L’accessibilité géographique aux médecins généralistes se détériore ces dernières années et le nombre de médecins généralistes libéraux devrait continuer à baisser ces prochaines années d’après les projections.
De nombreuses mesures ont été mises en place pour tenter d’enrayer la situation et le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) en fait partie.
L’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) vient de publier dans son dernier numéro de Questions d’économie de la santé, une étude qui mesure l’impact des MSP sur l’évolution de la densité des médecins généralistes libéraux.
Les MSP majoritairement en zones sous-dotées
Le premier constat des auteurs de l’étude, Guillaume Chevillard et Julien Mousquès, concerne l’implantation des MSP. Au 1er janvier 2020, 61 % d’entre elles sont situées dans les deux types de territoires de vie retenus pour l’étude, qui sont ceux avec les plus faibles niveaux d’accessibilité potentielle localisée aux soins de premier recours. 35,5 % sont dans les marges rurales et 25,8 % dans les espaces périurbains ayant une moindre accessibilité en soins primaires (voir définition de ces territoires de vie ci-dessous).
Si l’on prend les zones sous-dotées telles qu’elles sont définies par les ARS, 575 maisons de santé y sont implantées sur 900, soit 64 % selon la DGOS. Pour les MSP situées dans les marges rurales 86 % sont aussi dans une zone sous-dotée, et 55 % pour celles dans les espaces périurbains.
Les espaces périurbains, avec une moindre accessibilité aux soins primaires (21,2 % de la population) : deuxième couronne périphérique des grandes agglomérations ou campagnes périurbaines. Plus forte croissance de population depuis 2009, population plutôt jeune, un taux d’emploi élevé, légère surreprésentation des ouvriers et un état de santé dans la moyenne. L’APL aux différents professionnels de santé de premier recours inférieure à la moyenne métropolitaine, densité de médecins généralistes libéraux la plus faible, et distance aux établissements de santé légèrement supérieure.
Les marges rurales (13,2 % de la population) : espaces ruraux de l’intérieur de la France, éloignés des villes. Populations défavorisées, surreprésentation des personnes âgées et des ouvriers. Niveau d’éducation et moyenne des revenus plus faibles, indicateurs d’état de santé défavorables (mortalité prématurée et toutes causes élevées). L’APL moins bonne que la moyenne et plus faible pour les médecins généralistes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes et dentistes. La diminution de la densité de médecins généralistes depuis 2004 y est la plus prononcée ainsi que la part de médecins généralistes proches de la retraite.
Effet bénéfique des MSP, surtout chez les jeunes généralistes
Pour cette étude, les auteurs ont retenu les MSP ouvertes entre 2008 et 2016, afin d’observer l’offre de soins avant (2004-2007) et après (à partir de 2017). De manière générale, l’étude montre que la densité de médecins généralistes libéraux évolue de manière négative entre 2004 et 2017 que ce soit pour les moins de 45 ans ou pour l’ensemble de la profession. Et si l’on considère l’ensemble des territoires de vie, l’implantation d’une MSP a une influence positive sur la densité des professionnels, estimée entre +1,4 et +1,7 médecin généraliste supplémentaire pour 100 000 habitants par rapport aux territoires qui en sont dépourvus, et +3,4 généralistes pour 100 000 habitants chez les moins de 45 ans. « Au global, pour l'ensemble des territoires, la baisse de la densité médicale est donc moindre dans les territoires avec maisons de santé », souligne l’étude.
Ce sont dans les espaces périurbains défavorisés en offre de soins que l’attractivité des MSP est la plus forte pour les jeunes médecins explique l’article. L'effet causal de l'implantation d'une maison de santé sur la densité de médecins généralistes de moins de 45 ans est estimé entre +4,1 et +4,4 jeunes généralistes de plus pour 100 000 habitants en faveur des espaces avec maisons de santé (voir ci-dessous). L’effet est quasiment le même (entre +4 et +4,5) sur l’ensemble des généralistes quel que soit l’âge, ce qui montre selon les auteurs que « les effets des maisons de santé sur l’évolution de l’offre de médecins généralistes sont surtout portés par leur attractivité auprès des jeunes ».
Pour les marges rurales, on remarque aussi un effet MSP chez les jeunes, estimé à +3,4 jeunes généralistes pour 100 000 habitants. Idem pour l’ensemble des omnipraticiens avec une fourchette entre +2,3 et +2,9 généralistes libéraux pour 100 000 habitants (voir ci-dessous). Malgré tout la raréfaction de l’offre de soins est importante dans ces territoires de vie et les MSP jouent surtout comme « amortisseur », sans pour autant réussir à provoquer « une inversion majeure de tendance du fait de nombreux départs à la retraite non compensés par l’attractivité auprès des jeunes généralistes », souligne l’étude.
En conclusion, l’étude montre que les maisons de santé concourent à réduire les inégalités territoriales d'offre de soins, mais que leur développement doit s’accompagner de mesures complémentaires, ciblées selon le territoire de vie comme notamment : « la prise en compte de l’origine sociale et géographique des étudiants », « l’extension d’internats ruraux », les stages en zones sous-dotées. Idem pour toutes les mesures qui permettent des gains de productivité comme : l’exercice pluripro en général, les délégations de compétences ou la télémédecine.
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