Le centre de radiothérapie de Ris-Orangis (Essonne), le seul du département, qui prend en charge près de 2 200 patients par an, perdra bientôt ses quatre médecins spécialistes. En effet, le groupe privé Almaviva qui possède l'établissement a mis fin au contrat d'exercice des radiothérapeutes et leur préavis prendra fin ce 31 juillet. En cause, un conflit larvé entre les praticiens, qui dénoncent une redevance trop élevée, et la direction, qui évoque de son côté une « mésentente » entre eux.
Interrogés dans « Le Parisien », les radiothérapeutes indiquent que leur conflit avec Almaviva remonte à début 2020. « Nous nous sommes rendu compte que l'on payait très cher notre redevance, leurs bénéfices sur le centre dépassaient nos revenus, ce qui est contraire au Code de santé publique », racontent-ils.
La clinique, elle, regrette « des tensions avec la direction, qui a essayé d'insuffler un esprit d'équipe entre les quatre médecins, sans y parvenir ». « Cette mésentente entre eux présentait un risque essentiel de sécurité, nous n'avons pas eu d'autres choix », indique-t-elle dans la presse régionale. Contactés par « Le Quotidien », les représentants de la clinique précisent que la rupture de contrat d’exercice date d’il y a deux ans, durée du préavis qui prend fin au 31 juillet 2022. La continuité des soins est « parfaitement assurée » – une équipe mobile de radiothérapeutes prendra le relais en septembre – et l’ensemble des acteurs du territoire sont informés, nous indique-t-on, sans plus de précisions.
« Histoire de gros sous »
La FMF-Spécialistes, qui s'est émue de ce conflit et l'a relayé, se désole de « l'absence totale de mobilisation » de l'ARS Ile-de-France pour des malades « dont la prise en charge rapide est cruciale pour guérir de tumeurs malignes mortelles ». Le président du syndicat, le Dr Bernard Huynh, alerté par l'un des médecins, estime que le groupe Almaviva « détruit consciencieusement une organisation efficace et reconnue par les soignants du département », avec notamment 70 groupes de travail hebdomadaires pour définir le protocole de soins « le plus précis et efficace » pour chaque patient. Selon la FMF, « pour justifier de ne plus donner accès à son plateau technique, le groupe Almaviva tient des propos dénigrants et diffamatoires » envers les quatre praticiens.
L'ARS, de son côté, estime avoir géré la situation. Dans « Le Parisien », le directeur de la délégation départementale de l'Essonne estime que ce sont les médecins qui ont « mis le bazar, cela n'était plus possible en termes de ressources humaines et d'organisation ». « Ils ont fait vivre un enfer à Almaviva pour des histoires de gros sous », rétorque-t-il.
Jointe par le Quotidien, la direction générale de l'ARS francilienne tempère et indique suivre « de près la situation », en lien avec la CPAM de l’Essonne. « Malgré plusieurs tentatives déclarées par la direction d’Almaviva pour apaiser les tensions, et une médiation du conseil départemental de l’Ordre des médecins, le groupe a été contraint en juillet 2020 de résilier les relations contractuelles avec les quatre radiothérapeutes », résume-t-elle. Elle indique aussi s'être assurée « de la continuité de service et de la prise en charge des patients pendant la période de transition ». Le groupe Almaviva aurait ainsi « répondu aux attentes de l’Agence » en recrutant deux radiothérapeutes qui assureront le suivi et la continuité des soins des patients en cours de traitement durant le mois d’août, et en conventionnant avec trois autres structures de soins.
Blanc-seing aux groupes privés
Insuffisant pour la FMF-Spécialistes, qui estime que ce n'est « pas le même niveau d'engagement » pour les patients. « L'ARS aurait dû se donner le temps de la réflexion, rencontrer les parties prenantes et prolonger de six mois l'équipe en place », juge le Dr Bernard Huynh.
Et de dénoncer « le blanc-seing donné aux groupes privés au détriment des malades que l'argent public devrait soutenir ». « Les malades de nos régions veulent des médecins pour être pris en charge à la fois dignement et rapidement. Pas des promesses, des coquilles vides et des équipes mobiles d'oncologues lointains peu disponibles », poursuit le président de la FMF-Spécialistes. « S'il est important de structurer l'offre de soins en ville avec de grands groupes qui ont les moyens que notre ministère de la Santé n'a plus, cela doit se faire en mettant les patients au cœur des besoins à couvrir, pas des bénéfices à générer », conclut-il.
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