Nécessité fait loi. À l’aube de ses 70 ans, le Dr Richard Handschuh a sauté le pas, quand il y a trois ans, « la mairie de Paris a décidé unilatéralement de fermer les voies d’accès de mon domicile proche de Vincennes à mon cabinet du 20e arrondissement », explique le généraliste. Plutôt que d’affronter les 50 minutes quotidiennes devenues nécessaires pour rallier les deux adresses, il décide de passer au vélo. Dont il se sert également pour assurer les six ou sept visites hebdomadaires auprès de ses patients âgés ou grabataires.
« De toute façon, c’était devenu ingérable pour se garer. J’ai beau avoir l’appli Paybyphone, avec le stationnement gratuit, on passe son temps à tourner. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de place », peste, lucide, le généraliste devenu cycliste.
« On a créé, sans concertation avec les riverains, des embouteillages monstrueux dans des endroits où ça circulait, pour des raisons idéologiques », relève-t-il. Pas du tout certain à l’arrivée, explique-t-il, que la qualité de l’air et le taux d’émission de particules fines et de CO2 en soient véritablement améliorés. « Mais, bon, je me suis adapté… »
En saison sèche, c’est tout à fait sympathique. J’ai rarement plus de 20 minutes à pédaler pour me rendre chez mes patients
Dr Richard Handschuh
Et que pense-t-il de ce passage plus ou moins forcé à ce nouveau mode de transport ? « En saison sèche, c’est tout à fait sympathique. J’ai rarement plus de 20 minutes à pédaler pour me rendre chez mes patients. Au-delà, ça commence à devenir difficile », admet le jeune septuagénaire qui a opté, l’an dernier, pour un vélo à assistance électrique. En revanche, l’hiver et le printemps…
« Arriver chez les malades avec la tenue de pluie de vélo, le surpantalon, la cape et le casque, ce ne sont vraiment pas des conditions idéales », reconnaît-il. Sans compter qu’il doit penser à attacher sa bicyclette avec deux cadenas en bas des immeubles quand il ne peut pas le laisser dans la cour. Mais ça crée d’autres formes de lien avec les patients. « Les gens sont sympas. Quand ils me voient arriver tout trempé, ils compatissent et me remercient encore davantage de m’être déplacé », s’amuse le Dr Hanschuch. Qui peut aussi compter sur le soutien moral des internes qu’il accueille en tant que maître de stage. La plupart d’entre eux viennent à son cabinet à vélo.
Bon pour la planète, bon pour la santé
En périphérie parisienne, à Vanves, dans les Hauts-de-Seine, la Dr Louise Nutte, a depuis longtemps fait le choix de la petite reine pour ses déplacements professionnels. « Comme dans 60 % des cas, je viens déjà à vélo pour me rendre au travail, ça me semblait logique de l’utiliser pour les visites », déclare la médecin généraliste de 39 ans. Qui est particulièrement bien équipée, avec son vélo longtail (cargo) avec lequel elle emmène ses enfants à l’école. « L’autre jour, on s’est même rendu compte que je pouvais emmener l’interne avec moi en déplacement », s’amuse-t-elle. Mais, plus sérieusement, c’est l’argument écologique que retient la Dr Nutte. « En milieu urbain, c’est absurde de prendre la voiture pour faire deux ou trois kilomètres et même si c’est modeste, ça fait faire un peu d’activité physique. Bon pour la planète, bon pour la santé ! »
Place à la trottinette
Le deux-roues, le Dr Benjamin Saada, lui en a fait le tour. Après s’être fait voler deux vélos quand il était remplaçant, le généraliste de 38 ans a résolument opté, il y a six ans, pour… la trottinette. Par conscience écologique, certes, mais aussi pour l’aspect ludique de ce mode de déplacement. « Et puis, quand il fait beau, c’est une petite balade pendant laquelle on s’aère un petit peu la tête. » Et quand il pleut ? « J’ai un poncho de pluie intégral, des gants, des sous-gants, des collants en hiver sous mon jean quand il fait très froid, et voilà. »
Enfin, dernier avantage de la trottinette sur le vélo, on peut la replier et la monter avec soi chez les patients que l’on visite. Effet d’étonnement garanti la première fois auprès de la petite dizaine de personnes âgées que suit le Dr Saada à Bagneux, dans les Hauts-de-Seine. « Mais maintenant, ils sont habitués ». Le temps de la visite, l’engin a sa place attitrée dans la cuisine ou dans l’entrée.
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