Onze organisations de libéraux de santé créent une intersyndicale face aux structures « instrumentalisées » et à un système « hyper-administré »

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Publié le 08/09/2021
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Crédit photo : S Toubon

Onze syndicats représentatifs de dix professions de santé (médecins, infirmiers, pharmaciens, biologistes, chirurgiens-dentistes, kinésithérapeutes, orthoptistes, orthophonistes, audioprothésistes, podologues), ont annoncé, ce mercredi, la création d’une intersyndicale au nom de « Libéraux de santé » avec un bureau déjà constitué*.

Objectif lisibilité 

Issues du Centre national des professions libérales de santé (CNPS) et de la Fédération française des praticiens de santé (FFPS, née d'une scission du CNPS en 2017), ces organisations – dont la CSMF et le SML, côté médecins – unissent leurs forces « pour porter ensemble des valeurs communes d'indépendance et de liberté de l’exercice, de responsabilité, de solidarité (...) et d’attachement au système conventionnel », a résumé Sébastien Guérard, président de l'intersyndicale et aussi de la FFMKR (kinés).

« La finalité n'est pas de créer une énième structure mais de redonner de la lisibilité aux libéraux de santé à l'instar de la Fédération hospitalière de France qui regroupe des hôpitaux publics », a justifié François Blanchecotte, premier vice-président et président du Syndicat de biologistes (SDB). 

À travers cette initiative, « une nécessité démocratique », les onze organisations représentatives veulent réaffirmer leur place face à la multiplication des structures associatives « instrumentalisées », selon elles, par les pouvoirs publics pour les contourner. « Nous partageons la logique de transversalité mais nous ne voulons pas que ce soit le gouvernement, la CNAM, les ARS ou les établissements qui décident les contours de nos métiers ou encore pire de l'organisation de nos professions », a martelé le président de l'intersyndicale, dénonçant le glissement actuel vers un système hyper-administré.

Coordination et maintien à domicile

S'estimant ignorés des pouvoirs publics pendant la crise sanitaire, les Libéraux de santé veulent s'imposer comme un interlocuteur « incontournable » sur les réformes à venir, à l'approche de la présidentielle.

En tête de gondole, la coordination des soins pour améliorer la prise en charge des patients âgés et dépendants. Alors que la CNAM ne jure que par les équipes de soins primaires ou les maisons de santé, l'intersyndicale veut défendre la reconnaissance des équipes de soins coordonnées autour du patient (ESCAP) dans le cadre de l'ACI CPTS. « C'est la cellule souche de l'exercice coordonné. C'est le premier niveau de coordination avant les équipes de soins primaires », a défendu Anne Dehêtre, vice-présidente de cette nouvelle structure. Ce modèle pluripro est « plus simple » et « souple » selon l'intersyndicale, car il nécessite pas de projet de santé ou de statut spécifique. C'est pourquoi, selon elle, il pourrait embarquer un maximum de soignants.

Délégation de tâches

Vient ensuite le périmètre des métiers pour faire face à la démographie médicale déclinante. Les délégations de tâches aujourd'hui se font « sans avoir le souci de la qualité des soins, de la transmission de l'information et de l'impact sur le modèle économique de chacune des professions, a taclé le Dr Jean-Paul Ortiz, vice-président de cette intersyndicale et président de la CSMF. Nous sommes tous favorables à faire évoluer le contour de nos métiers. Mais c'est à nous de le décider ensemble ». Dans ce cadre, les « Libéraux de santé » proposent d'engager une conférence de consensus.

Pour relever le défi du maintien à domicile des personnes âgées, l'intersyndicale souhaite créer une plateforme nationale d'appui pour soutenir les professionnels porteurs de projets en gériatrie. « Elle met à disposition des données recensant l'ensemble des actions pour permettre aux professionnels de s'appuyer sur l'existant », a expliqué le Dr Philippe Vermesch, vice-président de l'intersyndicale et président du SML.

Pour avancer sur ces réformes, les « Libéraux de santé » entendent s'appuyer sur un système conventionnel « rénové ». « Il y a eu des coups de canif dans les conventions signées à travers les budgets de la Sécurité sociale, a souligné Philippe Besset, trésorier de l'intersyndicale et président de la FSPF. Il est nécessaire de rénover le cadre de négociation qui doit être transparent dans le partage des données. »

Un CNPS bis ?

Pour l'heure, cette démarche ne concerne pas tous les syndicats membres du CNPS. « Il en reste douze qui ne font partie des Libéraux de santé », a pointé François Blanchecotte. Ce nouvel agrégat va donc cohabiter avec le CNPS et la FFPS. « On est dans une dynamique de reconstruction. Tous ceux qui se reconnaissent dans notre organisation peuvent nous rejoindre », déclare Catherine Mojaïsky (Les CDF).

Interrogé par « Le Quotidien », MG France dit ne pas avoir été mis au courant de cette initiative… « C'est le CNPS bis, ironise son président, le Dr Jacques Battistoni. La FFPS avait fait sécession du CNPS. Ils se sont finalement réconciliés ». Le syndicat de généralistes avoue ne pas comprendre cette recomposition syndicale. « Il existe déjà des fédérations intersyndicales pluriprofessionnelles comme la Fédération des soins primaires où la CSMF est présente », tacle le généraliste normand. 

* Bureau des Libéraux de Santé : président : Sébastien Guérard (FFMKR); 1er vice-président : François Blanchecotte (SDB) ; secrétaire : Pascale Lejeune (FNI) ; trésorier : Philippe Besset (FSPF) ; vice-Présidents : Anne Dehêtre (FNO), Luis Godinho (SdA), Jean-Loup Lafeuillade (FNP), Catherine Mojaïsky (Les CDF), Mélanie Ordines (SNAO), Jean-Paul Ortiz (CSMF), Philippe Vermesch (SML), Daniel Guillerm (FNI), Thierry Soulie (Les CDF).

CDF (Chirurgiens-dentistes de France), CSMF (Confédération des syndicats médicaux français), FFMKR (Fédération française des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs), FNI (Fédération nationale des infirmiers), FNO (Fédération nationale des orthophonistes), FNP (Fédération nationale des podologues), FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France), SDA (Syndicat des audioprothésistes), SDB (Syndicat des biologistes), SML (Syndicat des médecins libéraux) et SNAO (syndicat national autonome des orthoptistes).


Source : lequotidiendumedecin.fr