Faire évoluer et simplifier la formation des futurs soignants : c’est le cap que se fixent les sénateurs. Réunis lundi 20 octobre, ils ont adopté, dans la soirée, une proposition de loi défendue par la sénatrice LR Corinne Imbert, qui ambitionne de créer « un modèle unique de première année » et qui repense les études de santé dans son ensemble.
Ce texte, qui doit encore être examiné par l’Assemblée nationale, entend corriger les écueils de la réforme de l’accès aux études de santé, qui a introduit deux voies d’accès aux études de médecine – la PASS et la L.AS – et dont la complexité est régulièrement mise en cause. « Les études de santé représentent un enjeu sanitaire, universitaire et territorial majeur. Or, leur organisation actuelle ne répond plus pleinement aux besoins du pays. La réforme de 2019, censée diversifier les profils et améliorer la réussite, n’a pas tenu ses promesses », a d’emblée cadré la sénatrice LR Corinne Imbert devant le Sénat.
Un consensus sur la voie d’accès unique ?
Pour simplifier le système actuel, la proposition de loi déposée le 30 juillet 2025 prévoit dans son article 1er la suppression du système PASS/L.AS au profit d’une licence d’accès unique aux études de santé « donnant accès, d’un côté, aux filières en santé, de l’autre, à une deuxième année de licence » afin de conserver la « marche en avant ».
Coïncidence ou non, le gouvernement a choisi le même jour pour annoncer le lancement d’une vaste concertation nationale, réunissant tous les acteurs du secteur afin de simplifier et d’harmoniser l’accès aux études de santé. À l’instar des sénateurs, le ministère préconise un modèle unique de première année, dont l’entrée en vigueur est prévue au plus tard à la rentrée 2027. « Nous partageons le même objectif quant à sa date d’application », s’est réjouie la sénatrice Corinne Imbert devant ses homologues, en présence de Stéphanie Rist.
La nouvelle ministre de la Santé a, en réponse, salué la proposition de loi portée par la sénatrice LR, qualifiant l’initiative de « bienvenue », tout en rappelant les effets positifs de la réforme de 2019, dont elle avait été la rapporteuse. « En fonction du calendrier parlementaire, je souhaite vous assurer que le gouvernement sera heureux de poursuivre les échanges avec vous pour aboutir au modèle de formation qui répondra au mieux aux enjeux de l’accès aux soins », a-t-elle ajouté.
Une licence de santé dans chaque département : avec quel argent ?
Le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, a, lui aussi, affiché son soutien au texte et plus particulièrement à la création d’une première année de licence commune dans chaque département (article 1er). « La nécessité de disposer d'un accès aux études dans chaque département est aussi portée par le gouvernement dans le cadre du pacte de lutte contre les déserts médicaux (…) », a-t-il déclaré. Selon lui, 25 départements restent aujourd’hui dépourvus d’une première année.
Mais cette mesure est loin de faire consensus. À moyens constants, la rapporteuse et médecin, Véronique Guillotin, estime que « la pertinence et la faisabilité de [cette mesure] à l’échelle de chaque département posent question ». Même inquiétude côté étudiants. « Nous ne sommes pas favorables à l’implantation d’une première année ou d’un premier cycle complet dans chaque département, car cette mesure n’est pas financée. Les sites antennes sont déjà moins bien lotis que les sites principaux (…). Les tutorats peinent à se déplacer, et l’absence de services de santé étudiants ou de Crous fragilise la vie étudiante et la réussite », met en garde Marion Da Ros Poli, présidente de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).
La territorialisation de l’internat en ligne de mire
Autre point de friction : l’article 4 de la proposition de loi qui vise à instaurer, à compter de la rentrée 2027, « un objectif national de deux tiers d’étudiants accédant au troisième cycle dans la région dans laquelle ils ont validé leur deuxième cycle ». Objectif affiché : améliorer l’accès aux soins via une meilleure répartition des étudiants en santé en amont de leur installation. « On sait très bien que le territoire de formation conditionne largement le territoire d’exercice », a étayé Corinne Imbert.
Mais sur ce point, la ministre de la Santé, également rhumatologue, a adopté un ton plus prudent. « Bien sûr, le gouvernement ne peut que souscrire à cette approche. Pour autant, il faut rester vigilant : ce dispositif risque de complexifier un circuit déjà complexe et d’imposer des choix trop coercitifs aux étudiants », a-t-elle averti, tout en rappelant que la majorité des étudiants optent déjà naturellement pour cette orientation.
Malgré cette mise en garde et l’opposition farouche des étudiants, qui y voient une « coercition déguisée », l’article a été adopté dans son intégralité. Direction l’Assemblée nationale, au grand dam des carabins qui ne seront pas parvenus, comme ils l’espéraient, à faire tomber par voie d’amendement cette mesure décriée.
Concertation nationale et réforme pour 2027 « au plus tard »
Le gouvernement a annoncé lundi le lancement d'une « concertation nationale » pour « simplifier et harmoniser l'accès aux études de santé » et réformer un système souvent jugé peu lisible, partageant les objectifs d'une proposition de loi adoptée dans la soirée au Sénat. Par voie de presse puis devant les sénateurs, la ministre de la Santé Stéphanie Rist et le ministre de l'Enseignement supérieur Philippe Baptiste ont dévoilé leur ambition : mettre en place un nouveau système « au plus tard à la rentrée 2027 ».
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