Courrier des lecteurs

Dame Sécu et Monsieur Privé...

Publié le 03/02/2017

Dame Sécu se base sur les preuves EBM pour rembourser, mais est-ce une valeur marchande sûre et exclusive pour monsieur Privé ? Un nombre de plus en plus important de Français se tournent vers ce qu’on appelle les pata-médecines. Ne vont-ils pas demander à Monsieur Privé ? Alors, elles risquent fort de devenir remboursables, selon les orientations personnelles des différents PDG des mutuelles, la priorité étant, commercialement parlant, non pas l’efficacité prouvée par la science, mais la croyance liée à la mode du moment ; ce que certains appellent la modernité… Et comme les mutuelles sont maintenant obligatoires…

Madame Sécu et les politiques s’esquiveront en disant que les médecins prescrivaient à titre placebo des médicaments chers et dangereux, les remplacer par de la pata-médecine ne changera rien à la balance des coûts pour le citoyen, mais améliorera grandement la iatrogénie. Mieux, un placebo pas cher ne faisait pas sérieux, un placebo remboursé aussi, voire plus, cher qu’un médicament dit noble, sera un signe majeur d’efficacité ; et puis zut, les citoyens auront le choix de leur mutuelle obligatoire, alors qu’ils n’ont pas le choix pour le régime obligatoire, on leur rend leur liberté et ils ne sont pas contents ! Et puis, donnera-t-on une carte CPS aux pata-médecins sans doctorat pour qu’ils puissent aller consulter le DMP ? Car en cas de prescription de jus de pamplemousse, la responsabilité de la mutuelle serait engagée en cas d’accident si le prescripteur ne peut se renseigner. La meilleure médecine du monde, ou plutôt, la santé des patients français va enfin aller vers des sommets… Le prix des mutuelles va sans doute flamber, mais la CSG pourra diminuer, enfin, on n’ose pas l’annoncer, et les politiques auront enfin vaincu le trou de Dame Sécu. La physique des vases communicants leur semble inconnue.

Et quand j’entends dans les programmes, d’un côté que l’une propose de faire rembourser par exemple l’amoxicilline à l’unité, et de l’autre que les riches pourraient ne pas se faire rembourser le Doliprane®, tout cela pour combler le célèbre trou de la Sécu, on se rend compte que de tous côtés, les politiques sont totalement déconnectés de la réalité, ne sachant ni le prix du ticket de métro, ni le prix des médicaments, incapables de proposer autre chose que des économies de bout de chandelle, certes indispensable à la ménagère, mais sans aucune mesure avec ce qu’il faudrait faire pour se mêler d’économie de la santé. Tout cela pourrait prêter à rire, mais plutôt à vomir, tant cela concerne l’avenir de notre système de protection sanitaire.

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Dr Yves Adenis-Lamarre (Bordeaux)

Source : lequotidiendumedecin.fr