Les mesures de l'exécutif présentées pour résoudre la crise des urgences peinent décidément à convaincre. Dès le lendemain des annonces de la ministre de la Santé, les quelque 250 services en grève ont voté la poursuite du mouvement. Au même moment à l'Assemblée, Agnès Buzyn faisait face aux coups de boutoir de l'opposition.
Ce jour-là, sur les quinze traditionnelles questions au gouvernement, cinq étaient adressées à la locataire de Ségur. Principal angle d'attaque ? L'origine des 754 millions d'euros sur trois ans annoncés pour financer le pacte de refondation des urgences (services, établissements et acteurs de ville). L'exécutif est resté évasif sur ce point, accréditant la thèse d'un jeu de tuyauterie budgétaire et non pas de moyens supplémentaires.
La députée Josiane Corneloup (LR) tance un « plan en trompe l'œil » présenté « en catastrophe » et accuse la ministre de vouloir « déshabiller Pierre pour habiller Paul ». L'élue de Saône-et-Loire craint, comme beaucoup de ses collègues, que les crédits affichés ne soient qu'un « redéploiement de moyens budgétaires existants, prélevés sur d'autres services ».
150 millions pour 2020
À l'autre bout de l'hémicycle, on s'interroge. « Vous sortez de votre chapeau 750 millions d’euros étalés sur trois ans. D’où vient cet argent ? Nul ne le sait, à part vous », s'agace Alain Bruneel, député du Nord (PC). Une inquiétude partagée par la députée de la Sarthe Sylvie Tolmont (PS) qui appelle de ses vœux « une augmentation significative » de l’ONDAM [objectif national de dépenses d'assurance-maladie]. Caroline Fiat (La France Insoumise) presse la ministre d'être « à la hauteur de l'enjeu » lors des discussions relatives au budget de la Sécu.
« Vous avez raison, on ne restructure pas un système de santé sans financement », a tenté de rassurer Agnès Buzyn. Celle-ci a promis qu'elle ne toucherait pas à l'investissement de 1,6 milliard d'euros sur quatre ans (soit 400 millions par an) prévu dans le cadre de la loi de santé. « Pour les urgences, au-delà de cette somme, j’ai débloqué hier 750 millions d’euros dont 80 % vont être alloués à des ressources humaines et à des recrutements », assure l'hématologue. Sans préciser comment... Pour l'année 2020, les crédits supplémentaires devraient être limités à 150 millions d'euros.
Sujet politique
Spécialiste des questions de santé, le député de la Sarthe (ex-LR) Jean-Carles Grelier a sa petite idée. Le parlementaire pense qu'il s'agira d'un dégel partiel ou total des crédits hospitaliers mis en réserve dans le budget de la Sécu. Comme sa collègue, il réclame plutôt une hausse nette de l'ONDAM à hauteur de 4,5 %. Une hypothèse qui n'a aucune chance de se concrétiser – la trajectoire globale d'évolution des dépenses maladie étant fixée autour de 2,3 % à l'horizon du quinquennat...
Mais ce qui inquiète surtout Jean-Carles Grelier, c'est « l'approche » techno de la mission Mesnier/Carli. « On arrive à des solutions purement techniques qui font fi de la réalité du fonctionnement de l'hôpital dont la crise des urgences est un révélateur », analyse le député qui voudrait « refaire de la santé un sujet politique ».
Pour Valérie Rabault, chef de file socialiste à l'Assemblée, le plan Buzyn n'est « pas à la hauteur des attentes ». Il ignore à ses yeux les revendications fondamentales des grévistes. « La création de lits et le recrutement de personnels sont absents », se désole l'élue du Tarn-et-Garonne. Elle préconise le déblocage de 500 à 600 millions d'euros par an pour les urgences et se dit très attentive au prochain PLFSS qu'elle imagine « plein de chausse-trapes ».
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