Le ton est direct et incisif. Dans un mail adressé aux membres de la Commission médicale d’établissement (CME), le président de la CME de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) exprime sa vive incompréhension après la décision de Marisol Touraine de reporter la fermeture des urgences de l’Hôtel-Dieu. Le Pr Loïc Capron appelle la communauté médicale de l’AP-HP à refuser cet arbitrage qui « renie » les compétences légales et techniques de la CME, « à qui la loi impose de veiller à la qualité et la sécurité des soins ». La CME de l’AP-HP s’était prononcée en novembre pour la fermeture des urgences et l’ouverture d’une consultation sans rendez-vous 24 h/24 au sein de l’Hôtel-Dieu.
Un « décalage », pas un « report »
Le Pr Capron raconte le « bref tête à tête » qu’il a eu avec Marisol Touraine hier mercredi, en marge d’une inauguration à Necker : « Elle croit, dit-elle, toujours au formidable projet du futur Hôtel-Dieu mais trouve préférable non pas de le "reporter", mais de le "décaler" (la nuance dépasse mon entendement) de quelques mois, ce qui pourrait (comme par hasard) nous mener au mois de mai 2014 ; rien à voir avec le Dr Gérald Kierzek que son chef de service a malencontreusement écarté des responsabilités qu’il assurait dans l’organisation de l’ambulance du SMUR. Et voilà, tout s’éclaire ! les élections municipales du printemps prochain! », fustige le président de la CME.
Un conseiller de la ministre de la Santé aurait confié au Pr Capron « sa crainte d’une fronde nationale qui aurait explosé le 4 novembre si on avait fermé les urgences ». « Il faut pourtant croire que ce péril est saisonnier puisqu’il n’existera plus en mai » 2014, poursuit, incisif, le chef de file de la communauté médicale de l’AP-HP.
Projet médical transformé en enjeu électoral
François Hollande, présent à l’inauguration, est venu avec des conseillers. Lesquels n’ont pas davantage rassuré le Pr Capron – y compris le Pr Olivier Lyon-Caen, issu de l’AP-HP. « La raison municipale, curieusement transformée en raison d’État, bâillonne donc la CME de l’AP-HP », écrit le Pr Capron, qui appelle les médecins du premier CHU de France à refuser une décision ministérielle « qui transforme une pure question de politique médicale hospitalière en enjeu électoral du 4e arrondissement de Paris », et « qui laisse en place une structure bringuebalante dans un hôpital vidé de ses ressources au mépris de la santé des Parisiens ».
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