SUR LES 315 000 femmes utilisatrices de l’antiacnéique Diane 35 (ou de l’un de ses génériques) en 2012, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) estime que 60 % des prescriptions se feraient hors AMM dans le cadre d’une contraception orale uniquement. « Cette situation a assez duré (..). Il faut arrêter de l’utiliser comme contraceptif. Cela fait partie de la feuille de route que nous a donnée la ministre (de la Santé) », a déclaré lundi Dominique Maraninchi, directeur général de l’agence. Après une réunion du comité de pharmacovigilance, l’ANSM devait rendre ses conclusions sur l’analyse bénéfice/risque de Diane 35 et ses génériques accompagnées de « mesures appropriées ». Un nouveau dossier d’informations devrait également être mis en ligne sur le site internet de l’agence. Les experts gynécologues de l’ANSM « considèrent qu’il ne s’agit pas d’un contraceptif et d’ailleurs la firme - Bayer - ne nous a pas demandé de l’enregistrer comme contraceptif », a fait remarquer Dominique Maraninchi. « Ce produit comme les pilules de troisième et quatrième générations augmente le risque thrombo-embolique. Il est donc exclu que l’on expose la population à ce risque », a insisté le directeur de l’ANSM. L’agence a finalement décidé mercredi d’engager une procédure de suspension de l’AMM.
Communication catastrophique.
Du côté des médecins généralistes et spécialistes, on s’interroge sur la pertinence du message précipité de l’agence sur Diane 35 abondamment repris par les médias. « Je trouve ça assez catastrophique de mettre sur la place publique une discussion qui normalement relevait d’une discussion interne d’un groupe d’expertise de l’agence du médicament », considère le Dr Claude Leicher, président de MG-France. « Ça serait bien que le directeur de l’ANSM prenne quelques leçons de communication car dernièrement, ça n’a pas été une grande réussite », glisse le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF). « Je ne vois pas pourquoi ils communiquent si vite alors qu’ils ne savent pas eux-mêmes vraiment ce qu’ils vont faire », commente le Dr Élisabeth Paganelli, secrétaire générale du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF). « Ces personnes ne sont pas dans les consultations comme nous. Vu de loin, il faudrait qu’ils s’entourent mieux », ajoute-t-elle. Vice-présidente du Collège national des gynécologues obstétriciens français (CGNOF), le Dr Béatrice Guigues juge « complètement aberrant » de la part de l’ANSM de générer un tel effet anxiogène chez les patients. « Je ne comprends pas très bien cet emballement médiatique car les thromboses on sait depuis toujours que cela existe avec les pilules. C’est un médicament avec des effets secondaires. Il y a d’autres contraceptifs qui ont aussi des effets secondaires », fait-elle remarquer.
Pas des imbéciles.
« Les médecins généralistes, les dermatologues et les gynécologues ne sont pas des imbéciles », renchérit le Dr Claude Leicher, président de MG-France. « Quand ils utilisent Diane 35, c’est parce qu’une femme a un problème d’acné. Dans le cas contraire, ils se tournent le plus souvent vers une contraception normale. Néanmoins l’effet secondaire contraceptif qui n’est pas l’indication d’AMM du Diane 35, on est bien obligé d’en tenir compte », ajoute-t-il. « J’ai lu des rapports internes à l’agence du médicament où des experts protestaient vigoureusement contre le fait que le laboratoire (Bayer ndlr) n’ait jamais déposé d’AMM pour la contraception. Avec Diane 35, on est bien devant un produit qui a un effet contraceptif. Si l’effet contraceptif n’est pas suffisant pour le considérer comme un contraceptif, il est temps de le dire aux professionnels et aux femmes qui s’en servent. À un moment donné, il faut que les agences fassent leur boulot et après les médecins feront le leur », déclare-t-il. L’ANSM reconnaît à ce jour « quatre décès (…) imputables à une thrombose veineuse liée à DIANE 35 », au regard des « déclarations faites par les médecins dans le système national de pharmacovigilance pendant les 25 dernières années, c’est-à-dire depuis 1987 » (date d’autorisation de mise sur le marché en France dans le traitement de l’acné chez la femme). Un chiffre probablement sous-estimé selon les dires de Dominique Maraninchi.
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