L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a subi un déficit plus important que prévu en 2024 en dépit d’une reprise de l’activité, a annoncé le CHU francilien mardi 8 janvier.
Le déficit prévisionnel 2024 est projeté à 460 millions d’euros « malgré une nette relance de l’activité », a indiqué l’établissement. Ce déficit représente 62 millions d’euros de dégradation par rapport à 2023 mais surtout 166 millions d’euros d’écart par rapport à la cible de déficit prévue dans le plan global de financement pluriannuel (PGFP) pour 2024, autour de 300 millions d’euros.
Rémunérations, inflation : compensation insuffisante
Ce manque à gagner est avant tout le résultat d’un alourdissement des charges structurelles, qui pèsent à hauteur de 121 millions d’euros. En cause : « L’insuffisante compensation des augmentations des rémunérations décidées dans le cadre du Ségur de la santé et de ses mesures complémentaires, ainsi que dans l’inflation des années 2022 et 2023 qui a renchéri tous les achats de biens et services », insiste l’AP-HP.
« Pour les CHU et l'AP-HP, on estime que c'est à peu près 20 % de sous-compensation » des mesures salariales, a déclaré le directeur général Nicolas Revel ce mardi, au micro de France Inter. Quant à l'inflation, elle a été compensée à « un tiers à peu près », a-t-il précisé.
Dans une moindre mesure, 20 millions d’euros de déficit résultent également d’une « divergence » entre les dépenses dédiées à la masse salariale et les moyens de remplacement (intérim, heures supplémentaires), plus onéreux, par rapport aux recettes issues de l’activité hospitalière, indique l’AP-HP.
Enfin, 23 millions d’euros proviennent d’un alourdissement des charges d’amortissement réelles par rapport aux prévisions, un « dépassement comptable » qui n’a pas de conséquence sur la capacité d’autofinancement du CHU, rassure ce dernier.
La « moitié du chemin » réalisé sur le recrutement paramédical
Pour 2025, le paquebot francilien de 38 hôpitaux anticipe « un effort de performance interne particulièrement important » pour redresser la barre. Le CHU se fixe comme objectif de réduire son déficit de 103 millions d’euros et d’atteindre un résultat négatif de 358 millions d’euros.
Pour y parvenir, l’AP-HP entend continuer sa politique de recrutement dynamique, lancée en 2022, qui a contribué au redémarrage de l’activité « de manière significative », même si cela n’a pas empêché le déficit de se creuser. Ce plan (« 30 leviers pour agir ensemble ») , concocté par Nicolas Revel dès sa prise de poste, a permis au CHU de reconstituer « plus de la moitié de ses effectifs infirmiers manquants » et de rouvrir « grâce à cela plus de 600 lits, soit l’équivalent d’un hôpital comme Saint-Antoine », se félicite l’AP-HP.
« On a fait un peu plus de la moitié du chemin » pour récupérer les quelque 2 000 infirmières (11 % de l'effectif) que le CHU avait perdues après la crise sanitaire, a souligné sur France Inter Nicolas Revel. « Nous avons – et c'est cela le plus important – réduit les départs », qui ont baissé « de 28 % » entre 2022 et 2024, a-t-il ajouté.
Gériatrie, psychiatrie, hématologie et neurologie dans le dur
L’AP-HP, qui se considère « au milieu du gué », fait toujours état de « fortes difficultés » dans les équipes paramédicales en gériatrie, psychiatrie, hématologie et neurologie. En 2025, le maintien de cette politique RH devra parvenir à une augmentation de 1 040 équivalents temps plein (hors médecins), dont 600 infirmiers et infirmiers spécialisés (en particulier des Ibode), 100 aides-soignants et 115 autres soignants exerçant des métiers en tension (manipulateurs en électroradiologie médicale, préparateurs en pharmacie, etc.).
Pour réduire le coût de l’intérim et des heures supplémentaires, quelque 250 soignants seront recrutés en sus pour renforcer les équipes de suppléance, ces pools souvent mobilisés pour remplacer les congés maternité et longue maladie.
Par ailleurs, 170 postes seront ouverts en « soutien » des activités de recherche et des centres de référence maladies rares et 55 en « soutien » administratif, numérique, technique et logistique.
330 lits en plus en MCO
Pour dynamiser l’activité, l’AP-HP annonce la réouverture cette année de 500 lits, dont 330 en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO). Le CHU mise sur l’amélioration de ses performances en codage, en facturation et en sobriété énergétique pour réduire ses dépenses. Le niveau d’investissement sera maintenu à 650 millions d’euros de crédits pour cette année (avec l’objectif de quatre milliards d’euros sur cinq ans). Parmi ces investissements, figure l'énorme projet de l'hôpital Grand Paris Nord à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis).
L’AP-HP espère élaborer d’ici à juin 2025 un nouveau plan global de financement pluriannuel (PGFP) pour la période 2025-2029 dans l’optique d’une trajectoire de retour à l’équilibre « réaliste ».
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