DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
LE REGROUPEMENT autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (REAGJIR) tenait ses premières rencontres nationales à Besançon. Une centaine de représentants des 14 fédérations régionales ont répondu présents et débattu de la nécessité d’obtenir un statut pour les 10 000 remplaçants répertoriés dans l’Hexagone. « Contrairement à ce que l’on peut lire, les jeunes médecins ne sont pas indifférents à l’évolution du système de santé mais ils ne sont pas prêts à travailler dans n’importe quelles conditions », a lancé le Dr Alan Charissou, président de REAGJIR, en introduction d’une table ronde consacrée à ce sujet.
L’étude Remplact menée d’août à octobre 2009 a montré qu’un remplaçant sur trois participe aux gardes et que 10 % des gardes sont assurées par les médecins remplaçants (« le Quotidien » du 19 mai). Une seconde étude baptisée Rempl’image a permis de pointer les inconvénients de la condition de remplaçants. « Les remplaçants veulent pouvoir exercer en leur nom propre, être identifié comme praticien de santé à part entière et encaisser les honoraires avec un système de redevance à l’installé », indique le Dr Alice Perrain, trésorière adjointe de REAGJIR. L’étude montre par ailleurs que les remplaçants souhaitent recevoir les informations de la Haute autorité de santé (HAS) et pouvoir analyser leur activité, être sollicités en cas de crise sanitaire, adhérer à la convention médicale, être représentés dans les instances professionnelles (URPS), avoir un meilleur accès à la formation conventionnelle indemnisée et bénéficier d’une couverture prévoyance. « Accorder un statut aux médecins remplaçants faciliterait la démarche de l’installation », assure le Dr Perrain. Eloïse Vialtel, secrétaire générale de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG), souligne que 43 % des médecins généralistes prennent un poste de salarié à la fin de l’internat. « Si le statut de remplaçant devient plus confortable, les remplacements ne dureront pas plus longtemps. Dans ce cas, plus d’internes se tourneront vers le remplacement que vers le salariat. »
Fossé.
L’argument des jeunes médecins ne convainc pas le monde institutionnel. S’ils reconnaissent le rôle des médecins remplaçants dans le système de santé, l’assurance-maladie, le ministère de la Santé et l’Ordre des médecins ne sont pas favorables à la création d’un statut particulier qui offrirait trop d’avantages aux remplaçants et ne les inciterait pas à s’installer. « Les médecins remplaçants font partie de l’offre de soins, ils assurent la continuité des soins, la permanence des soins mais faut-il pour autant créer un statut spécifique du médecin remplaçant, s’interroge Vincent Beaugrand, de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). L’installation permet de mieux organiser la réponse à l’offre de soins sur le territoire. » Le responsable du ministère de la Santé rappelle que le guichet unique d’aide à l’installation doit être prêt « pour le 1er juillet 2010 ». Le président de la République l’a rappelé lors de son déplacement en Basse-Normandie (« le Quotidien » du 3 décembre).
« Les médecins remplaçants sont déjà bien identifiés et tout le monde aura un numéro avec le répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS), à l’origine de la carte de professionnel de santé (CPS) nouvelle génération », affirme pour sa part le Dr Monique Weber. La responsable du département des professions de santé à la Caisse nationale d’assurance-maladie rappelle que les textes en vigueur ne permettent pas de conventionner les médecins remplaçants.
Le rapport Hubert sur la médecine de proximité a posé la question de la création d’un statut spécifique du médecin remplaçant. « Le CNOM pense qu’il n’est pas heureux de créer un statut mais qu’il serait plus utile de créer une charte du remplaçant qui inscrirait les droits et les devoirs des remplaçants sur la continuité des soins, la permanence des soins, le partage des données médicales », déclare le Dr Xavier Deau. Levice-président du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) s’inquiète de la tendance actuelle selon laquelle moins d’un médecin sur dix s’installe en libéral : « Il ne faut pas un statut restrictif qui isolerait les remplaçants mais une identité réelle qui leur permettrait d’être reconnus comme de vrais médecins et pas comme le remplaçant de quelqu’un d’autre. »« Il ne doit pas y avoir de différence de statut entre les médecins remplaçants et les médecins installés, cela ne nous paraît pas souhaitable », poursuit le Dr Deau. L’Ordre des médecins est favorable à un « continuum complet depuis le 2e cycle des études médicales jusqu’à la retraite ».
Les jeunes médecins n’en démordent pourtant pas à l’instar de cette remplaçante de Pays-de-Loire. « On a le sentiment d’être un moins que rien parce qu’on n’est pas installé, dit-elle. Nous contribuons pourtant à faire en sorte que les médecins installés ne craquent pas quand nous les remplaçons pour faire leurs gardes. »
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