Propos sexistes et anti-euthanasie… les curieux cours de sciences humaines du vice-doyen de Lyon Sud

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Publié le 23/05/2019

À Lyon Sud, les enseignements du module Santé, société, humanités (SSH) de première année de médecine semblent sortir quelque peu de l’ordinaire.

Une enquête parue mercredi sur le site d’information Mediacités Lyon, révèle les nombreux dérapages du Pr Gilles Freyer, professeur coordinateur pédagogique du module SSH de première année à la Faculté de Lyon Sud et cancérologue des Hospices civils de Lyon.

Sous couvert d’enseignements de sciences humaines, l’enseignant, par ailleurs vice-doyen de la faculté, dispense sa vision très personnelle de la lutte contre le racisme, le sexisme ou l’homophobie, présentées comme des idéologies totalitaires.

Ces cours sont aussi l’occasion de défendre sa vision anti-euthanasie, de remettre en cause le scandale du Mediator « des milliers de morts qui n’existent pas », de battre en brèche la lutte contre les conflits d’intérêts qualifiée de « bien-pensance », ou encore de faire rire son auditoire à l’aide de moqueries féministes notamment, comme l'illustrent les nombreux enregistrements des cours repris par Mediacités.

Les écrits de François-Xavier Bellamy au programme de l'épreuve

La journaliste qui a mené cette enquête, Béatrice Kammerer, a été alertée par une étudiante de la faculté. « Elle m’a dit qu’elle avait l’impression d’avoir vécu un lavage de cerveau et qu’il fallait absolument que je vienne voir ce qu’il se passait dans les cours de SSH. » Ce module est pourtant loin d’être anecdotique puisqu’avec un coefficient 20, il représente un cinquième de la note final au concours. Et la vision particulière du Pr Freyer des sciences humaines pose question jusque dans l’évaluation puisqu’au concours 2019, l’ouvrage de François-Xavier Bellamy, tête de liste Les Républicains aux élections européennes, mis au programme par l'oncologue, figurait parmi les thèmes de l’épreuve.

Impossible de savoir si la Faculté soutient l’enseignant puisqu’elle a refusé les sollicitations de la journaliste, tout comme le principal intéressé. Contactée également par Le Généraliste, l'Université Lyon I indique étudier le dossier après les révélations de Mediacités et communiquera une fois cet examen terminé. Le Pr Freyer n'a pour l'heure pas répondu à nos sollicitations.

Inertie et omerta

« S'il peut se permettre de donner ces informations en amphi ou ce sujet de concours, cela dénote tout de même un certain pouvoir et une impunité, explique Béatrice Kammerer. Les enseignants et proches d’enseignants que j’ai pu rencontrer sont complètement terrorisés. Ils ont très peur des retours de bâton et pensent que ça pourrait leur coûter leur carrière. »

Du côté des étudiants, même si certains sont choqués les réactions pendant la première année sont rares. Il y a plusieurs explications à cela, selon la journaliste. « Déjà, ils sont en Paces et ce qui les intéresse surtout c’est d’avoir leur concours, ils sont concentrés là-dessus. Ils font aussi face à une personnalité extrêmement charismatique, qui parle très bien, captive et il  peut apparaître comme bienveillant et protecteur à l’égard des étudiants », explique-t-elle. L’histoire de la faculté est aussi un élément d’analyse. « Il y a un esprit Lyon-Sud. C’est une petite faculté qui historiquement a été assez pointée du doigt à Lyon, il y a donc une solidarité ». Autres facteurs : la difficulté pour des étudiants isolés de s’opposer aux propos tenus en amphi ou la relative inexpérience des premières années de médecine en sciences humaines : « Ils n’ont pas de moyen de comparaison car ne savent pas forcément à quoi ressemble un enseignement en sciences humaines », souligne Béatrice Kammerer.

La réforme de la Paces doit justement faire plus de place aux sciences humaines à la fois dans le profil des étudiants mais aussi dans les enseignements. Reste à savoir si à Lyon Sud l’année prochaine, le Pr Gilles Freyer sera toujours en charge de leur coordination.

L'association nationale des étudiants de médecine (ANEMF), dans un communiqué, a appelé l'université Lyon I et la ministre de l'enseignement supérieure a saisir les autorités compétentes pour faire la lumière sur ces allégations et exige la démission du Pr Freyer si les accusations étaient avérées. La ministre Frédérique Vidal a indiqué avoir saisi l'inspection générale du Ministère. 

Mis à jour le 24 mai à 18h00


Source : lequotidiendumedecin.fr