Dans un entretien exclusif au « Quotidien », la ministre des Professions de santé Agnès Firmin Le Bodo s'emploie à rassurer les praticiens diplômés en dehors de l'Union européenne (Padhue). Tous les dossiers en souffrance du dispositif « stock » seront traités avant la date butoir du 30 avril, s'engage-t-elle. À ce jour, « 40 % des dossiers ont fait l’objet d’une autorisation d’exercice directe, 49 % doivent effectuer un parcours de consolidation des compétences et 11 % ont fait l'objet d’un rejet », annonce la ministre. Autre engagement : le lancement début mai – très attendu – des inscriptions aux épreuves de vérification des connaissances (EVC) 2023 avec l'ouverture de 2 734 postes.
LE QUOTIDIEN : Dans le cadre de la procédure de régularisation du « stock », le traitement des dossiers des Padhue a pris un retard considérable. Où en sont exactement les dossiers à traiter ?
AGNÈS FIRMIN LE BODO : Comme nous nous y étions engagés, et comme la loi nous y oblige, la partie stock – pour les praticiens qui exerçaient avant 2019 – sera réglée au 30 avril. Il reste quelques semaines pour que cela soit effectif. Cela sera le cas car les commissions régionales et nationales ont été programmées pour que les dossiers soient traités dans les délais impartis.
Au 28 mars, 2 589 dossiers ont déjà été vus en commission sur les 3 398 dossiers reçus depuis le 1er janvier 2022. 1 200 dossiers avaient été traités au 1er octobre. Ce sont donc près de 2 200 dossiers qui ont été et seront traités entre octobre et jusqu’au 30 avril, grâce à la mobilisation de la DGOS, du CNG et des Ordres qui se sont coordonnés pour planifier les commissions et examiner les dossiers. Les ARS ont été efficaces pour faire remonter les dossiers régionaux.
À ce jour, 40 % des dossiers ont fait l’objet d’une autorisation d’exercice directe, 49 % doivent effectuer un parcours de consolidation des compétences et 11 % ont fait l'objet d’un rejet. Je me suis rendue à la DGOS et au CNG aujourd’hui pour échanger avec les gestionnaires des demandes d’autorisation d’exercice des Padhue. Je les ai remerciés pour leur engagement et leur professionnalisme.
Sur les 2 589 dossiers déjà vus en commission, 11 % ont donc reçu un avis défavorable : quel sera leur sort ?
C’est un examen, il y a donc des succès et des échecs. Il ne s’agit pas d’une commission d’enregistrement, il n’y a donc pas de validation systématique des candidatures. Les médecins qui ont reçu un avis défavorable auront les possibilités suivantes : soit ils passent les EVC quand la nouvelle session sera ouverte, soit ils se tournent vers un autre choix professionnel, soit ils ne peuvent pas exercer la médecine dans notre pays.
Justement, la loi prévoit désormais une seule voie d’accès à l’exercice en France, qui passe par des EVC, dispositif dit « du flux ». Quand allez-vous relancer cette procédure d’autorisation d’exercice pour 2023 ? Combien de postes seront-ils ouverts ?
La procédure d'inscriptions aux EVC sera ouverte début mai et se terminera en fin d'année. Les examens auront lieu en septembre 2023. Au total, 2 734 postes seront ouverts, pour les Padhue déjà en exercice sur le territoire depuis 2019 et ceux souhaitant venir exercer dans notre pays.
Quelles garanties pouvez-vous apporter aux médecins qui doivent faire un parcours de consolidation de connaissances (PCC) durant deux ans ?
Cette mission a été confiée aux ARS, en lien avec les établissements de santé qui accueilleront ces praticiens pour qu’ils y effectuent ces parcours de consolidation. Nous serons vigilants pour que ceux-ci se déroulent dans les meilleures conditions, pour que ces procédures soient bien validées. Les stages proposés devront être qualifiants pour permettre la validation du parcours de compétences, condition nécessaire pour qu’on ne se retrouve pas avec des praticiens qui ont effectué des stages qui ne soient pas validants ! C’est un enjeu majeur.
Quels sont les objectifs de la nouvelle carte de séjour pour les soignants étrangers, dans le projet de loi immigration ?
Nous ne connaissons pas à ce jour le calendrier parlementaire du projet de loi immigration. Nous n’avons donc pas à ce jour de fenêtre de tir pour proposer cette carte de séjour, censée faciliter la venue, la reconnaissance des diplômes et l’installation de ces praticiens.
D’après les syndicats, quelque 2 000 Padhue exerçant en France depuis plusieurs années ont des difficultés pour renouveler leur carte de séjour car ils n’ont pas réussi les EVC. Quelles solutions leur proposez-vous ?
C’est une question qui ne dépend pas uniquement du ministère de la Santé. Nous travaillons en lien avec le ministère de l’Intérieur. Nous sommes à l’écoute des situations particulières, essayons d’accompagner ces médecins au cas par cas pour leur apporter des réponses. C’est justement pour ces raisons que nous avions réfléchi à une nouvelle carte de séjour pour les médecins étrangers.
Si des médecins se retrouvent dans ce genre de situation, c’est aussi parce qu’il n’y a pas assez de coordination entre le droit de séjour et l’autorisation d’exercice de la médecine. L’objectif de cette carte de séjour est d’améliorer cette coordination. L’ouverture prochaine des EVC va permettre à un certain nombre de Padhue présents sur le territoire depuis 2019 de se positionner.
Il n’y a pas donc pas de solutions prévues à court terme pour ces Padhue ?
Outre la perspective des prochaines EVC, nous réfléchissons à d’autres solutions, comme celle de la carte Talents envisagée dans le projet de loi immigration. Nous suivrons ce dossier de près dans les prochaines semaines.
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