LE QUOTIDIEN - Percevez-vous les difficultés de formation au cours de l’internat et du post-internat ?
DR ANDRÉ GAY - Le fait que les internes aient doublé voire triplé dans certains services avec des armées d’externes rend le compagnonnage difficile. Le post-internat commence aussi à poser problème dans certaines spécialités. Le nombre de chefs de clinique - 3 700 - n’a pas augmenté depuis plusieurs années. La différence, c’est que les promotions d’internes, aux alentours de 2 500 au début des années 2000, sont maintenant de 7 000.
Sur ces 7 000 internes, combien auraient besoin d’accéder à un clinicat ?
C’est toute la question ! Avant la mise en place du numerus clausus en 1971, le clinicat était réservé à une certaine élite hospitalo-universitaire. Par la suite, le clinicat est devenu quelque chose de plus commun. Aujourd’hui, nous nous retrouvons dans la même situation que par le passé. Entre-temps, les postes d’assistants des hôpitaux périphériques ont disparu. Le nombre de post-internat a diminué. Le débat est maintenant de savoir si les gens ont besoin d’un post-internat ou d’un clinicat. Notre position à l’ISNCCA est que le clinicat n’est pas quelque chose à quoi tout le monde doit avoir accès (2). Par contre, le post-internat est important pour avoir un complément de formation dans les spécialités à geste technique.
L’IGAS et l’IGAENR préconisent de supprimer le clinicat et d’instaurer un internat senior à la fin du 3e cycle. Qu’en pensez-vous ?
La présentation de leur travail devant la Commission nationale de l’internat et du post-internat (CNIPI), le 2 juin, n’a fait l’objet d’aucune concertation. Leurs conclusions sont aberrantes. Il n’est pas question de supprimer le clinicat. C’est simplement une piste qui a été présentée par l’IGAS. Ce n’est pas la position adoptée par les ministères. Au contraire ! On crée des postes de chefs de clinique en médecine générale. La séniorisation est certes une piste intéressante mais elle ne doit pas être envisagée pour remplacer les modalités actuelles de clinicat ou de modèles composites (assistanat des hôpitaux, praticiens hospitaliers contractuels ou toute autre modalité d’accomplissement d’un post-internat dans les centres anticancéreux, PSPH…). Ne supprimons pas ce qui marche ! Le clinicat est un maillon indispensable du système hospitalier et universitaire.
Qu’est-ce qui vous inquiète dans le travail des inspections ?
L’IGAS oublie les missions hospitalo-universitaires des chefs de clinique ! Outre le soin, ils assurent des missions de recherche et d’enseignement. Les 3 700 chefs de clinique représentent 30 % des enseignants des hôpitaux. On ne peut pas se passer d’eux. L’enseignement est un des cœurs de métier des chefs de clinique. Leur part d’enseignement est beaucoup plus importante qu’il y a cinq ans. La recherche est aussi très importante. Parmi les nouvelles missions de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), il y a l’évaluation de la production scientifique des facultés de médecine. La production des chefs de clinique n’est pas assez importante à l’heure actuelle mais les doyens commencent à exiger davantage des chefs de clinique. Certaines validations de DESC impliquent de publier un article. Si l’on supprime les chefs de clinique, ce sera la bérézina pour l’avenir hospitalo-universitaire.
Pour autant, avec l’augmentation du nombre d’internes, le clinicat va devenir inégalitaire.
C’était déjà le cas à notre époque. Nous avons vu des internes bricoler avec une année de recherche supplémentaire pour atteindre un poste de chef de clinique. Certains ne l’ont jamais obtenu. Quand on regarde les plaques de médecins libéraux, peu sont d’anciens chefs de clinique. Pour autant, les Français ne sont pas mal soignés. Pas contre, Ils seraient moins bien soignés s’il n’y avait pas eu de chefs de clinique. Car ceux qui vissent leur plaque n’auraient pas eu une bonne formation sans l’enseignement des chefs de clinique.
(1) Inspection générale des affaires sociales et Inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche.
(2) Les spécialités qui nécessitent de suivre un post-internat sont celles qui relèvent d’un DESC de type 2. Pour la validation de leur DESC, une année de post-internat est obligatoire.
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