« Les conditions d'exercice se dégradent, il va falloir changer de méthode tout en revalorisant les actes. Il faut aussi une évolution vers plus de prévention », a résumé le Dr Benoit Féger, président de l'URPS médecins libéraux Nouvelle-Aquitaine, lors de la remise à François Bayrou, secrétaire général du Conseil national de la refondation (CNR), de son rapport final sur les priorités d'évolution pour la profession.
Ce document de l'URPS ML synthétise un travail de plusieurs mois sur le modèle souhaitable de la médecine de ville à dix ans. Après une étude prospective réalisée par questionnaire auprès des praticiens libéraux de la région et des ateliers en présence d'experts du secteur (économie de la santé, intelligence artificielle, prévention), l'Union a formulé huit recommandations pour engager la profession dans un « virage global ».
Pilotage collégial
La prévention et l'éducation des citoyens au bon usage du système de santé doivent être un pilier de la réforme. « On se bat contre les patients qui réclament un IRM ou un rendez-vous en urgence », illustre le Dr Féger.
Côté exercice, l'ORL plaide pour « une organisation médicale collective » et « souple » favorisant l'exercice pluriprofessionnel, mais sans modèle juridique unique.
Pour favoriser l'adhésion des acteurs locaux aux décisions et leur appropriation, l'Union prône un pilotage décentralisé plus « collégial, paritaire et pragmatique », avec un « pourcentage du budget de la Sécu qui soit régional », à travers des objectifs régionaux de dépenses maladie (Ordam).
En matière de formation initiale cette fois, la révision des maquettes des étudiants serait bienvenue pour intégrer davantage « de gestion, de management et d'usage du numérique ». « Et ce n'est pas en mettant une année supplémentaire que cela va changer », alerte le Dr Féger, en écho à l'allongement de l'internat généraliste.
Transferts intelligents de tâches
Face aux difficultés d'accès aux soins, l'URPS ML défend « un transfert de tâches intelligent » avec « délégation de suivi » protocolisé et signature d'un contrat thérapeutique entre le patient, la Sécu et les professionnels de santé. « On ne doit pas dépouiller une profession de ses actes pour les donner à une autre », met-il en garde. Dans les zones sous-denses, les libéraux de l'URPS défendent un « bonus financier incitatif ».
Ces solutions nécessitent une « loi d'organisation des soins sur cinq ans à l'instar des lois de programmation militaire », plaide l'URPS. « Pour les médecins, cela donne une perspective d'avenir et permet de rentrer dans une dynamique gagnante ».
Marge de régulation
À la remise de ces travaux prospectifs, François Bayrou a salué « le travail intéressant de l'Union ». La création d'objectifs régionaux de dépenses maladie (Ordam) a semblé intéresser fortement le maire de Pau car elle permettrait à ses yeux « de réfléchir régionalement aux problématiques de santé très différentes sur la Côte d’Azur et dans un bassin minier ».
Interrogé sur l'installation des médecins libéraux, l'ancien ministre refuse toute contrainte punitive. « Mais entre le laisser-faire et la coercition, il y a une marge de régulation », suggère-t-il. « On ne peut pas rester sans réponse face aux déserts médicaux mais la pratique autoritaire n'est pas exactement dans notre culture », résume-t-il. François Bayrou promet de transmettre les propositions de l'URPS Nouvelle-Aquitaine aux membres du Conseil national de la refondation.
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