Deux juges d'instruction ont ordonné en juillet le renvoi devant le tribunal pour « harcèlement moral » de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), de l'ex-directrice de l'hôpital Georges-Pompidou et de trois professeurs après le suicide en 2015 du cardiologue Jean-Louis Mégnien, a appris l'AFP mercredi de sources proches du dossier.
Ce suicide par défenestration avait déclenché une très vive émotion dans la communauté hospitalière et mis en lumière la souffrance au travail des médecins.
L'épouse du cardiologue avait déposé plainte auprès du parquet de Paris, qui avait ouvert une enquête préliminaire puis une information judiciaire le 19 février 2016.
Enquête discrète
Le 17 décembre 2015, Jean-Louis Mégnien, un professeur en cardiologie de 54 ans, s'était jeté par la fenêtre du 7e étage de l'hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP). Père de cinq enfants, il venait de reprendre le travail après neuf mois d'arrêt maladie. Plusieurs de ses collègues avaient rapporté qu'il était victime de harcèlement de la part de sa hiérarchie et qu'un avertissement sur la souffrance de ce médecin n'aurait pas été pris en compte.
Au cours des cinq ans d'une instruction menée dans la plus grande discrétion, l'AP-HP, l'ancienne directrice de l'hôpital, Anne Costa, et trois professeurs – alors responsables hiérarchiques du cardiologue – ont été mis en examen pour « harcèlement moral ».
Deux juges d'instruction ont ordonné le 30 juillet dernier leur renvoi devant le tribunal correctionnel, a-t-on appris de sources proches du dossier, confirmé de source judiciaire.
Luttes de clans
« Au-delà d'un drame humain, cette affaire est une triste illustration de l'instrumentalisation de la justice et une volonté acharnée et déraisonnable de vouloir tout pénaliser », a regretté Me Marie Burguburu, avocate d'un des professeurs. « C'est incompréhensible, les magistrats ont assimilé un chef de pôle d'un établissement hospitalier à un chef du personnel », a réagi Me Bernard Vatier, qui défend un autre médecin.
A l'occasion de leur enquête, les policiers de la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) ont mis au jour des accusations de luttes de clans au sein du prestigieux établissement hospitalier situé dans le XVe arrondissement de la capitale.
Une enquête interne menée par la direction du CHU francilien, puis une synthèse de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), saisie par la ministre de la Santé de l'époque Marisol Touraine, avaient relevé des « dysfonctionnements » et des « manquements » dans la gestion du conflit entre le Pr Mégnien et certains de ses collègues.
Plafonnement de l’intérim médical : le gouvernement doit revoir sa copie, maigre victoire pour les remplaçants
Au CHU Healthtech Connexion Day, guichets innovation et tiers lieux à l’honneur
Zones de conflit : ces hôpitaux français qui s’engagent
À l’hôpital public, le casse-tête du recrutement des médecins spécialistes