« Nous avons abordé de nombreux sujets, même si le premier d’entre eux concernait les négociations conventionnelles, confie le Dr Devulder. Le ministre a très clairement exprimé que ces négociations devaient reprendre et aboutir. On ne pourrait pas essuyer deux fois un échec. » Si le patron de la Conf' se réjouit de la volonté ministérielle affichée de sortir du cadre du règlement arbitral, il précise que le retour de son syndicat à la table des négos ne se fera qu’à certaines conditions – le passage du C à 30 euros en étant le préalable incontournable.

Totem des 30 euros

« La demande de revalorisation [de la consultation de référence] à 30 euros est devenue un totem pour les médecins généralistes », abonde le Dr Luc Duquesnel, alors que le règlement arbitral prévoit le passage de la consultation à 26,50 euros à l'automne. Le généraliste mayennais soutient que les médecins de famille vivent déjà ce montant comme « une humiliation » et que beaucoup d'entre eux refuseront de l’appliquer pour tarifer directement 30 euros. Une possibilité qui n’aurait pas échappé au ministre.

Autre facteur qui alourdit le climat : l’annonce d’une grève « illimitée » de plusieurs syndicats de médecins libéraux, programmée à partir du 13 octobre, à la veille de la reprise du débat parlementaire autour de la proposition de loi Valletoux. « Ce texte contient une obligation individuelle de permanence des soins et donne la possibilité à un directeur d’agence régionale de santé de contraindre un médecin libéral à faire des gardes à l’hôpital public. C’est inacceptable », affirme le Dr Devulder.

Pression politique

Autre ligne rouge du syndicat. « Même si elle ne figure pas aujourd’hui dans le texte, il s’agit de la suppression de la liberté d’installation qui pourrait y être introduite, parce qu’on connaît la pression politique sur le sujet », analyse le président de la Confédération. Dans ces cas de figure, la CSMF rejoindra le mouvement de grève.

Ce qui n’empêche pas le leader syndical de louer la qualité de ces premiers échanges avec Aurélien Rousseau. Sur le service d’accès aux soins (SAS), le ministre a convenu qu’il serait sans doute préférable de s’adapter aux réalités de terrain (y compris à ce qui fonctionne déjà) et de ne pas « réglementer à tous crins ».

Amende honorable

Quant au gisement d’économies qu’espèrent trouver Bercy et la Cnam dans le contrôle accru des IJ, le Dr Devulder a expliqué au ministre que « la solution consistant à pointer du doigt les médecins de famille comme responsables de prescriptions injustifiées est complètement contre-productive ». « Vous les braquez et les vexez », a-t-il insisté. En la matière, le ministre de la Santé aurait fait amende honorable. « C’est assez rare pour être souligné, se félicite le Dr Franck Devulder. Aurélien Rousseau, qui gardait un œil sur les négociations en tant que directeur de cabinet d’Élisabeth Borne, a reconnu une erreur sur la méthode ». « On aurait sans doute dû procéder différemment, nous a-t-il confiés. Globalement, ce premier entretien s’est bien passé ».

Le gastro-entérologue libéral de Reims veut pour preuve de ce réchauffement la demande du ministre de suivre prochainement un généraliste mayennais de terrain dans son quotidien d’exercice. À charge pour le Dr Luc Duquesnel – qui exerce dans ce département frappé par la pénurie médicale – d’organiser cette rencontre. Le point d’orgue programmé serait des échanges en soirée entre Aurélien Rousseau et une trentaine de généralistes de Mayenne. De quoi faire largement remonter les attentes et les priorités du secteur libéral…