D’après le dernier bulletin du Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), le taux de médecins remplaçants, toutes spécialités confondues, a augmenté de 64,4 % entre 2010 et 2023. L’exercice “intermittent” serait ainsi devenu « indispensable au bon fonctionnement du système de santé », confie le Dr Jean Canarelli, président de la commission Jeunes médecins au Cnom. En jeu ? La continuité des soins en cas d’indisponibilité d’un praticien régulier en ville – prise de congé, formation, etc. –, mais également la pérennisation d’une installation en libéral. Et pour ce faire, l’activité peut démarrer dès l’internat.
Internes ou docteurs juniors
En effet, les internes et jeunes médecins, thésés ou non, sont habilités à effectuer des remplacements (art. L.4131-2 du code de la santé publique). Les premiers devront avoir passé les épreuves classantes nationales à la fin du 2e cycle ou être inscrits en 3e cycle et avoir obtenu un nombre de semestres déterminé en fonction de leur spécialité. Une fois l’affectation reçue, tout commence par l’enregistrement au Conseil national de l’Ordre des médecins pour obtenir son numéro RPPS (répertoire partagé des professionnels de santé). Une carte CPF (carte de personnel en formation) est alors attribuée, qui permet de faire une demande de licence de remplacement auprès du Conseil départemental de l’Ordre (Cdom). Celle-ci est accordée pour une durée d’un an – pour des remplacements de chacun trois mois maximum, renouvelable dans les mêmes conditions – et est à renouveler au 15 novembre de chaque année, jusqu’à̀ validation du DES et la soutenance de la thèse.
Dans le second cas, il s’agit d’une CPS (carte professionnelle de santé) et le docteur junior est enregistré au tableau de l’Ordre en nom propre. Le médecin remplacé devra avoir, de son côté, demandé une autorisation de remplacement et l’intermittent s’être enregistré auprès de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam).
Dans un souci de simplification des démarches, la Cnam a d’ailleurs mis en place une délégation de services EspacePro permettant d’accéder aux services EspacePro du médecin remplacé, sous sa propre identité. Plus besoin donc pour le médecin régulier de confier sa CPS, ce qui par ailleurs est « considéré comme une usurpation d’identité et une fraude aux assurances sociales », souligne Mathilde Chouquet, médecin généraliste à Rennes (Bretagne) et vice-présidente de Reagjir (Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants).
Contrats et formalités
Une fois ces autorisations obtenues, et votre lieu de remplacement trouvé, il est impératif d’établir un contrat afin de définir les modalités de l’exercice intermittent. Rédigé en trois exemplaires (un pour vous, un pour le médecin remplacé et un pour le Cdom), celui-ci devra préciser les dates du remplacement et la rétrocession d’honoraires, entre 70 et 80 % du chiffre d’affaires.
Passé ces étapes, la souscription d’une assurance responsabilité civile professionnelle (RCP) est obligatoire. Qui devra couvrir de façon exhaustive les actes relatifs à votre spécialité (loi Kouchner du 4 mars 2002) et pourra être complétée par une protection juridique. Dans les huit premiers jours de début du premier remplacement libéral, il convient de s’affilier à l’Urssaf et à la Carmf (Caisse autonome de retraite des médecins de France) dans le mois qui suit le début de votre activité libérale. Dans le cas où le chiffre d’affaires n’excède pas 19 000 €, il est possible d’adhérer au régime simplifié des professions de santé (RSPM), le taux de cotisations étant alors de 13,50 %. Au-delà, vous passerez sur le régime de droit commun – praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés ou PAMC – avec un taux de 21,20 %. Enfin, il est essentiel d’ouvrir un compte bancaire professionnel, dès lors que votre chiffre d’affaires a dépassé pendant deux années civiles consécutives un montant annuel de 10 000 €. Celui-ci devra faire apparaître la mention « entrepreneur individuel » ou « EI » (décret n° 2022-725 du 28 avril 2022) et permettra de protéger vos biens personnels en cas de souci.
Le remplacement se présente comme un passage obligé vers l'installation. L'étude Remplact de Reagjir montre ainsi que 60 % des remplaçants ont un souhait d'installation, dont un tiers dans les deux ans à venir.
Encadré :
Quid des remplacements fixes ?
Si la loi ne permet pas des remplacements excédant trois mois, quatre cas sont pris en compte pour mettre en place des remplacements réguliers : absences programmées pour une formation continue (DIU par exemple) ; arrêt maladie avec incapacité partielle du médecin remplacé ; augmentation notable du nombre de patients ; absences régulières autres : exercice en médecine clinique, absences administratives, etc.
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