Yoni, 20 ans, et Iman, du même âge, n’avaient qu’un seul rêve : celui de devenir un jour médecin. Déterminés à décrocher médecine à la suite d’un échec l’an dernier en PASS (Parcours d’accès spécifique en santé – l’équivalent de l’ancienne Paces), les deux meilleurs amis, inscrits à la faculté de médecine de Marseille, ont souhaité, cette année, retenter une deuxième fois leur chance en L.AS (Licence d’accès santé), avec mention infirmier. Un tout nouveau cursus – unique en France – inauguré cette année.
Mais le rêve de ces deux étudiants s’est envolé le 29 mai. « À la découverte de mes résultats de premier semestre de licence en sciences infirmières [qui compte pour 60 % de la note du classement], je me suis aperçu que j’avais perdu 4, 1 points sur ma moyenne générale, ce qui m’a fait passer de 16,2 à 12,1 de moyenne », indique Yoni. Même chose pour Iman, dont la moyenne a chuté de 5,2 points. « Je me suis retrouvée avec une moyenne tout juste passable de 10, 3 alors que j’étais initialement à 15,5 », déplore-t-elle.
935 heures de stages infirmier à effectuer
Cette particularité du système que beaucoup d’étudiants considèrent comme une injustice concernerait à Marseille 46 étudiants de la promotion de L.AS en sciences infirmières. « On n’imaginait pas de tels écarts entre nos notes initiales et nos notes après harmonisation, s’indigne Iman. Une de nos camarades a même perdu 6 points sur sa moyenne, ce qui l’empêche de valider son année. C’est du jamais vu ! D’autant plus que les autres L.AS de la faculté ont vu leurs notes baisser de seulement 1,5 à 2 points. »
En outre, Yoni et Iman dénoncent une surcharge de travail rendant les conditions de réussite particulièrement inégalitaires. « Tout au long de l’année, les L.AS mention infirmier ont eu des cours avec présence obligatoire, un service sanitaire à réaliser et pas moins de 935 heures de stages infirmier (environ 24 heures/semaines) à effectuer à l’hôpital ! »
« Très souvent, nous avions deux gardes de 12 heures par semaine. Ce temps-là, les autres l’ont consacré aux révisions, souligne Iman. Pour rattraper notre retard, nous étions obligés de bosser après nos gardes jusque très tard le soir », confient les deux étudiants physiquement « épuisés ».
L’exigence de ce cursus – alliant théorie et pratique – devait pourtant être prise en compte dans la notation. « On nous a répété toute l’année qu’au vu de la difficulté du parcours, l’harmonisation des notes n’était pas forcément envisagée ou alors qu’elle serait très légère. Au moment des résultats, la faculté a fait volte-face et s’est totalement dédouanée quand on a fait remonter le problème », relatent Yoni et Iman qui se disent injustement « pénalisés ».
Équité entre les formations
Malgré de très bonnes notes (autour de 15/20) dans l’enseignement « mineure santé » – qui compte pour 40 % de la note finale pour le classement – , les deux étudiants n’ont que très peu d’espoir de décrocher médecine. Ils devraient obtenir pharmacie ou kinésithérapie. Rétrogradés entre la 250e et la 350e place du classement, Yoni et Iman passeront tout de même les oraux fin juin. « Mais à moins d’avoir 20/20, nous n’aurons pas médecine », se désolent les deux étudiants, très lucides.
Les deux amis ont décidé d’engager une procédure judiciaire avec un référé en suspension. « On a travaillé de manière acharnée toute l’année, on veut des explications de la faculté ! » réclament-ils. Pour mettre toutes les chances de leurs côtés, Yoni, Iman et l’ensemble de leur promotion ont également contacté le rectorat d’Aix-Marseille et sollicité l’aide de la ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, venue inaugurer la nouvelle formation en février.
La faculté droite dans ses bottes
« Nous sollicitons votre intervention, auprès de la faculté sans délai au regard de l’urgence des échéances universitaires […] pour que soit rétablie l’équité entre les formations suivies, de sorte que cette filière ne soit pas déconsidérée au point de baisser si drastiquement les moyennes », lit-on dans une lettre datée du 31 mai.
Consciente du sujet, la faculté de sciences médicales et paramédicale d’Aix-Marseille ne considère pas pour autant qu’il s’agit d’un problème en soit, mais plutôt d’un ensemble de règles globales à respecter. « Ce système permet d'assurer l'équité entre les 57 mentions de LAS2/LAS3 qui rentrent dans ce processus d'harmonisation, soit une cohorte de 469 étudiants ayant candidaté à l'accès sélectif […], a précisé le doyen Georges Léonetti dans un courrier daté du 5 juin. Cette méthode d'harmonisation est par ailleurs utilisée par de nombreux établissements et écoles d'ingénieurs mettant en place des examens de type concours. »
Si aucune solution ne leur est proposée, Iman et Yoni envisagent l’étranger pour étudier médecine, comme près de 5 000 jeunes Français. « Ce dont on rêve depuis tout petit c’est de devenir médecin et rien d’autre ! » concluent-ils.
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