De l'exercice aux tarifs

Les cardiologues libéraux réinventent leur modèle

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Publié le 13/03/2020
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Forfaits de prise en charge, consultations avancées, équipes de soins : face aux tensions démographiques, le Syndicat national des cardiologues n'hésite pas promouvoir des innovations organisationnelles au sein de la spécialité.

Les délais d'attente peuvent atteindre six mois

Les délais d'attente peuvent atteindre six mois
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Les cardiologues libéraux sont prêts à s'organiser autrement pour prendre en charge les patients et veulent le faire savoir. Le Syndicat national des cardiologues (SNC), soucieux d'être « encore plus à l'écoute du terrain », a présenté un projet politique qui plaide pour davantage de souplesse et d'adaptabilité dans les organisations professionnelles.

Avec des délais d'attente en cardiologie qui atteignent six mois dans certaines zones, le défi de l'accès aux soins commande d'innover. « La désertification est très forte sur le triangle Orléans/Limousin/Nevers, confirme le Dr Vincent Pradeau, secrétaire général du syndicat des cardiologues. En Nouvelle-Aquitaine, il n'y a pas de problème sur la côte, mais à Bergerac ou Mont-de-Marsan, si. » D'où des réponses au cas par cas. Près de Dax (Landes), les spécialistes libéraux ont contractualisé avec l'agence régionale de santé (ARS) pour réaliser des consultations avancées en zone fragile. Même principe à Angers (Maine-et-Loire), où des cardiologues de ville consultent dans des villes périphériques, à une cinquantaine de km. « C'est un modèle de responsabilité populationnelle, il n'y a pas de réponse ou de schéma unique : cela doit être pensé géographiquement », résume le Dr Marc Villaceque, nouveau président du SDC.

Un pragmatisme et une souplesse organisationnelle qui doivent aussi guider les nouvelles équipes de soins spécialisées – l'une s'est constituée à Paris en cardiologie et le syndicat espère que d'autres équipes suivront.

Ce n'est pas la première fois que la spécialité s'emploie à faire bouger les lignes. L'an passé, le Syndicat des cardiologues a pris position pour s’engager à faciliter dans chaque région « une réponse sous 48 h » pour toute demande de consultation rapide adressée par les médecins traitants. L'ouverture de plages horaires pour les soins non programmés, explique le SNC, passe par une « nouvelle organisation des cabinets de cardiologie » et une coordination accrue avec les établissements (publics et privés) où les cardiologues libéraux participent déjà largement aux gardes et astreintes. 

Structures libérales « légères » et forfait global

En matière d'organisation toujours, une expérimentation d'innovation « article 51 » mobilisant plusieurs cabinets de cardiologie vient d'être autorisée par arrêté au « Journal officiel ». Elle porte sur les « structures libérales légères » (SLL) pour la rééducation des patients coronariens et insuffisants cardiaques. Le projet vise à tester une offre de réhabilitation cardiaque de proximité par une équipe de soignants libéraux en exercice coordonné, financée par un financement innovant (forfait initial et complémentaire). En pratique, 20 séances de rééducation sont incluses dans un forfait facturé environ 450 euros par patient – qui englobe l'éducation thérapeutique, l'activité physique ou la nutrition. Ces soins sont dispensés par une équipe pluridisciplinaire composée d'au moins trois cardiologues, un infirmier, un diététicien, un kiné, un psychologue, un addictologue et deux éducateurs (sportif et thérapeutique). 

Carrières mixtes

Également promue par la spécialité, la réforme en vue d'un statut unique du médecin doit permettre de dépasser les barrières ville/hôpital et de favoriser les carrières mixtes et évolutives, fréquentes en cardiologie. « Un cardiologue peut commencer sa carrière à l'hôpital et ensuite aller en libéral, ou vice versa, sans avoir besoin de repasser le concours PH à chaque fois », plaide le Dr Villaceque. Il entend aussi pousser la maîtrise de stage universitaire dans sa spécialité pour accueillir des internes en libéral. 

En revanche, le syndicat ne porte guère dans son cœur les nouvelles communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et encore moins le dispositif d'aide au recrutement des assistants médicaux, jugé trop complexe. « Pour bénéficier d'un assistant médical, on est obligé d'avoir une calculatrice, juge le Dr Frédéric Fossati, vice-président. C'est une fausse bonne idée, qui va se transformer en course à la subvention ». 

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin