?On en parle depuis un moment déjà, mais cette fois les choses pourraient s’accélérer. L’année dernière, la ministre des Sports d’alors, Valérie Fourneyron, avait évoqué dans la presse des axes de réforme au sujet de la délivrance du certificat de non-contre-indication au sport. Et,ensuite, plus rien... Mais voilà qu’aujourd’hui – et deux remaniements plus tard – le sujet refait surface et, en conseil des ministres, le 10 décembre, sera présenté le projet de loi Macron qui autorisera le gouvernement à procéder sur le sujet par ordonnances. Le dossier est désormais entre les mains du secrétaire d’État chargé de la réforme d’État et de la simplification, Thierry Mandon.
Des certificats d’aptitude au sport valables plusieurs années
Mi-novembre, alors que François Hollande avait annoncé fin octobre 50 mesures pour les entreprises dans le cadre du choc de simplification administrative promis en mars 2013, Thierry Mandona en effet dévoilé à son tour en conseil des ministres une quarantaine de mesures visant à faciliter la vie quotidienne des Français. Parmi elles, la délivrance du certificat au sport. À partir de la rentrée 2015, ces certificats médicaux pour les moins de 18 ans seront valables plusieurs années sans avoir à les refaire à chaque rentrée. La durée de validité serait fixée à trois ans. Sauf pour les sports extrêmes – comme la boxe ou la plongée sous-marine – qui feraient toujours l’objet d’une visite médicale annuelle.
Une mesure qui a surpris les premiers concernés. « On a appris cette mesure par la presse », regrette Jean-Paul Hamon, président de la FMF. « La dernière fois que nous avons été consultés c’était il y a plus d’un an », assure de son côté le président du SML, Roger Rua. Un groupe de travail constitué des syndicats de médecins libéraux représentatifs s’était réuni à plusieurs reprises parvenant à une série de propositions pour réformer ces certificats médicaux. « Nous étions d’accord pour que le certificat soit réalisé tous les trois ans sauf pour la compétition et à condition de la réalisation d’un examen complet avec ECG », explique Roger Rua, également médecin du sport. L’idée d’un auto-questionnaire à remplir chaque année par le patient avait également été retenue. Si, du côté du SML, on est favorable à cette évolution que l’on voit comme une « professionnalisation du certificat de non-contre-indication », son président s’impatiente : « On attend toujours les réponses juridiques qui permettraient d’avancer sur ce dossier ».
Un risque pour la santé des enfants
A contrario, Jean-Paul Hamon voit dans cette « simplification » un risque pour la santé des enfants. « C’était l’occasion pour nous, médecins généralistes, de vérifier les vaccins des plus jeunes, leur croissance, leur poids, etc. Ce délai de trois ans ne me paraît pas raisonnable ». Le généraliste de Clamart pointe aussi les conséquences pour la responsabilité civile des médecins en cas de pépins, car trois ans, c’est long. Citant l’exemple d’un patient qui peut commencer par faire des courses de 10 000 m avant de décider de s’engager sur un marathon de 42 kilomètres deux ans après. Entre-temps, il n’aura pas été voir son médecin généraliste, « et ce n’est quand même pas la même chose, cela ne demande pas le même effort physique ».
À MG France, on partage aussi cette crainte de ne plus voir « assez » les enfants. Son président, Claude Leicher, souhaiterait plutôt que l’on garde la consultation annuelle jusqu’à la fin de l’adolescence et qu’on réexamine les adultes dans un délai inférieur à 5 ans. Enfin, l’Unof est, elle, fermement opposée à cette mesure. « Cette consultation est souvent l’occasion d’évoquer des sujets avec nos patients comme, par exemple, la contraception, les addictions ou l’obésité. Quel impact sur la santé publique si tous ces jeunes ne viennent plus nous voir que tous les trois ans ? », s’interroge le président de la branche généraliste de la CMSF, Luc Duquesnel.
Censée « simplifier » la vie des Français mais aussi des médecins généralistes, la réforme du certificat de contre-indication au sport est donc loin de faire l’unanimité parmi vos représentants. Mais surtout, ces derniers ont davantage l’impression que le problème est ailleurs et que cette mesure ne leur permettra pas de gagner du temps ou d’améliorer leur quotidien. Ce sont plutôt les certificats dits « inutiles » qui les tracassent (voir encadré).
« Un déni du rôle du médecin du travail »
Et s’agissant du surmenage, on ne peut pas dire que la deuxième annonce faite au sujet de la médecine du travail rassure plus que ça. Car la mesure visant à « simplifier la visite médicale » – quoiqu’annoncée dans le cadre du choc de simplification – devrait forcément rajouter du travail aux généralistes…
Jusque-là aucune précision n’a été apportée par le gouvernement, mais, du côté des syndicats de médecins du travail, la réaction ne s’est pas fait attendre. Certains y voient une volonté de la part du gouvernement de « supprimer le médecin du travail » et de faire faire les consultations d’aptitude à l’embauche et de suivi par les généralistes. « Le projet de simplification administrative qui prévoit de déléguer cette visite au médecin généraliste est un déni complet du rôle du médecin du travail, seul professionnel médical capable d’identifier un environnement toxique ou une organisation de travail délétère », rappelle la CFE-CGC, syndicat général des médecins et des professionnels des services de santé au travail.
Chez les généralistes, cette mesure ne serait peut-être pas si mal accueillie si les consultations étaient rémunérées au même tarif que celles payées par les entreprises aux médecins du travail... À vrai dire le président de la FMF y avait même déjà pensé. Pour Jean-Paul Hamon, si cette consultation était un « vrai moment de prévention, cela aurait du sens ». « Je ne suis pas contre le fait que les généralistes puissent faire les visites d’embauche ou de suivi tous les deux ans, mais il faut que les médecins soient payés 80 euros comme les médecins du travail », insiste-t-il.
À l’Unof aussi, on estime que les généralistes sont « capables » de le faire à part dans certains cas pas trop spécifiques. Ces consultations rentreraient comme celle du certificat du sport dans le champ de la prévention et permettraient donc de suivre des patients qui ne sont pas malades. «?Attention à ne pas vouloir trop charger la barque déjà bien pleine des généralistes », prévient toutefois le Dr Gérald Galliot (CSMF) – actuel président du conseil de surveillance de l’OG DPC et qui fut aussi le Monsieur simplification administrative de la CSMF – pour qui la réalisation de ce type de consultations doit rester volontaire. Il propose également que le généraliste soit formé car « on ne peut pas s’inventer médecin du travail du jour au lendemain », mais avertit déjà le gouvernement. « Si formation il y a, celle-ci devra s’effectuer dans le cadre du DPC et être prise en charge par l’État ».
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