Courrier des lecteurs

Internat : une réforme consternante

Publié le 13/01/2020

Je suis consterné par la lecture (QdM du 5 décembre) de l'article « Nouveau Deuxième cycle et fin des ECNi ». On y apprend, qu'après réflexion de deux experts, « une procédure de matching (?) se dessine », et l'on retient que ce qui remplacera les ECNi… est à peu près, (pour moi, en tout cas), incompréhensible : « système algorithmique d'affectation à l'entrée du 3e cycle »(??); «années d'apprentissage recentrées sur les stages et les connaissances indispensables » (quelle nouveauté !), « complexité graduée rang A, rang B… » (?) ; « 80 % de réponses correctes sur les questions du rang A pour participer au matching »(???) etc..

Sans parler de : « les étudiants seront classés dans les groupes de spécialités à définir » Spécialités qu'ils ne choisiront donc pas…, mais, tranquillisons-nous, car « l'algorithme du matching devant leur proposer un poste (discipline et subdivision) » (sic !), tout ira bien ! Trêve d'ironie : comment des experts peuvent – ils « pondre » de telles élucubrations dans un langage incompréhensible du commun des mortels ?

Je fais partie d'une génération finissante, et ai commencé mes études de médecine au PCB en 1959. J'ai passé les concours à Paris de l'externat puis de l'internat, (écrit et oral). J'ai choisi mes stages d'externat puis d'internat, ma spécialité de pédiatrie, mon clinicat, et personne n'est venu m'empêcher de faire ce que je souhaitais !

Le système des études médicales conduisait à la formation de médecins alors reconnus partout dans le monde comme parmi les meilleurs. Le rayonnement médical de la France était une évidence !

Réformes en tous sens

Depuis, les réformes ont comporté, (à partir de 1968) : la suppression du concours de l'Externat, début des erreurs, que l'on a décrété pour tous, c’est-à-dire pour personne ; la suppression de l'oral de l'internat (pourtant extrêmement formateur !) ; la suppression du (des) concours d'Internat des villes de fac que l'on pouvait présenter selon son choix ; la suppression des internats régionaux ; la suppression de l'accession aux spécialités par la filière des CES qui fournissait pourtant d'excellents praticiens.

Ont suivi, la création et, maintenant, la suppression des ECNi qui ont fait la preuve de leur inadaptation dans tous les domaines : pas de choix par l'étudiant, sélection informatique ne tenant aucun compte de la personnalité du candidat (ce que l'oral permettait), région et spécialité imposées par le classement, avec pour résultat de jeunes collègues faisant sans enthousiasme leur internat là où ils ne souhaitaient pas aller, dans une spécialité qu'ils ne souhaitaient pas faire !!

J'ai connu, à titre anecdotique, un interne nommé loin de chez lui en psychiatrie, alors qu'il voulait être chirurgien, ce qu'il est parti faire avec succès en Belgique… Je ne fais que citer, dans cette lente et désastreuse évolution, la disparition de l'esprit carabin, la transformation des salles de garde en cafétérias, la quasi interdiction de fresques un peu osées mais admirables, des tonus et autres dîners de patrons que nous avons connus…

Pour finir, vive le rétablissement du concours de l'Externat ! Vivent les concours d'Internat de villes de Fac avec Oral !! Vivent les CES !! Vivent les salles de garde ! Et courage à nos jeunes collègues !                                                                        

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Dr Jean-Pierre Laboureau, Pédiatre, A.I.H.P (concours 1965)

Source : Le Quotidien du médecin