Le choix était très symbolique. Le plan anti-déserts médicaux a été annoncé le vendredi 13 octobre, juste après la visite d'une maison de santé pluridisciplinaire à Châlus (Haute-Vienne), par Agnès Buzyn, en compagnie du Premier ministre. « Il ne s'agit pas d'un catalogue de mesures », a plaidé Édouard Philippe.
Et pourtant... Les dispositions prévues sont très variées, plus ou moins précises et chiffrées, souvent déjà connues. Mais le cocktail affiche une cohérence nouvelle. Le plan énumère des solutions souvent réclamées par l'Ordre ou la profession (lire ci-dessous) et ne comporte surtout aucune mesure punitive.
Inciter les professionnels à s'installer pour renforcer l'offre médicale dans les territoires : c'est l'axe central du plan. Aujourd'hui, les problèmes d'accès aux soins touchent des secteurs où l'offre de soins est présente mais insuffisante pour répondre à la demande : 8,1 % de la population est concernée – soit 9 000 communes et 5,3 millions d'habitants, selon le ministère.
Le plan mise d'abord sur les incitations financières. En publiant un nouvel arrêté de zonage dès novembre pour les généralistes, les secteurs fragiles éligibles aux aides conventionnelles vont être élargis (la population couverte passera alors de 7 à 18 %). Ces aides prévoient notamment 50 000 euros sur trois ans pour l'installation. Au total sur 5 ans, une enveloppe de 200 millions d'euros est prévue. Des travaux débuteront dès 2018 pour définir un zonage adapté aux autres spécialités sous tension.
S'ajoutent d'autres incitations attendues pour les praticiens retraités, les remplaçants ou pratiquant un exercice mixte. Pour les retraités actifs, phénomène en plein boom, le relèvement du plafond de revenu annuel de 11 500 euros à 40 000 euros dans les zones en tension est acté (plafond en deça duquel ils sont dispensés de verser une cotisation supplémentaire à l'ASV). L'amélioration de la protection sociale est promise pour les remplaçants, mesure réclamée de longue date par les jeunes de ReAGJIR.
Afin de favoriser les stages ambulatoires, le gouvernement sort le carnet de chèque. L'indemnité des maîtres de stage en zone sous dense sera revalorisée de 50 % (soit 300 euros), une mesure qui était déjà prévue. Une aide de transport ou d'hébergement de 200 euros interviendra pour favoriser le choix de stage.
Les consultations avancées en zone fragile seront valorisées à la faveur d'une augmentation de l'aide à l'activité réalisée dans le cadre du nouveau contrat de solidarité territoriale – l'aide passant de 10 % des honoraires à 25 %, dans la limite de 20 000 euros par an.
Guichet unique et nouveaux contrats
D'autres mesures visent à simplifier les démarches administratives à l'installation avec un guichet unique par territoire et des équipes dédiées (avant la fin du premier trimestre). Édouard Philippe promet aussi une mission de simplification administrative confiée à l'IGAS, ce qui ne déplaira à aucun médecin...
Le plan prévoit des postes d'assistants partagés ville/hôpital concernant aussi bien les généralistes que les spécialistes. Ce contrat liera non plus uniquement les hôpitaux publics mais, par exemple, un hôpital et une structure libérale ambulatoire. Autre levier : le contrat de médecin adjoint. Ce statut permet déjà à des internes d'apporter un appui temporaire à leurs aînés en zones à afflux touristique ou en cas d'épidémie. Il s'agit donc de l'élargir à des zones sous denses.
L'interpro à grande échelle
Promesse d'Emmanuel Macron, le doublement du nombre de maisons et de centres de santé d'ici à 5 ans est confirmé ; 400 millions d'euros sont prévus d'aide à l'investissement pour construire 1 000 maisons de santé supplémentaires. Autre objectif affiché : augmenter le nombre de MSP bénéficiant des nouvelles rémunérations en équipe (40 000 euros à 60 000 euros par an en moyenne).
Le plan prévoit aussi la généralisation des coopérations ASALEE, dispositif cher à MG France, permettant aux infirmiers de prendre en charge des maladies chroniques, en lien direct avec le médecin traitant.
La généralisation de la télémédecine sera effective dès 2018. En pratique, les partenaires conventionnels négocieront pour fixer au premier trimestre le tarif de droit commun de la téléconsultation et de la télé-expertise. Parallèlement, dans les établissements, maisons ou centres de santé, une aide à l'équipement à hauteur de 28 000 euros par structure est débloquée pour encourager la télémédecine.
La ministre veut enfin encourager les projets innovants (organisation, tarification, prise en charge) issus des territoires. Un cadre commun permettant aux professionnels d'expérimenter ces nouvelles organisations sera créé (avec une évaluation systématique). Une mission est prévue sur les soins non programmés, un des objectifs étant d'élargir les plages d'ouverture des maisons médicales de garde.
Études de médecine générale
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