestre ou un semestre, ce qui permet de relever les médecins en atypie par rapport à un référentiel régional », explique la caisse parisienne.
Si la mise sous accord préalable reste une procédure « rare », la CPAM précise tout de même que, sur Paris, les indemnités journalières résultant des arrêts de travail représentent un poste de dépenses « important, qui croît positivement de 4 à 6 % d'une année sur l'autre ».
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