Dans un rapport de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable, deux ingénieurs généraux des ponts, des eaux et forêts, Hugues Ayphassorho et Alby Schmitt, recommandent au gouvernement d'agir « sans tarder », en vue d'interdire les PFAS, mais aussi d'améliorer les connaissances et la surveillance.
Les PFAS, ou substances poly- ou perfluoroalkylées, sont une catégorie de molécules de synthèse qui compte plusieurs milliers de représentants différents. Ils sont employés dans un grand nombre de domaines qui vont de l'utilisation comme émulsifiants pour la lutte contre les feux d’hydrocarbure au traitement de surface des métaux ou aux fluides hydrauliques.
Ils ne sont devenus un sujet de préoccupation pour la communauté scientifique et les pouvoirs publics que depuis une vingtaine d’années dans le monde et plus récemment en France.
Les « polluants éternels »
Premiers points à noter : les PFAS ont une stabilité chimique telle qu'ils sont qualifiés de « polluants éternels ». Ces derniers étant principalement absorbés via la consommation d’eau ou d’aliments, leur toxicité reste encore méconnue. Toutefois, des effets nocifs et toxiques sur le métabolisme humain ont été observés pour plusieurs PFAS et leur caractère cancérigène est suspecté.
Or, la France ne réglemente aucun PFAS dans le contrôle des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine. Quant à la réglementation des émissions industrielles, elle encadre encore trop peu les rejets de ces polluants, dont le suivi en banques de données est quasi inexistant.
Interdiction via le règlement Reach
Concernant le contrôle de la contamination des milieux aquatiques, seul le PFOS fait l’objet de fixation d’une norme de qualité environnementale européenne. Il n’existe pas de réglementation européenne ni française portant sur les PFAS dans les sols. La situation est identique en matière de qualité de l’air. Pour les membres de la mission, la détection et la quantification des PFAS se heurtent à des « difficultés analytiques majeures », sans compter qu'« il n'existe pas de solutions simples et fiables pour leur destruction et leur élimination ».
La principale solution « raisonnable » avancée est donc d'interdire l’usage, la production et l’importation de l’ensemble des PFAS, considérés comme une classe unique dans le cadre du règlement européen Reach. Dans le même temps, les auteurs proposent de travailler à l’adoption de normes européennes de qualité et de rejets (flux et concentration) dans l’eau et l’air et de normes de contamination des produits et déchets en PFAS.
Il est également recommandé de sortir les déchets réputés contaminés par les PFAS des filières de recyclage et de limiter l’acceptation de ces déchets aux seules installations adaptée (incinération à forte température > 900 °C, « sarcophages », centres d’enfouissement).
Une feuille de route nécessaire
Les rapporteurs estiment aussi que des actions doivent être lancées pour mieux apprécier l'exposition des populations : améliorer la base de connaissance en termes de surveillance et d'impact. En outre, la méconnaissance du grand public doit aussi être combattue avec la mise en place de messages d'information sur la problématique des PFAS dans l’environnement mais aussi leur présence dans les produits de tous les jours.
Pour cela, les auteurs estiment essentielle la mise en place au sein des réseaux scientifiques et techniques des ministères chargés de l’environnement et de la santé, d'une mission de veille technologique et scientifique sur la toxicologie des PFAS et promouvoir à l’échelle européenne ou internationale, ou à défaut nationale, un nouveau programme de recherche dédié à ces domaines.
Le domaine des PFAS « évolue vite, avec des études et des initiatives réglementaires qui foisonnent, insistent les auteurs. Il existe un vrai besoin de rationalité et d’efficacité dans l’approche de cette problématique en retrouvant les logiques qui ont gouverné d’autres approches de prévention des impacts de substances dangereuses, persistantes et bioaccumulatrices ». La mission recommande l’établissement d’une feuille de route formalisée listant les actions à mener pour une meilleure maîtrise des contaminations par les PFAS.