Vingt ans après la loi Kouchner, la crise sanitaire a certes révélé les faiblesses de notre démocratie en santé mais a aussi donné naissance à des projets exemplaires émanant d'associations d’usagers ou d'établissements. Neuf d’entre eux viennent d'être distingués par la Fondation des usagers du système de santé – créée en 2014 par la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) – qui soutient les « initiatives remarquables » en matière de démocratie sanitaire. Ces lauréats du palmarès 2022 bénéficieront d’une aide financière de près de 75 000 euros.
Libérer la parole chez l'enfant gravement malade
Parmi eux, le projet porté l’association La Brise (Rennes) qui accompagne les enfants atteints de maladie grave, évolutive et sans traitement possible. Autour de l’équipe ressource régionale de soins palliatifs pédiatriques, le but est de libérer la parole chez ces enfants, grâce à des supports ludiques. Certains ont tendance à « protéger leurs parents et les soignants autour d’eux, ils ne vont pas aborder les sujets difficiles, comme la fin de vie », explique au « Quotidien » Johanna Abolgassemi, directrice de l’équipe, qui réunit des pédiatres, psychologues ou assistantes sociales. L’association travaille avec des art-thérapeutes et des artistes pour élaborer une méthode d’intervention et introduire une séance d’expression artistique dans le parcours de soins.
Endométriose Academy à Bordeaux
L’art est également au centre de la démarche de l’Agence créative (Bordeaux). Spécialisée dans la conception d’expositions d'art contemporain et d’événements culturels, l’association est à l’origine du projet « Endométriose Academy », également primé. Son ambition est de renouveler le mode d’accompagnement des femmes atteintes d’endométriose, à travers un projet créatif associant art et soin, sciences et lettres. Le CHU de Bordeaux accueillera une résidence artistique au sein de son unité endométriose. « Nous allons recueillir la parole des femmes, leur relation à la maladie, leur parcours houleux, leurs réussites et leurs douleurs », détaille Nadia Russell Kissoon, la fondatrice de L'Agence Créative, qui souffre elle-même de la maladie. En collaboration avec l’artiste plasticienne Ema Eygreteau, elle retranscrira ces paroles pour créer des sculptures et des dessins. Ce travail fera l’objet d’une exposition itinérante dans les hôpitaux de Nouvelle-Aquitaine. « Il y a dans l’art une liberté qui permet d’appuyer là où cela fait mal, de révéler les défaillances, les pistes d’évolution », explique Nadia Russell Kissoon dont le projet propose de porter « un regard décalé sur la maladie » pour « en parler autrement et la rendre plus visible ».
Violences sur mineurs : des outils de repérage
La Société française de pédiatrie médico-légale (SFPML, Calvados) a été récompensée pour son projet d’enseignement à distance, à destination des acteurs de soins, visant à mieux repérer et signaler les violences faites aux enfants et aux adolescents. La formation en ligne sera accessible gratuitement sous la forme de quatre modules concrets de 20 minutes sur le site maformationmedicale.fr. Pour les médecins en particulier, il s’agit de « professionnaliser la clinique de la violence chez les enfants et les adolescents », expose la Dr Martine Balençon, qui supervise le contenu pédagogique. Pour la pédiatre et médecin légiste, outre le rôle essentiel des professionnels de santé dans le repérage et le dépistage de ces violences, il est aussi essentiel de les sensibiliser « à l’impact émotionnel que ces situations peuvent avoir sur leur pratique ». Cette formation permettra aussi de présenter les ressources qui existent dans les territoires (médecin référent protection de l’enfance, unités d’accueil pédiatriques enfant en danger, etc.) et de construire un parcours de soins gradués dont les médecins seront les maillons forts.
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