Depuis le début de l'année, l’URPS médecins libéraux de Nouvelle-Aquitaine s'est engagée dans un travail de fond sur l'avenir de la médecine de ville à dix ans. Après une étude prospective réalisée par questionnaire auprès des praticiens libéraux de la région, l'Union a organisé cet été deux ateliers en présence d'experts du secteur (économie de la santé, intelligence artificielle, prévention) afin de dessiner un modèle « désirable ».
Première piste forte qui se dégage, « passer d'une politique de l'offre aux besoins de santé », une transformation aussi revendiquée par le gouvernement. « Il faut redonner la main aux professionnels d'un territoire pour qu'ils puissent soigner la population », insiste le Dr Benoît Féger, président de l'URPS ML (Avenir-Spé-Le Bloc). L'ORL plaide pour « une organisation médicale collective » et souple favorisant l'exercice pluripro, sans modèle juridique unique, mais aussi pour des carrières mobiles et évolutives (exercice mixte) grâce à un statut « unifié » pour les médecins.
Dans ce contexte, le cabinet connecté peut aussi être une solution. « Il faut une organisation territoriale de télémédecine pour répondre à ces besoins de santé, développe le Dr Jean-Luc Delabant, élu (CSMF) de l'URPS dans le collège généraliste. Cela peut passer par de la téléconsultation assistée par des infirmiers, ou la télé-expertise, outil essentiel pour accéder aux spécialistes. »
Gestion « à l'allemande »
Le second axe est lui aussi dans l'air du temps. L'URPS recommande d'agir fortement sur la santé globale et la prévention. « Il va falloir ancrer des consultations et des prescriptions de prévention dans les pratiques, avec une consultation longue tous les deux ans, explicite le Dr Delabant. Les organisations sont cloisonnées et dispersées alors qu'il faut une approche préventive intégrée et coordonnée. »
Pour avancer vers une prévention personnalisée, l'URPS a mis en place l'outil numérique « MedPrev » afin d'aider au diagnostic des comportements à risque et à l'établissement d'un parcours prévention. Les représentants des médecins néoaquitains souhaitent aussi travailler sur l'éducation au système de santé, y compris en invitant les patients à appeler le 15 avant de se déplacer aux urgences – une des mesures de régulation décidées cet été.
Dernier axe prioritaire, « une gouvernance régionale, voire territoriale, avance le Dr Féger. L'État donne les règles du jeu, les orientations, mais il laisse les acteurs de terrain s'organiser. » Le praticien plaide pour des « marges de manœuvre » importantes confiées localement et un partenariat « plus fort » entre l'ARS, le conseil régional, l'Ordre, les URPS et les hôpitaux, dans le cadre d'une cogestion « un peu à l'allemande ». « La conduite du changement ne se fait pas avec la carotte et le bâton, mais avec de l'envie et de la responsabilisation », abonde le directeur général de l'URPS, Emmanuel Bataille. Les CPTS peuvent être ici une « vraie opportunité »… si on en assouplit le cadre et qu'on leur donne des moyens « de pilotage de projets et de data management ». Enfin, pour favoriser les installations, l'URPS veut élargir les stages en libéral pour les externes, les internes, et les docteurs juniors.
Ces solutions – déjà présentées à la vice-présidente santé de la région Nouvelle-Aquitaine, la Dr Françoise Jeanson, et au directeur général de l'ARS, le Dr Benoît Elleboode – « ne sont pas figées dans le marbre », admet le Dr Féger. L'URPS continuera son travail prospectif pour proposer à l'automne une liste complète de propositions à porter au ministre de la Santé.
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