Après l’alerte des directeurs généraux des CHU en fin de semaine dernière, c’est au tour des présidents des conseils de surveillance de tirer sur la sonnette d’alarme dans un courrier adressé à Michel Barnier sur « la situation financière inquiétante » de ces établissements.
Cette inquiétude n’arrive pas par hasard : les établissements sont en train de boucler leur budget pour 2025. Or alertent les élus des grandes villes françaises, « la fragilisation financière de nos CHU est vertigineuse ». Le déficit cumulé des CHU est passé de 200 millions d’euros en 2021 à 400 millions en 2022, puis 800 millions en 2023. Il devrait atteindre environ 1,1 milliard d’euros en 2024, « en progression beaucoup plus rapide que les autres hôpitaux publics », écrivent Anne Hidalgo (Paris), Éric Piolle (Grenoble), Christophe Béchu (Angers), François Rebsamen (Dijon), Martine Aubry (Lille), Christian Estrosi (Nice), Arnaud Robinet (Reims) et les autres maires.
Quatre années après le début de la crise sanitaire, la situation des CHU « se présente sous un jour très paradoxal », indiquent-ils encore. « Par les efforts réalisés pour attirer de nouveaux professionnels et surtout à les fidéliser dans la durée, les capacités de soin sont en train de se redresser. Tous les CHU n’ont pas encore retrouvé entièrement leur activité d’avant Covid mais la tendance est clairement positive. Pour autant, les déficits des CHU n’ont jamais été aussi élevés et se creusent à un rythme sans précédent. »
Selon eux, les causes principales de cette détérioration financière sont l’insuffisance de financement des augmentations de rémunérations décidées lors du Ségur, l’inflation, l’augmentation des taux d’intérêt et la reprise d’activité trop progressive, « délétère pour les soins financés à l’activité », qui ne constituent pas le gros des recettes des établissements hospitalo-universitaires.
Emprunt en urgences pour plus d’un CHU sur deux
La première conséquence de cette fragilisation financière est l’impact sur les capacités de financement et l’état des dettes des CHU. Les directeurs généraux ont fait leur compte : « 18 sur 32 se retrouvent en insuffisance nette de financement et devront de nouveau emprunter en urgence pour parvenir à rembourser le capital de leurs dettes », écrivent-ils dans un communiqué commun le 21 novembre. Pour 16 CHU, la durée apparente de la dette atteint une moyenne de 14,9 années, dépassant le ratio réglementaire de durée apparente de la dette de moins de dix ans – un des trois critères exigibles par les ARS pour leur donner l’autorisation d’emprunter. Si les établissements ne sont plus en capacité d’investir pour maintenir la qualité et la sécurité des soins, « des projets d’investissement majeurs pour la rénovation de grandes infrastructures sont à risque d’être au mieux décalés de plusieurs années et au pire abandonnés », ajoutent les élus. Un sentiment d’incertitude partagé par les directeurs.
DG et élus appellent à un ajustement budgétaire significatif (dans le cadre du PLFSS en cours de discussion au Parlement) afin d’enrayer la spirale financière dans laquelle les CHU sont entraînés. Car il importe, concluent les élus, que « la capacité d’action de nos CHU soit préservée et que les investissements nécessaires à leur avenir ne puissent être remis en cause ».
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