Pilotage plus fin des ARS, coopération accrue avec le secteur public

Face à la deuxième vague Covid, les cliniques dans la boucle

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Publié le 13/11/2020
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Loin des dysfonctionnements du printemps, la coordination entre les secteurs public et privé s'organise. Les cliniques saluent une gestion plus pertinente du ministère et des agences régionales de santé.

Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Pas de second faux départ. Après les cafouillages au début de la première vague, principalement dans le Grand Est, cliniques privées et hôpitaux publics semblent avoir trouvé la formule pour faire face ensemble à la reprise épidémique généralisée.

Au printemps, alors que la France subissait un afflux massif de patients dans les hôpitaux, le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) appelait en vain à une meilleure complémentarité. « Il faut arrêter de penser que seul le public peut sauver nos concitoyens de cette pandémie », exhortait dans nos colonnes Lamine Gharbi. Des cliniques s'étaient retrouvées à l'arrêt d'activité et sans patients alors que des hôpitaux saturés organisaient des transferts entre régions.  

Huit mois plus tard, le son de cloche est bien différent avec l'arrivée de la seconde vague. « La collaboration entre les hôpitaux publics et les établissements privés fonctionne de manière efficace au service des patients », juge le patron de la FHP. Dimanche dernier, dans l'émission Questions politiques sur franceinfo, Olivier Véran balayait l'idée d'un défaut de coopération. « Oui, le privé, évidemment, il travaille totalement avec nous », citant le cas de la clinique francilienne d'Antony où « les réas sont pleines de malades Covid. »  

Maintien des blocs

Première différence de taille, les consignes nationales laissent davantage de marge aux acteurs locaux pour continuer à opérer. Alors qu'en mars, le gouvernement avait décrété une déprogrammation totale et généralisée de l'activité non-urgente, la tendance est au maintien – lorsque c'est possible – de la prise en charge opératoire des patients non Covid, même si les syndicats de plateaux techniques affichent toujours leur vigilance. 

« Lors de la première vague, il y a eu un tel choc médiatique et autoritaire que plus personne ne se faisait opérer et on en a vu les dégâts ensuite », se souvient Daniel Caille, PDG du groupe de cliniques Vivalto Santé. « Aujourd'hui on s'est rendu compte de la nécessité de faire les deux », confie le responsable. Et dans cette mission, le secteur privé a trouvé sa place. Le dirigeant met en avant « la capacité d'adaptation » des cliniques pour « modifier les pratiques » et optimiser les moyens à disposition. Si bien que, même dans des régions comme l'Île-de-France où la déprogrammation de l'activité réglée atteint parfois 100 %, « les blocs tournent encore et on continue à opérer les pertes de chance », se félicite-t-il.

Apprentissage collectif

Ce changement de stratégie a été permis par une gestion plus pertinente des agences régionales de santé (ARS). « L'organisation avec les directions territoriales s'est mise en marche beaucoup plus vite », se réjouit Thierry Chiche, président d'ELSAN, deuxième opérateur de santé privé. Le responsable salue un pilotage « plus précis et plus local » qui a permis d'associer les cliniques de manière « naturelle ». Dans l'ensemble, les opérateurs privés se félicitent des leçons tirées. « Il y a eu un apprentissage collectif du pilotage de crise », constate Thierry Chiche qui note, de façon marginale, la « volonté de quelques centres hospitaliers de réquisitionner les personnels des cliniques ».

« Le primus inter pares de l'hôpital public a disparu », se réjouit Daniel Caille. Secteurs public et privé travaillent de façon plus fluide, à hauteur de leurs capacités. La deuxième vague s'abattant de manière généralisée, les coordinations interrégionales sont parfois compliquées. Mais localement, la coopération se met en place pour équilibrer les efforts.

La FHF constate du mieux

Le groupe Ramsay, leader de l'hospitalisation privée, met en avant la situation dans le Pays basque. Dans la région de Bayonne, les médecins de trois cliniques, en particulier aux urgences, en cardiologie, en cancérologie, en chirurgie et en obstétrique, s'organisent pour délester l'hôpital local afin de prévenir les pertes de chance. « Les praticiens libéraux s’adaptent pour intégrer les patients à leur activité quotidienne et apporter la réactivité nécessaire à leurs confrères hospitaliers », avance le groupe Ramsay.

La Fédération hospitalière de France (FHF) se félicite de cette bonne entente. « La coopération avec le privé se passe globalement bien dans toutes les régions, analyse son président Frédéric Valletoux. Et si un jour cela a été un vrai sujet, cela ne l'est plus aujourd'hui. » 

Martin Dumas Primbault

Source : Le Quotidien du médecin