LE NOUVEL hôpital public de référence en Essonne, né du plus important partenariat public privé (PPP) conclu dans le champ hospitalier, peine à trouver sa vitesse de croisière. Sept salles opératoires sur les vingt prévues fonctionnent. Au total, quelque 300 lits seraient inoccupés en raison du sous-effectif infirmier. « La situation se dégrade de jour en jour, constate Catherine Fayet (SUD santé). Le personnel a beaucoup donné pour le déménagement, il est épuisé. La souffrance au travail est réelle ». Les arrêts maladie se multiplient, certains infirmiers démissionnent.
Financièrement, c’est l’étranglement. Le loyer versé à Héveil, filiale d’Eiffage, grimpe cette année à 46 millions d’euros. Il pourrait même s’établir à 51 millions d’euros l’an prochain. À ce rythme, les chances d’équilibrer les comptes s’amenuisent. Le déficit de l’établissement frôle déjà les 20 millions d’euros malgré les 30 millions d’aides versées par l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France.
Catherine Fayet dénonce un cercle vicieux : « On ne voit pas comment avoir des recettes sans activité, ni un personnel au complet ». La syndicaliste met cet imbroglio sur le dos du PPP. Les travaux facturés au prix fort par Héveil et menés au compte-gouttes, la lourdeur des procédures, les bugs informatiques à répétition, tout, dit-elle, concourt à plomber l’ambiance sur le terrain. Une seule issue à ses yeux : « Sortir du PPP ».
Au bord de la rupture.
Le collectif « sauvons notre hôpital public », qui regroupe des usagers et certains membres du personnel, s’est fendu d’une lettre aux candidats à l’élection législative sur la circonscription. Son président, le Dr Henri Lelièvre, décrit une situation au bord de la rupture, avec « des patients admis en urgence [qui] doivent attendre plusieurs jours pour être opérés faute de salle opératoire disponible ». Pour le chirurgien orthopédique, l’hôpital « est incapable de répondre à la demande de soins, alors même que le contribuable paie pour une infrastructure de premier ordre ». Il demande aux candidats à la députation de soutenir la commission d’enquête réclamée en février par plusieurs députés. « Le contrat pourra être dénoncé » si l’irrégularité de la procédure ayant conduit au choix du PPP est démontrée, expose-t-il. Le service d’orthopédie n’exclut pas une grève de la faim collective pour attirer l’attention des pouvoirs publics.
Vie à crédit.
La balle, à présent, se trouve dans le camp du gouvernement. Comment se positionnera Marisol Touraine ? Et Manuel Valls ? En début d’année, le député-maire d’Évry s’était prononcé en faveur d’une sortie du PPP. Le coût d’un tel scénario a été chiffré par l’Inspection des finances. François Hollande, en visite au Génopole d’Évry pendant sa campagne, n’a pas eu un mot pour le CHSF voisin, mais il a pris ses distances avec « l’outil » PPP, qui, selon ses termes, « favorise la vie à crédit et le surendettement ».
Le directeur qui assure l’intérim depuis le départ d’Alain Verret ne fréquente plus guère le CHSF depuis plusieurs semaines. Claude Combrisson, représentant des usagers au sein du collectif de défense de l’hôpital, évoque « un bateau ivre » à la dérive. Un nouveau directeur sera nommé à la tête du CHSF le 19 juin (la candidature du directeur du centre hospitalier d’Aulnay-sous-Bois pourrait être retenue). Sa feuille de route ? La résorption du déficit, au plus vite. Inquiet, le personnel redoute de s’enfoncer un peu plus dans le marasme, si l’établissement, sous la pression de l’ARS, taille à nouveau dans les effectifs.
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