Le Généraliste : Vous avez lancé votre projet officiellement la semaine dernière après l'avoir présenté en juin. Comment se sont déroulés ces derniers mois ?
André Accary Cet été, j’ai rencontré les professionnels de santé et les politiques pour connaître leur perception de ce projet en trois phases. Durant la première, nous avons travaillé sur le modèle pour être le plus attractif possible. On s’est réuni autour de la table avec l’ARS, l’Ordre… pour élaborer la répartition des centres sur tout le département. Puis, pour la phase 2, nous avons lancé un appel à projet dans toutes les communes pour les locaux car nous ne nous occupons que du recrutement et de l’administratif. Il y aura une douzaine d’antennes rattachées à quatre pôles qui doivent assurer en même temps la permanence des soins. L’idée est d’avoir deux ou trois praticiens par antenne. Nous entrons donc dans la phase 3, celle du recrutement de trente médecins généralistes. Plus d'une dizaine nous ont déjà contacté pour nous montrer leur intérêt.
La problématique des déserts médicaux n’est pourtant pas la compétence première du Département ?
A. A. Si je ne le fais pas, c’est non-assistance à personne en danger. Dans les zones qui n’ont plus de médecin, il y a une augmentation incroyable du nombre d’interventions des pompiers, là où les médecins ne peuvent plus intervenir. La désertification touche aussi toute une économie locale. À Saint-Christophe-en-Brionnais, il y avait trois médecins et une pharmacie il y a quelques années. Aujourd’hui, il n’y a plus de médecins et le chiffre d’affaires de la pharmacie s’est écroulé. Et comment attirer de nouveaux habitants dans un secteur où il n’y a plus la possibilité de répondre à la première urgence, celle du généraliste ? Si je tiens compte de l’efficacité des mesures existantes, de l’âge des médecins et de la population, je m'attends dans quatre ans à une situation catastrophique.
Quel accueil les médecins libéraux vous ont-ils réservé ?
A. A. L’accueil a plutôt été très chaleureux. Il y a eu deux types de réactions. Celle de ceux qui sont aujourd’hui sur le terrain et qui vivent eux-mêmes la pression de la désertification. Ceux-ci m’ont dit « Vas-y parce que ça peut nous soulager dans notre activité ». Depuis le début, j’explique que je ne viens pas en concurrence mais en complément, en attendant les réactions du gouvernement pour écouter la profession libérale qui n’est pas assez entendue à mon avis, et aussi en attendant une réforme de la formation. Si ce n’est pas fait et que mon système marche, les autres départements vont faire la même chose et on va rentrer à nouveau dans un système concurrentiel. J’ai aussi reçu des réactions plus vives. Mais lorsqu’il y aura des projets d’installation de médecins libéraux là où j'ai une antenne du centre, je l’enlève et je la mets ailleurs. C’est l’avantage d’avoir ce type de structure suffisamment souple.
Comment va être financé le Centre de santé ?
A. A. J’ai prévu pour commencer une enveloppe de 2 millions d’euros par an. En sachant que mon système ne va pas s’équilibrer les premières années. Une partie du projet sera financée par des subventions de l’ARS. Les locaux sont, eux, fournis par les communes. Mon modèle économique, je pense l’équilibrer au bout de deux ou trois ans si cela fonctionne normalement et si le recrutement marche. C’est un investissement, mais, si je veux garder la population et accueillir la nouvelle, il me faut une offre médicale. Actuellement, la fibre optique est déployée dans tout le département. Si les gens ont la fibre mais n’ont plus de médecin, il y a quand même un problème... Suite à des rencontres avec la faculté de médecine de Besançon, je me suis également rendu compte de la nécessité de travailler aussi sur la télémédecine pour être plus attractif encore pour les jeunes médecins. Je ne promets pas de le faire partout tout de suite, mais c’est assez logique de développer mes antennes avec la télémédecine. Il faudra aussi être présent sur ce rendez-vous-là.
35 heures pour 4 000 à 6 000 € par mois
Outre le centre départemental de Mâcon, quatre pôles (Digoin, Montceau-les-Mines, Chalon-sur-Saône et la Communauté de communes du Grand Autunois Morvan) et une douzaine d'antennes vont d'abord être installés à partir de janvier 2018. Les médecins se verront proposer des CDD de 3 ans à 35 heures avec possibilité de CDI à terme, pour une rémunération variant entre 4 000 euros à 6 000 euros nets par mois selon l'expérience, sur le barème de la fonction publique hospitalière.
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