Suspendues depuis le 8 avril, les négociations conventionnelles entre la Cnam et les médecins libéraux pourraient-elles reprendre dans quelques semaines ? Selon MG France et Avenir Spé reçus hier par Frédéric Valletoux, le ministre délégué à la Santé, qui reçoit tous azimuts, œuvre en ce sens. Les deux syndicats majoritaires ne ferment pas non plus leur porte mais posent leurs conditions.
Les belles paroles ne suffiront pas
Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France
« Le ministre veut-il vraiment qu’on signe la convention ou pas ? Car ce qu’il s’est passé le week-end dernier nous autorise à nous poser des questions », ironise la Dr Agnès Giannotti. La présidente de MG France est toujours très en colère contre les annonces sans concertation de Gabriel Attal, qui s’est entretenu le 6 avril avec la presse quotidienne régionale. Outre la menace à peine voilée d’un retour de l’obligation de garde si la profession ne s’organise pas ou l’ouverture des vannes aux étudiants en médecine d’ici à 2027, l'expérimentation de l’accès direct aux médecins spécialistes annoncée par le Premier ministre reste un casus belli, car source de dérégulation du parcours de soins coordonnés autour du médecin traitant. « Qu’il y ait des difficultés d’accès aux soins dans certains endroits, nous en sommes conscients. Mais les solutions ne se feront pas au détriment du système du médecin traitant », ajoute la généraliste parisienne. MG France attend des « engagements écrits fermes » avant de retourner à la table de discussions. « Tant qu’on n’aura pas l’assurance d’un soutien au système conventionnel, au médecin traitant et au parcours de soins, on ne signera pas », martèle la Dr Giannotti. Ces derniers jours, Frédéric Valletoux a eu beau rappeler à plusieurs reprises dans la presse l’importance des médecins traitants dans l’architecture du système de santé, la pilule ne passe toujours pas. « Les belles paroles ne suffiront pas », prévient la Dr Giannotti.
Solidaires avec les cliniques privées
Du côté d’Avenir Spé, le ton est tout aussi déterminé. Son président, le Dr Patrick Gasser, rappelle que quatre syndicats – dont Avenir Spé-Le Bloc – ont claqué la porte de la négociation conventionnelle pour protester contre la campagne tarifaire 2024, jugée inique et humiliante pour le privé. « Nous restons solidaires des cliniques privées. Le gouvernement doit trouver des conditions acceptables avant la grève du 3 juin », déclare au Quotidien le gastro-entérologue nantais. Plus encore, le syndicat majoritaire des spécialistes ne retournera pas négocier sans engagements autour de trois revendications : un assouplissement des conditions de facturation de l’avis ponctuel de consultant (APC) ; une revalorisation digne de ce nom des actes médicaux techniques dans l’attente de la refonte globale de la nomenclature (CCAM) ; une refonte intelligente des contrats de maîtrise tarifaire (Optam, Optam-Co).
Nous voulons travailler main dans la main avec les médecins généralistes
Dr Patrick Gasser, président d’Avenir Spé
Concernant l’accès direct aux spécialistes, l’organisation se dit prête à travailler sur le contour de cette expérimentation « mais main dans la main avec les médecins généralistes ». « Nous ne voulons pas les écarter, se défend le Dr Gasser. En Allemagne, cet accès direct fonctionne mais avec des assistants médicaux, des infirmiers en pratique avancée. Il faut se donner les moyens pour une vraie coconstruction dans le respect du parcours des soins », résume le spécialiste. La balle est dans le camp du gouvernement.
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