Un médecin peut-il, au nom de la sécurité sanitaire, prêter son concours à des mutilations génitales ? Dans son dernier rapport, l'Institut national d'études démographiques (Ined) ouvre le débat en s'inquiétant de l'augmentation des excisions pratiquées en milieu médical dans certains pays. Si dans la majorité des cas, les mutilations continuent à être faites par des exciseuses "traditionnelles", de plus en plus de filles sont excisées par des professionnels de santé en milieu médical, sous prétexte de réduire les risques sanitaires de l'opération.
L'INED désigne notamment plusieurs pays comme l'Egypte, la Guinée, l'Indonésie, le Kenya, le Nigeria, le Soudan du sud et le Yemen. À l'initiative du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), les organisations internationales ont condamné ce "dévoiement des premières campagnes de sensibilisation, qui compromet l'éradication de l'excision", souligne l'Ined.
L'Institut rappelle par ailleurs que d'autres pays pratiquent des chirurgies de "réassignation" sur des nouveaux-nés intersexués, et qu'on observe aux Etats-Unis, en Amérique Latine, en Asie et en Europe, un développement très récent de pratiques de chirurgie esthétique génitale, telles que la nymphoplastie (ablation totale ou partielle des petites lèvres).
200 millions de femmes dans le monde
Dans ce document, l'INED montre aussi l'importance d'un phénomène qu'il est néanmoins difficile d'estimer précisément. Quelque 200 millions de femmes et de filles dans le monde ont subi des mutilations génitales et la moitié d'entre elles vivent en Egypte, Ethiopie et Indonésie, selon une estimation de l'Unicef publiée en 2016, rappellée par l'Ined. Outre les 30 pays où ces mutilations ont été pratiquées (27 pays africains, Yemen, Irak et Indonésie), s'ajoutent des filles et femmes originaires de pays à risque et vivant dans des pays d'immigration, pour lesquels on ne dispose pas encore d'estimation globale, ajoute l'Ined. Des études récentes évaluent par exemple à près de 500 000 le nombre de filles ou femmes mutilées ou exposées au risque aux Etats-Unis, et à plus de 500 000 le nombre de migrantes concernées en Europe.
Ce qui est sûr, c'est que, longtemps décrite comme un rite de passage à l'âge adulte, l'excision tend désormais à être pratiquée de plus en plus tôt : avant 10 ans pour la majorité des femmes dans la plupart des pays, et avant 5 ans pour les plus jeunes générations. Le rapport de l'INED évoque enfin les conséquences délétères sur la santé et la sexualité des femmes : troubles uro-génitaux, états posttraumatiques, états dépressifs et anxieux, complications obstétricales…
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