Plus de la moitié des praticiens intérimaires (58 %) seraient prêts à revenir à l’hôpital sur un poste fixe et unique, selon une enquête intersyndicale coordonnée par le Dr Éric Le Bihan, vice-président du Snphare. Mais pas à n'importe quelle condition. Au total, 800 médecins remplaçants et intérimaires - majoritairement des urgentistes et des anesthésistes-réanimateurs, dont 82 % d’anciens médecins hospitaliers – ont répondu à un questionnaire. Objectif : mieux connaître leurs conditions d’exercices et leurs motivations, mais aussi déterminer les facteurs susceptibles de leur faire accepter un poste de PH.
À la question « pensez-vous prendre un jour un poste fixe de médecin hospitalier ? », 31,3 % ont répondu « peut-être ». Une éventualité également jugée probable par 12 % d’entre eux, voire très probable par 15 % des praticiens interrogés.
Mais ces « retours » sont soumis à un certain nombre de conditions. Une majorité (51 %) souhaite un décompte du temps de travail. Autres exigences : 58 % réclament la rémunération du temps de travail additionnel à partir de 40 heures hebdomadaires, 52 % sont attentifs au « dimensionnement adéquat de l'équipe » et 49 % à une « gouvernance plus démocratique ». Autre condition régulièrement citée (35,3 %) : la restitution des quatre ans d’ancienneté perdus aux praticiens nommés avant le 1er octobre 2020 qui est également une revendication syndicale récurrente.
Interrogés sur les raisons qui les ont poussés à choisir ce mode d’exercice (intérim ou remplacements), une grande majorité des répondants évoquent la maîtrise du temps de travail (77 %), la liberté d’emploi du temps (76 %) et de son volume mensuel, mais aussi de meilleurs revenus (68 %). D’autre part, certains praticiens, qui sont actuellement en poste, choisissent de faire de l’intérim plutôt que d’exercer à temps plein et/ou faire du temps de travail additionnel dans leur propre établissement.
L’enquête revient aussi sur le mode de recrutement des médecins remplaçants et des intérimaires. Moins de 15 % des médecins interrogés sont passés exclusivement par des entreprises d’intérim, 42 % exclusivement de gré à gré. Les auteurs de l’enquête en déduisent que le coût de l’intérim est « bien supérieur aux estimations basées sur l’activité de ces entreprises ». Le montant annoncé (2 à 3 milliards d’euros) pourrait ainsi être « multiplié par trois, soit 6 à 9 milliards par an », ce qui signifie qu’il ne s'agit « probablement pas de mercenariat - ou alors - en très faible proportion », conclut l’enquête.
Relever le plafond de l’intérim
Dans ce contexte, les syndicats estiment que l’application de l’article 33 de la loi Rist c'est-à-dire l'encadrement strict des tarifs de l'intérim médical à partir du 3 avril va entraîner « une nouvelle dégradation des soins ». Malgré des études d’impact jugées « alarmantes », « aucune solution viable et pérenne n’est envisagée » par le gouvernement, déplorent-ils.
Pour « passer sereinement le cap », les organisations proposent de relever le plafond de l’intérim (1 170 euros pour 24 heures) à un niveau jugé « acceptable » par les médecins intérimaires. Interrogés dans l’enquête, une majorité d’entre eux (59 %) sont en effet favorables à un plafond de 650 euros nets la journée ou la nuit (contre environ 480 euros net avec l’application de la loi). Ce montant était la rémunération la plus répandue il y a cinq ans, selon le Snphare.
Revaloriser en miroir les rémunérations des praticiens
Enfin, d’autres mesures d’attractivité sont exigées par les syndicats de PH pour accompagner la réforme de l’intérim : « revaloriser en miroir les rémunérations des praticiens restés sur des postes fixes », une revalorisation de la permanence des soins (garde à 600 euros, plafonnement de l’astreinte à 400 euros…), etc. Mais aussi le reclassement immédiat de tous les praticiens hospitaliers nommés avant 2020 dans la nouvelle grille avec restitution des quatre ans d’ancienneté.
Lors des journées de l'Association des directeurs d'hôpital (ADH), le 16 mars dernier, François Braun avait affirmé qu’il comptait réattribuer le 1,5 milliard d'euros de surcoûts aujourd'hui liés à l'intérim médical, à l'attractivité des carrières. Or, quelques jours plus tard, cette annonce n’a pas été confirmée lors d’une réunion entre les syndicats et le ministère. « Il semble que le milliard et demi d’euros se soit évaporé », déplore APH qui précise que les mesures d’attractivités sont « suspendues à des énièmes missions Igas et autres comités Théodule ».
Enquête réalisé en collaboration avec le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (Snphare), Samu urgences de France (SUDF), le Syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers (SNPeH), Action praticiens hôpital (APH), Jeunes médecins, le Syndicat national des jeunes anesthésistes-réanimateurs (SNJAR), l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), le Collectif Santé en danger (CSED) et le Syndicat national des médecins remplaçants des hôpitaux (SNMRH).
Embolie aux urgences psychiatriques : et maintenant, que fait-on ?
« Les Flying Doctors », solution de haut-vol pour l’accès aux soins en Bourgogne
Denis Thuriot (maire de Nevers) : « Je songe ouvrir une autre ligne aérienne pour les médecins libéraux »
À Niort, l’hôpital soigne aussi les maux de la planète