Grève des Ecos : pourquoi les hospitalo-universitaires boycottent les chaises d’examinateurs

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Publié le 27/05/2024
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Remonté contre la réforme de leur retraite, le Syndicat des hospitalo-universitaires (SHU) a lancé ce 27 mai un mouvement de grève de 48 heures. Objectif : mettre la pression sur les examens cliniques objectifs structurés (Ecos) pour se faire entendre. Entre 20 et 35 % des HU devraient suivre le mouvement, indique l’organisation.

Crédit photo : PHANIE

Les personnels hospitalo-universitaires ont démarré ce lundi 27 mai un mouvement de grève amené à se prolonger le 28 mai. Inquiets du manque d’attractivité de leur métier et, surtout, de la réforme de leur retraite en cours de finalisation, les 4 500 PU-PH et 2 000 MCU-PH n’ont pas choisi ces deux dates par hasard. L’intention du SHU, qui a lancé ce préavis le 7 mars, est de gêner au maximum le déroulé des examens cliniques objectifs structurés (Ecos), qui se tiennent mardi et mercredi, en pratiquant la politique de la chaise vide côté examinateurs. Selon son président, le Pr Guillaume Captier, 300 médecins ont participé à l’assemblée générale pré-grève. « Il y a eu une mobilisation étonnante parmi les collègues examinateurs », se félicite-t-il. Le PU-PH estime que 20 à 35 % du corps sera en grève. Qui tient à souligner n’avoir aucun grief contre les Ecos, mais que ce choix stratégique a été fait pour avoir de la visibilité auprès des ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur.

Reste que les HU ne décolèrent pas. Selon leur syndicat, « le système HU craque de toutes parts avec une vague inédite de départs volontaires ». Le nombre de HU serait en baisse de 2 % alors que le nombre d’étudiants en médecine a triplé en trente ans. Selon un récent sondage, près d’un HU sur deux était prêt à rentrer dans le mouvement. Le ras-le-bol est tellement fort qu’un nombre significatif d’entre eux seraient prêts à jeter l’éponge, selon une autre enquête publiée en décembre 2023.

Publication des décrets mi-juin

Les discussions menées ces six derniers mois sur la réforme de leur retraite ont mis le feu aux poudres. Le temps presse : les décrets sont en cours de relecture et devraient être publiés mi-juin.

La colère porte sur le mode de calculs proposé par la DGOS (ministère de la Santé). Actuellement, les HU sont affiliés au système de retraite de l’État (SRE) pour la partie universitaire de leur activité. Pour la partie hospitalière, ils abondent à titre facultatif et en respectant un plafond leurs plans d’épargne-retraite privés (de type Préfon ou Corem). Leurs émoluments sont aussi pris en compte au titre du régime additionnel de la fonction publique (RAFP), mais de façon très limitée. Le cumul des deux dispositifs génère des droits à la retraite jugés insuffisants par les HU. Ce que ne contestent pas leurs ministères de tutelle, qui estiment que leur taux de remplacement s'élève à 30 % du dernier salaire.

L’affiliation en question

La réforme propose donc de modifier ces règles à partir du 1er septembre 2024. L'État veut affilier les HU à l’Ircantec et augmenter le taux de remplacement de 30 % à 44,5 %. Alors que la tutelle juge que les HU en sortiront gagnants, ces derniers voient d’un très mauvais œil la solution proposée. Ils estiment que l’affiliation à l’Ircantec va au contraire s’accompagner d’une perte de près de 5% de leur rémunération, qui a déjà baissé « de près de 20% en euros constants depuis 30 ans », argumentent-ils. Eux préféreraient que le corps soit intégralement rattaché au système de retraite de l’État (SRE) des fonctionnaires.

Selon le Pr Guillaume Captier, le taux affiché (44,5 %) est jugé « faux et insincère ». Le président du SHU reproche à la DGOS d’avoir élaboré ses calculs sur un profil type de PU-PH aux antipodes de la réalité du terrain, sans compter que la base de calcul de la tutelle est établie sur les derniers échelons de la carrière, qui ne sont que « très rarement atteints », insiste le SHU, qui réclame l’ouverture d’une nouvelle salve de négociations. Le bras de fer continue.

Peu de perturbations à prévoir dans les facs

L’anticipation des tutelles semble avoir porté ses fruits. La grève ne devrait pas (trop) perturber le déroulé des examens cliniques objectifs structurés (Ecos). « Nous n’avons pas de garanties à 100 % que ce mouvement n’aura pas d’impact sur les Ecos, mais des mesures ont bien été prises pour que les étudiants ne soient pas pénalisés, rassure Jérémy Darenne, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). Il n’y a pas de raison de s’inquiéter. » Le représentant étudiant craint davantage les couacs inhérents à l'organisation de cette nouvelle modalité d'examen. Ce qui est compréhensible après le baptême du feu très compliqué pour la phase test des premiers Ecos, organisé mi-mars. À la tête de la Conférence nationale des doyens de médecine, le Pr Benoît Veber confirme au Quotidien qu’un « déroulement normal » des Ecos est prévu. « Les présidents d’université sont chargés des réquisitions mais dans la plupart des UFR, on ne compte guère plus de cinq grévistes », détaille-t-il. Confiant, le Pr Véber admet toutefois qu’il sera « évidemment plus tranquille » une fois la grève derrière lui.


Source : lequotidiendumedecin.fr