« Cela fait deux ans que les spécialistes libéraux veulent se remettre au centre du système de santé. Nous avons fait notre introspection et sommes ouverts à la discussion avec tous les acteurs » – Assurance-maladie, complémentaires, confrères généralistes ou paramédicaux – a souligné le Dr Patrick Gasser, patron d'Avenir Spé, en conclusion des « Rencontres de la médecine spécialisée 2023 », qui se sont tenues à Lyon du 16 au 18 novembre. Dans la salle de l'URPS médecins libéraux Auvergne Rhône-Alpes, ce samedi 18 novembre, la soixantaine de praticiens saluent cette volonté affichée de renforcer le rôle du médecin spécialiste dans le parcours de soins. La plupart des praticiens présents à Lyon avaient fait le déplacement pour participer à une journée de formation spécifique mais aussi pour écouter l’intervention du ministre de la Santé et de la Prévention, Aurélien Rousseau.
La carte des équipes de soins
« Les contributions ont été riches », se réjouit le Dr Gasser, président d’Avenir Spé, organisateur de ces Rencontres. Le gastroentérologue de Nantes en veut pour preuve la diversité des intervenants – Agnès Buzyn, chercheurs, doyens de faculté, infirmières en pratique avancée, maires, etc.) et des thèmes abordés – des transformations des métiers du soin au maillage territorial en passant par la nouvelle approche des besoins de santé.
Alors que les négociations conventionnelles viennent de reprendre, les médecins spécialistes (cliniciens comme techniciens) veulent clairement jouer leur carte, via notamment le développement d'équipes de soins spécialisés (ESS), cheval de bataille du syndicat. « Nous, psychiatres, pâtissons beaucoup du fait que nous ne sommes pas une spécialité d'organes. Avec le plan santé mentale qui s'annonce, j'espère que nous serons pleinement associés au sein des ESS qui vont se discuter dans les négociations conventionnelles », témoigne, au détour d'une pose, la Dr Stéphanie Quintin, psychiatre à Lyon.
Réguler ou réglementer ?
Hasard ou non du calendrier, la dernière table ronde faisait intervenir le patron de la Cnam, Thomas Fatôme, face à trois médecins parlementaires : la députée et rhumatologue Stéphanie Rist (Renaissance, Loiret), rapporteure générale de la commission des affaires sociales à l’Assemblée, le sénateur et généraliste Bernard Jomier (app.PS, Paris) et le député ORL Cyrille Isaac-Sibille (Modem, Rhône).
Le thème du débat « Réguler ou réglementer ? » a conduit à trois quarts d’heure d’échanges aux termes desquels chacun a convenu de l’importance de préserver le système conventionnel français, sous réserve qu'il conduise à des politiques efficaces sur l'attractivité, l'accès aux soins mais aussi la maîtrise médicalisée des dépenses. Faute de quoi, le législateur pourrait être tenté de reprendre la main par des politiques d'encadrement. « Pendant longtemps, analyse Bernard Jomier, l'Ondam (objectif national de dépenses maladie) a été seulement déclaratif. Je crains fort que désormais, il devienne de plus en plus normatif ».
La force du dialogue conventionnel
Dans la salle, le DG de l'Assurance-maladie défend la force et l'efficacité du dialogue conventionnel, qui vient de reprendre. « Quand les parlementaires votent l'Ondam, ils passent la balle aux acteurs conventionnels… Dans un budget certes contraint, mais pour ma part, je pense que c'est toujours mieux quand ce sont les professionnels concernés qui s'emparent du sujet », expose Thomas Fatôme. « Mais, prévient-il, il ne s'agit pas de signer pour signer : les questions tarifaires se doublent de l'amélioration de l'accès aux soins. Et mieux la régulation sera faite, moins la réglementation sera nécessaire. »
« Je suis fondamentalement conventioniste et Avenir Spé entend être force de propositions au cours de ces négos », abonde le Dr Patrick Gasser. Un Livre blanc sera publié en ce sens par sa centrale « au premier trimestre 2024 ». « Ce type de rencontres nous permet de brasser des idées entre spécialités mais aussi de faire passer des messages aux décideurs », se réjouit la Dr Hélène Le Hors, chirurgienne infantile, avant de reprendre son train pour Marseille. Le message est passé : pas question que la médecine spécialisée soit reléguée au second plan dans ce nouveau round de négociations.
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