° Le prérapport d’expertise
Accablant pour le Dr Delajoux, le prérapport du Dr Bertrand Gachot (infectiologue) et du Pr Marc Tadié (neurochirurgien) ? C’est ce qu’affirme « le Journal du dimanche », qui en publie des extraits. Pas du tout, rétorquent le chirurgien et son avocat : selon Me Hervé Temime, le rapport confirme que « l’opération s’est déroulée selon les règles de l’art et que les complications ont aussi été traitées selon les règles de l’art sur un plan chirurgical et médical ».
Stéphane Delajoux avait déjà opéré Johnny Hallyday en octobre 2008 pour une hernie discale. En novembre 2009, une nouvelle intervention apparaît nécessaire. Lors de l’opération, une brèche dans la dure-mère a été faite, provoquant des pertes de liquide céphalorachidien (LCR). « Ce n’est pas une faute en soi », disent les experts, mais, dans un tel cas, « il est recommandé de garder le patient au repos strict pendant 48 heures pour favoriser la cicatrisation ».
Autre reproche fait au médecin : le patient n’aurait pas été informé du problème, pas plus qu’il ne l’aurait été du risque, avant l’intervention. Les experts estiment à 75 % la perte de chance d’éviter la fuite de LCR et donc l’infection qui avait nécessité son admission en urgence, le 7 décembre, à l’hôpital Cedars-Sinaï de Los Angeles et qui, d’après le rapport, n’a pas été contractée à la clinique Monceau.
Opéré le 26 novembre, Johnny Hallyday sort le 27 dans l’après-midi, sans attendre le Dr Delajoux. Le 30, après avoir constaté les pertes, il revient à la clinique pour un renforcement de la cicatrice. « Là encore, j’aurais préféré le garder en observation, mais Johnny a voulu partir », assure le chirurgien au « Parisien ». Il nie aussi le défaut d’information sur la brèche de dure-mère.
L’expertise a été demandée par la justice pour aider à évaluer les responsabilités dans les problèmes de santé qui ont conduit à l’annulation de la tournée du chanteur, plusieurs millions d’euros étant en jeu. Chaque partie peut apporter ses observations sur le prérapport avant que les experts ne rendent leurs conclusions définitives le 30 septembre.
° Le risque doublé au cours d’une réintervention
L’incidence des plaies dure-mériennes au cours de la chirurgie des dégénérescences du rachis lombaire varie selon les équipes. Mais les données sont peu nombreuses. En présentant leurs résultats rétrospectifs conjoints sur dix ans, des équipes de Pittsburgh et Nashville reprenaient en 2006 les chiffres de diverses études*. On peut retenir qu’une statistique européenne estimait à 8,56 % l’incidence de ces accidents opératoires au cours d’une intervention pour canal lombaire étroit et à 13,2 % lors d’une reprise pour discectomie.
En regroupant toutes les interventions de leurs services, Mustafa Khan et coll. aboutissent, sur 3 183 patients, à 7,6 % (153 sur 2 024) de plaies dure-mériennes en chirurgie lombaire primaire et à 15,9 % (185 sur 1 159) pour les réinterventions. Les chirurgiens américains, en rappelant une tendance à la sous-estimation de cette complication, constatent que le risque est doublé lors d’une réintervention.
En examinant les diverses options thérapeutiques, ils insistent d’emblée sur l’absence de succès de tout traitement non opératoire. Au nombre des options thérapeutiques répertoriées : les colles biologiques, les blood patchs et les greffes de tissu. Ils y ajoutent une technique de réparation sans suture utilisant un greffon à base d’une matrice collagène synthétique. Pour leur part, Mustafa Kahn et coll. ont toujours eu recours à la suture de la brèche avec un fil de soie 4-0 et le plus souvent à la pose d’un drain.
En l’absence de céphalées, leur protocole favorise l’ablation rapide du drain et le lever précoce, l’ensemble au bout de 24 heures. Dans le cas contraire, le drain est retiré au 3e jour et le lever différé. Dans leur série, les chirurgiens rapportent plus de 98 % de succès dans le traitement de cette complication grâce à leur protocole incluant une mobilisation précoce.
* Spine 2006 ; 31 (22) : 2609-2613.
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