La Fédération hospitalière de France (FHF) ne digère pas le rapport issu du bilan 2017 de la Délégation nationale de la lutte contre la fraude (DNLF). Publié fin décembre, ce bilan évalue notamment à 58,2 millions d'euros le montant des fraudes relatives à la tarification à l'activité (T2A) pour les établissements de médecine, chirurgie obstétrique (MCO) et d'hospitalisation à domicile (HAD) contrôlés, en hausse de 13 %.
Cette tendance traduit l’augmentation de l’effort de contrôle de l’Assurance-maladie, précise Bercy. La campagne T2A lancée en 2017 a ainsi engagé le contrôle de 158 établissements MCO publics et privés et de 13 établissements d’HAD.
Sans contester les chiffres, la FHF estime que les quelque 160 établissements concernés sont « pointés du doigt de manière biaisée » et réfute le terme de « fraude ». Pour la fédération, « la complexité, voire l'illisibilité » des règles de codage introduites par la T2A, est source de « dysfonctionnements » qu'il est abusif de qualifier de fraude.
Injustice
« Ce rapport de la DNLF faisant état de "fraudes" à la tarification est une attaque, voire une provocation de plus envers les établissements hospitaliers », tempête la FHF. Les hospitaliers dénoncent ainsi la complexité liée à la facturation T2A dont les règles de codage sont régies par « de nombreux textes, circulaires, classifications, décrets et guides émanant du ministère de la Santé, de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou d'autres instances ».
Illustrant son argument par l'exemple, la FHF rappelle qu'il existe « pas moins de 32 règles pour la détermination du seul diagnostic principal du patient ». Et ce sans compter l'évolution constante des règles qui « complexifie la formation continue des codeurs et notamment des cliniciens et des soignants ».
Primes au résultat
Mais ce qui irrite le plus la FHF – et qu'elle dénonce avec force – c'est la partialité, à ses yeux, des contrôles que subissent les établissements. Si elle ne conteste pas de plausibles « surfacturations », Cécile Chevance, responsable pôle finance et FHF Data, regrette que les contrôleurs ne tiennent pas compte, parallèlement, des sous-facturations hospitalières. Un défaut qu'elle explique notamment par le mode de rémunération. « Les contrôleurs de l'Assurance-maladie sont intéressés par le résultat sous la forme de prime », déclare-t-elle au « Quotidien ».
La FHF a notamment dans son viseur la « circulaire frontière » − fixant la limite entre ce qui relève de l'hospitalisation de jour et ce qui relève d'une activité réalisée sur un plateau technique sans hospitalisation − dont l'interprétation n'a jamais fait consensus entre les médecins des départements d'information médicale (DIM) et l'Assurance-maladie. Un désaccord qui peut conduire la CNAM à requalifier le séjour d'un patient quelques années après son passage à l'hôpital...
« Attaque particulièrement malvenue »
Cette situation conduit à créer « une incertitude qui n'est pas tenable pour les établissements », alerte Cécile Chevance. Pour mettre en évidence l'injustice du système, la FHF compare les 58 millions d'euros de fraude avancés avec les 150 millions d'euros annuels de « sous-facturation » correspondant au codage des séjours incomplets ou oubliés l'année précédente.
Dans ce contexte, elle appelle à l'abandon du terme de « fraude » et « dénonce vivement une attaque particulièrement malvenue envers les établissements hospitaliers et les EHPAD, alors que la priorité de chacun devrait être l'organisation et le financement de soins de qualité pour les Français ».
Évaluées à 8,1 millions d'euros, les fraudes relatives aux séjours en EHPAD sont aussi pointées du doigt par la DNLF. Cette fois, l'Association nationale des centres hospitaliers locaux et des hôpitaux de proximité (ANCHL), au nom « des hôpitaux publics qui gèrent une pharmacie à usage interne (PUI) et des EHPAD sous régime du tarif global avec PUI », a tenu à s'associer à la FHF et juge « injurieux » l'emploi du mot « fraude ». Selon elle, 80 à 90 % des signalements de fraude faisant suite aux contrôles de la DNLF « sont réfutés et abandonnés par les caisses primaires ».
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