Alors que les hospitaliers ont détrôné les héros de Marvel et de Disney dans le cœur des Français, au moment où le gouvernement est prêt à donner des preuves d'amour aux soignants avec le Ségur de la santé, est-il raisonnable d'attirer l'attention sur certaines bizarreries du système hospitalier français ? Certes, l'article rédigé par Robert Holcman dans la revue Le Débat*devait paraître en mars dernier. Crise du coronavirus oblige, le numéro est disponible dans les librairies seulement en juin. Et bien évidemment, les propos de l'auteur détonnent dans le flux de lieux communs classiquement déversés sur l'hôpital. Contre toute attente, les hôpitaux publics de l'Hexagone ne souffriraient pas d'un manque de soignants. "La France dispose du plus fort pourcentage de personnels hospitaliers en proportion de sa population active ; c'est particulièrement le cas des médecins hospitaliers, des infirmières et des sages-femmes hospitalières". En revanche, Robert Holcman, directeur d'hôpital public, dénonce le trop-plein d'agents techniques et d'ouvriers avec un chiffre percutant : 86 % du total des personnels ouvriers et techniques au niveau national travaillent à l'hôpital public. Traduction "il y a deux fois plus de maçons, de menuisiers, de peintres en bâtiment, de jardiniers, d'électriciens, etc., que de préparateurs en pharmacie, de masseurs-kinésithérapeutes, d'agents de stérilisation, de techniciens de laboratoires, de laborantins et de manipulateurs en électroradiologie médicale". Bigre, et pour enfoncer le clou si l'on ose dire, l'autre exception française serait le nombre trop important de petits et moyens établissements. Ce qui génère une très forte dispersion des moyens. La France compte plus d'établissements de santé (4,57 hôpitaux pour 100 000 habitants) que l'Allemagne (3,74 pour 100 00 habitants). Or, il n'y a pas de corrélation directe entre nombre de lits et d'hôpitaux. La crise Covid-19 a pourtant révélé le nombre beaucoup plus important de lits de réanimation disponibles en Allemagne que de ce côté-ci du Rhin. Certes, Robert Holcman minore l'importance du paramètre de lits hospitaliers. La crise récente a pourtant illustré in vivo le caractère crucial de ce facteur. Et dans le sillage de Guy Vallancien, l'auteur appelle donc à une réduction du nombre d'hôpitaux. "Trop d'hôpitaux tuent l'hôpital." A condition toutefois de respecter deux principes : prendre en compte les situations géographiques particulières et garantir une prise en charge adaptée des urgences. Qu'en vont penser les anciens gilets jaunes ?
Revue Le débat, numéro 209, mars-avril 2020, 192 pages, 21 euros.
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