À 17 ans, Mélusine Marchand a décidé de prendre la plume pour rendre hommage à son père, médecin généraliste. La lycéenne en terminale à Belfort veut retracer dans un livre le quotidien du Dr Gérard Marchand, décédé des suites du Covid en novembre 2020.
Médecin de campagne installé au Russey, dans le Doubs, le Dr Marchand « voulait écrire ses mémoires, il n’a pas eu le temps de le faire », se souvient Mélusine. Alors, la lycéenne décide de reprendre le flambeau de son père, un praticien « atypique » et « inspirant », explique Mélusine qui, dès le plus jeune âge, accompagnait le généraliste dans certaines de ses visites.
Une vie de médecin de campagne
Originaire de Poligny, dans le Jura, tout destinait le Dr Gérard Marchand à embrasser une carrière de garde forestier, comme son père avant lui. Mais sa mère tombe malade. « Alors, il décide de devenir médecin pour soigner sa mère, pourtant il avait peur du sang ! », sourit Mélusine. Après le lycée, il file s’inscrire à la fac de Besançon – « à vélo depuis le Jura » – puis installe en 1976 son cabinet de généraliste, dans une ferme du Haut-Doubs, avant d'ouvrir, deux ans plus tard, un second cabinet au Russey.
Mélusine raconte une carrière entière dévouée à ses patients, « des amis, presque la famille », insiste la benjamine d’une fratrie de cinq enfants. Le Dr Marchand est disponible à toute heure du jour et de la nuit, « peut-être trop parfois », selon sa fille qui se souvient « qu’on ne pouvait pas s’éloigner, partir en vacances, sans qu’il ne soit inquiet pour ses patients, presque malheureux ».
Le généraliste prend ses marques dans l'exercice rural, « jusqu’à être capable de soigner des animaux blessés à la chasse ou à arracher des dents dans son cabinet », confie Mélusine. Une vie aux mille et une couleurs pour ce passionné de voiture – un temps médecin bénévole sur des courses automobiles – de cuisine, d’art et de dessin. « Parfois, entre deux patients, se souvient Mélusine, il me griffonnait des croquis sur son ordonnancier. » À plus de 70 ans, toujours en exercice, le Dr Marchand rêvait de se remettre à la peinture une fois à la retraite, « mais s’occuper de ses patients le poussait à vivre, c’était plus fort que la fatigue », raconte avec émotion Mélusine.
Appel à témoignage
En pleine seconde vague de la pandémie, à 72 ans, le Dr Gérard Marchand contracte le Covid, probablement en consultation. Le médecin – déjà affaibli par deux infarctus l’été précédent – est alors hospitalisé, puis plongé dans le coma pendant plusieurs semaines. Il décédera en novembre 2020. Sa fille se souvient de « beaucoup d’amour, beaucoup de gratitude des patients », qui, lors de la cérémonie, se sont réunis sur la place du Russey pour applaudir le cercueil du praticien.
La lycéenne compte désormais sur les patients et les confrères du Dr Marchand pour lui écrire, afin qu’elle puisse récolter des témoignages sur la vie de son père. Mélusine a déjà reçu une quarantaine de messages, gorgés d’anecdotes précieuses pour l’écriture de son livre. « Il faudra même peut-être deux livres », sourit la jeune femme, qui va solliciter l’aide de ses professeurs de littérature. Car, après le bac – et malgré un père médecin et une mère infirmière – c’est bien une carrière littéraire que souhaiterait embrasser Mélusine Marchand, « la médecine ce n’est pas pour moi ! ».
Vous pouvez envoyer vos témoignages à mel.docteur.marchand@gmail.com
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