La crise sanitaire a conforté « de manière spectaculaire, incontestable, indiscutable et irremplaçable le rôle et la place du maire comme pilier de la République au service de la population », s'est réjoui il y a quelques jours François Baroin (LR), président sur le départ de la puissante association des Maires de France (AMF, qui s'apprête à réunir la 103e édition de son congrès à Paris). Le socialiste André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF, juge même que « les maires ont été conduits à suppléer un État hésitant et défaillant ».
Redéfinir les rôles
Dans ce contexte, l'AMF n'hésite plus à afficher ses ambitions sur la santé, au nom des quelque 35 000 maires renforcés par cette séquence de crise où ils ont été très souvent en première ligne (pour fournir des masques, des blouses, dépister, vacciner, planifier…). « Sur la santé, il y aura un avant et un après Covid », résume François Baroin. « L'échec de l'État le plus frappant sur les six premiers mois de crise, c'est la logistique ! La bataille a été perdue sur le dernier km. Qui a compensé ? Ce sont les maires qui ont été à la manœuvre sur la fabrication, la distribution, l'organisation… ! »
Fondamentalement, l'AMF milite pour une redéfinition totale des relations et des rôles entre l’État et les collectivités locales qui, selon François Baroin, ont fait la preuve de leur « agilité », de leur « réactivité » et de leur capacité d'innovation durant cette épidémie mais aussi dans la crise sociale et économique qui se prolonge.
Qui décide du bâti hospitalier ?
Tout cela passe par un « nouveau partage des responsabilités », plaide le maire de Troyes pour qui le statu quo n'est pas une option. Pour l’ancien ministre de l'Économie, l’État doit clairement « se remuscler et se concentrer » sur ses fonctions régaliennes et, dans le même temps, donner davantage de liberté et de responsabilités aux communes et aux intercommunalités. C'est le cas sur « des sujets aussi importants que celui de la santé, où l’État devra à l’avenir transférer le plus de compétences, de budget et d’effectifs » possibles. « La question du bâti hospitalier, celle du médico-social doivent être posées », illustre François Baroin.
Dès le débat d'ouverture, le Congrès des maires sera l’occasion de réfléchir à la place que pourraient prendre les communes dans les politiques de santé. Il s'agit notamment de mettre en valeur le regard des maires sur l'organisation du système de soins, sur l'impact financier de la crise dans les budgets locaux ou sur les relations entre l'État central et les collectivités locales dans les périodes d'urgence.
Conseil d'administration versus conseil de surveillance
Les élus locaux ambitionnent d'être associés durablement et étroitement à la gouvernance hospitalière, ce qui passe par la création effective d’un comité territorial des élus au sein de chaque GHT. Et à l'échelle de l'hôpital cette fois, le président sortant de l'AMF s’est dit favorable à ce que « le maire soit à la tête d’un conseil d’administration (et non plus du conseil de surveillance), pour qu’il puisse être un acteur de la définition du projet d’établissement ». Pour qu’il puisse dire par exemple que « ma priorité, c’est d’accompagner l’hôpital, de développer les urgences, d'investir dans les lits et le matériel » », illustre le président de l’AMF regrettant l'absence de « véhicule législatif et réglementaire pour pouvoir le faire ». « Le bricolage n'est plus de mise », prévient-il.
Sur la question du financement de l’hôpital, l'AMF observe que l'exécutif reste « un régulateur budgétaire ». Il n’est donc pas surprenant que son objectif soit « toujours » d’avoir « moins de lits ». Pas étonnant non plus que le ministère fixe un « ONDAM [objectif national de dépenses d'assurance-maladie] qui est en général à la baisse et toujours comprimé ». Et de rappeler le tollé suscité par le directeur de l'ARS Grand Est sur les suppressions de postes et de lits au CHRU de Nancy, un mois et demi après le début de la crise sanitaire. Pour le président de l’AMF, c’est la preuve que les fermetures de lits actuelles étaient « annoncées, que le problème culturel est profondément ancré ».
Nationaliser la dette Covid des collectivités
Quant au débat récurrent sur la liberté d'installation des praticiens libéraux et le bon dosage entre mesures incitatives et directives pour combattre la désertification médicale, l'AMF a choisi son camp. « La coercition, ce n'est sûrement pas un terme que l'on va rependre à notre signature », balaie François Baroin. Il reproche au passage à Ségur d'être un ministère « hospitalocentré » qui « sous-traite la médecine de ville à la CNAM. »
Dernier cheval de bataille : la nationalisation par l’État à 100 % de la dette Covid des collectivités locales. François Baroin affirme que la facture est « très lourde », entre cinq et six milliards d'euros à la charge des communes. Or, pendant ce temps-là, le « quoi qu’il en coûte » a « ouvert très largement les vannes », si bien que « l’État a pris 20 points de PIB de dette en l’espace de quelques mois »…
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