LE QUOTIDIEN : Les internes sont vent debout contre la 4è année d'internat en médecine générale à faire en priorité dans les déserts médicaux. Prévoyez-vous des modifications en séance ?
STÉPHANIE RIST : Je n'ai pas prévu d'amender cette mesure mais les choses peuvent évoluer en fonction de la discussion. L'idée de cette 4è année est d'homogénéiser les formations des internes entre la médecine générale et les autres spécialités. Cette volonté a été exprimée pour que les jeunes soient mieux formés en ambulatoire sur l'installation, la gestion du cabinet ou le management. Aujourd'hui, j'entends la crainte d'une contrainte à exercer en zones sous denses. Or, ce ne sera pas une obligation et ce n'est pas écrit non plus qu'il faudra s'installer là où la quatrième année a été effectuée. Les internes veulent savoir quels seront leur statut et leur rémunération, ce sont des sujets à discuter avec eux. Les concertations annoncées pour définir les contours de cette année supplémentaire devraient, elles, relever du réglementaire.
Les biologistes menacent d'une grève générale contre les mesures d'économies. Ils craignent de devoir fermer des laboratoires de proximité. Que répondez-vous ?
À chaque fois qu'on réclame des mesures d'économies, il y a des mécontents ! Mon rôle en tant que rapporteure est de m'assurer de l'équilibre des comptes sociaux en ayant comme boussole l'accès aux soins de tous les citoyens. J'entends les craintes des professionnels. C'est pourquoi j'ai fait adopter un amendement pour que le maintien des points de contacts en proximité soit discuté dans le cadre conventionnel entre l'Assurance-maladie et les biologistes.
Un article du PLFSS permet à l'Assurance-maladie et aux médecins de redéfinir les conditions à remplir pour être conventionnés. Est-ce la porte ouverte vers un conventionnement sélectif ?
Je suis opposée à toute forme de contrainte à l'installation. Mais cela ne veut pas dire que l'accès aux soins ne figure pas dans les objectifs que la Cnam aura à négocier avec les médecins libéraux. Le conventionnement fera partie des futures négociations. Il ne vous a pas échappé qu'il y a une dizaine de propositions de loi déposées par tous les partis en faveur de la contrainte à l'installation, sous une forme ou sous une autre. 80 % de la population nous réclame la coercition. Je crois que les médecins en sont conscients ; ils ont tout intérêt à s'en emparer eux-mêmes pour proposer des solutions qui ne nécessitent pas de mettre en place du déconventionnement par exemple.
Le budget de la Sécu prévoit une augmentation de 2,9 % des dépenses de soins de ville. Est-ce de nature à répondre aux attentes du secteur libéral avant les négociations conventionnelles ?
Nous sommes contraints par des enveloppes globales, on voit qu'on arrive au bout du système. Cela crée de vifs mécontentements, notamment chez les médecins libéraux qui expliquent à juste titre que 25 euros pour leur consultation de base, c'est très insuffisant. Pour payer les professionnels à leur juste valeur, il faut aussi transformer les modes de financement, que cela soit en ville ou à l'hôpital. C'est cette refondation que j'attends aussi du CNR santé.
La suppression des cotisations retraite des médecins libéraux en cumul a été adoptée en commission, contre votre avis. Pourquoi ?
Dans un contexte de pénurie médicale, on a intérêt à trouver des incitations fortes pour donner envie aux praticiens de ne pas partir à la retraite. Mais je crois que cette évolution devrait être discutée plutôt dans le cadre de la concertation sur la réforme des retraites.
Vous bataillez en faveur des transferts de compétences. Le PLFSS va-t-il assez loin ?
La commission a déjà adopté un amendement du groupe transpartisan pour expérimenter l'accès direct aux IPA pour des pathologies bénignes qui ne nécessitent pas un passage par les urgences. Je salue cette avancée même si je préférerais que cela soit immédiatement généralisé. Pour accélérer le mouvement, notre groupe va déposer à l'Assemblée une proposition de loi pour autoriser l'accès direct aux infirmiers en pratique avancée, aux kinés et aux orthophonistes.
Le PLFSS complète l'encadrement de l'intérim médical. C'est la fin des dérives du mercenariat ?
L'arsenal sera au complet avec cette mesure du PLFSS qui conditionne l'emploi des intérimaires à un exercice préalable dans un cadre autre qu'un contrat avec une entreprise de travail en intérim pendant une durée minimale. La discussion est indispensable avec les professionnels pour fixer cette durée. J'entends les difficultés des établissements à trouver des médecins mais l'intérim médical a doublé dans les hôpitaux de 2020 à 2021…
Êtes-vous optimiste sur un vote du budget de la Sécu sans 49.3 ?
Je ne suis pas très optimiste. Le travail en commission a été sérieux et serein mais sera-ce le cas en séance publique ? Toutes les mesures d'économies sont importantes, ma ligne rouge est le maintien et l'équilibre des comptes publics. Si le PLFSS est vidé de son contenu, il n'y aura pas d'autres solutions que le 49.3.
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