Les années passent et la permanence des soins ambulatoires (PDSA, assurée à 90 % par des médecins libéraux installés) reste fragile, disparate et problématique.
Dans sa 17e enquête du genre, l'Ordre a mesuré un taux de volontariat national de « 38,1 % » en 2019 (soit 24 258 volontaires pour 63 551 médecins susceptibles de participer), en baisse de 0,5 point par rapport à 2018. Certes, seuls 9 % des conseils départementaux (CDOM) affirment clairement que la PDS fonctionne mal. Mais sans être aussi pessimistes, la grande majorité d'entre eux (70 %) reconnaissent que plusieurs zones de leur secteur sont « en difficulté », ce qui traduit la fragilité de cette organisation fondée sur le volontariat dans un contexte de démographie médicale en berne.
Le paysage de la PDS se révèle surtout fort hétérogène (voir carte) avec un minimum de 5 % de participation des généralistes à Paris et un maximum de 82 % dans les Vosges... Plus d'un tiers des territoires de garde sont couverts par « moins de dix médecins volontaires » et 17 % par moins de cinq courageux ! Bonne nouvelle : des réquisitions ont été décidées dans « seulement » 15 départements, soit 7 de moins qu’en 2018.
Quant à la participation des médecins à la régulation, elle ne se maintient qu'à la faveur du renfort des praticiens retraités, salariés ou remplaçants (+29 %) ; en revanche, la tendance à la baisse du nombre de libéraux installés y participant se poursuit (-3,8 %).
Multifactoriel
Cette fragilité de la PDS s'explique par divers « dysfonctionnements », que les conseils départementaux concernés (80 sur 102) ont classés. Sans surprise, ils citent d'abord la carence de médecins engagés, que cela résulte d'une démographie médicale déclinante (86 % des cas) ou d'un « désengagement » progressif des acteurs libéraux (66 %). Selon l'Ordre, ce désinvestissement est sous-tendu par l'insécurité dans certaines zones, des conflits, une activité inadaptée dans le secteur (trop faible ou trop importante), voire une surcharge professionnelle conduisant à l'épuisement.
Dans 26 % des cas où la PDS n'est pas optimale, les problématiques « organisationnelles » sont mises en avant – en commençant par les resectorisations (territoires de garde qui ne sont plus à taille humaine), des facteurs géographiques compliquant les déplacements ou une insuffisance de moyens.
Mesures financières mais pas que
Pour lever ces points de blocage, les CDOM avancent plusieurs pistes d’amélioration, qui visent à la fois à remobiliser la médecine libérale et à améliorer le fonctionnement.
Les « mesures financières » (défiscalisation élargie à tous les secteurs, valorisation des actes en visite) sont citées en priorité (60% ). La participation accrue des futurs médecins en formation et des salariés séduit également (50 %), tout comme l'idée d'une campagne de communication auprès du grand public et de la profession. Plus surprenant, la remise en question de la notion de volontariat revient dans presque un cas sur deux (48 %), devant le renforcement de la sécurité (34 %) et la suppression des gardes sur certains créneaux horaires (33 %).
Autre idée volontiers évoquée (41 %), le développement de points fixes de consultation (maisons médicales de garde, centres de soins non programmés), à condition que ces sites soient couplés à des « transports dédiés aux patients ne pouvant se déplacer » (cette dernière requête est massivement exprimée alors que seuls 11 départements prévoient de tels dispositifs pour cette population).
En revanche, une énième restructuration des secteurs de garde a moins les faveurs, sachant que plus des deux tiers des départements ont connu des changements en 2019 (secteurs, horaires, forfaits).
Samedi matin, une tendance lourde
Forte revendication syndicale, l’extension des horaires officiels de PDS au samedi matin – qui est déjà effective dans 41 départements pour la régulation et dans six départements pour l’effection – est une piste nettement majoritaire chez les ordinaux : 56 % des CDOM aujourd'hui non concernés par cette extension y sont favorables.
En revanche, le fameux 116-117, possible numéro unique d'entrée dans la PDS libérale, divise la profession. Déployé dans 12 départements appartenant aux régions d'expérimentation (Corse, Pays de la Loire et Normandie), il n'est souhaité que par 43 % des CDOM qui n'y ont pas accès (+9 points toutefois sur un an). La question sera tranchée par la ministre de la Santé lors des arbitrages sur le service d'accès aux soins universel.
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique
« Cela correspond totalement à mes valeurs », témoigne la Dr Boizard, volontaire de Médecins solidaires
« Les Flying Doctors », solution de haut-vol pour l’accès aux soins en Bourgogne