Bataille de chiffres et dialogue de sourds. Deux semaines après l'application de la loi Rist (plafonnement des tarifs de l'intérim médical à 1 390 euros brut pour une garde de 24 heures), le cabinet de François Braun a sèchement démenti « l’existence d'une carte de 70 situations de fragilité » – services fermés partiellement ou en difficulté –, lors d’un point presse mardi. Celui-ci était interrogé sur l'état des lieux du Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH) qui évoquait, le 15 avril, la fermeture de plus de 50 services hospitaliers publics et privés, mais aussi 20 services supplémentaires « en difficulté ».
Selon l’entourage du ministre, ces chiffres alarmistes ont vocation à critiquer la mise en œuvre de cette réforme dont l’objectif est de « remettre un peu de morale et de rémunération éthique dans le système de santé ». En clair, « nous ne poursuivons pas les mêmes objectifs que le SNMRH », tacle le cabinet de François Braun pour qui « il est matériellement impossible d’établir une cartographie précise et durable » de l’impact de la loi Rist sur le fonctionnement des hôpitaux. Tout simplement parce que « la situation change au jour le jour, contrairement à ce que dit le SNMRH », poursuit l'entourage de François Braun qui entend « casser le mythe d’une carte des territoires en situation de fragilité ».
Difficultés préexistantes ?
Si le ministère de la Santé ne nie pas des tensions et dysfonctionnements « ponctuels » dans certains hôpitaux, il assure que les difficultés traversées « préexistaient au 3 avril (date d'entrée en vigueur de la loi Rist, NDLR) la plupart du temps ». Si des situations ont donné lieu à des « fragilités particulières », des solutions locales auraient été trouvées le plus souvent – qu’il s’agisse de la régulation de l’accès aux urgences ou de « la construction de solutions partagées sur les territoires », y compris avec le privé.
La situation des urgences du CHU de Grenoble, où des syndicats ont fait un signalement auprès du procureur de la République pour mise en danger de la santé d’autrui, a également été abordée. Si le ministère admet que la situation y est « très critique », il estime encore une fois que « les difficultés préexistaient ». La grève des personnels et le signalement n’ont « strictement rien à voir avec l’application du plafonnement de l’intérim », juge l’entourage du ministre. Une analyse que ne partage pas le Dr Cyrille Venet, anesthésiste-réanimateur à Voiron et secrétaire général du Syndicat national des médecins hospitaliers (SNMH- FO). Le médecin explique que « dix médecins ont décidé de ne plus accepter de missions » depuis la mise en application de la loi, ce qui place le service des urgences en grande difficulté.
Perspectives de carrière
Le point d'étape du ministère se veut donc rassurant, ce qui ne l'empêchera pas de rester vigilant. « On se tromperait de dire que tout est réglé sur le seul mois d’avril. Nous savons que les mois de mai et juin sont traditionnellement plus compliqués en raison des ponts et des congés », avance encore l’entourage du ministre qui veut « faire durer les solutions dans le temps ». La réserve sanitaire a été mobilisée mais « cela reste marginal », nuance le ministère.
À moyen terme, Ségur souhaite surtout « redonner des perspectives de carrière » aux praticiens hospitaliers « pour leur donner envie de se refixer dans les établissements ». Au-delà du volet rémunération, la réforme de l’intérim médical a vocation à « reconstituer les équipes dans les hôpitaux », assure l’entourage de François Braun.
Ces derniers jours, le calendrier des concertations avec les syndicats de PH a en effet gagné en précision. Objectif : « répondre aux enjeux d’attractivité et de fidélisation des praticiens » au sein des hôpitaux. Le cabinet du ministre veut notamment travailler sur la revalorisation des carrières et des sujétions (travail de nuit, pénibilité, permanence des soins) et les milieux de carrière (ancienneté des praticiens en poste nommés avant octobre 2020).
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