Si la HAS a récemment ouvert la porte à la vaccination des femmes enceintes les plus vulnérables, celles-ci ne font pas pour le moment partie des publics à vacciner en priorité. Un « ni oui ni non » ambigu dont s’inquiète le CNGOF, alors que selon de nouvelles données, la grossesse semble bien être un facteur de risque de forme grave de Covid.
Faut-il vacciner les femmes enceintes ? En plaidant une nouvelle fois dans ce sens, le CNGOF (Collège national des gynécologues et obstétriciens français) a remis la question sur le devant de la scène, tandis que début mars, la HAS a entrouvert la porte à la vaccination des patientes les plus à risque.
Jusque-là, les autorités sanitaires s’étaient montrées plutôt réservées sur le sujet, la HAS indiquant simplement que si « l’administration des vaccins contre le Covid-19 chez la femme enceinte n’était pas contre-indiquée », elle ne devait être envisagée que « si les bénéfices potentiels l’emportent sur les risques pour la mère et le fœtus ».
Peu de données spécifiques
Une retenue liée notamment à la pauvreté des données dans cette population, aucun vaccin n’ayant pour le moment été testé spécifiquement chez des femmes enceintes. Ainsi, pour les trois vaccins actuellement disponibles en France, la HAS souligne « l’absence de données d’immunogénicité et d’efficacité vaccinale chez les femmes enceintes ».
En termes de tolérance, même si les connaissances sont là encore partielles, « il n’y a à ce jour aucun argument pour penser que les vaccins puissent induire un effet délétère fœtal », indique le CNGOF. De fait, les vaccins anti-Covid-19 ne sont pas des vaccins vivants atténués (contre-indiqués chez la femme enceinte), et les études disponibles chez l’animal n’ont pas montré de conséquence sur le développement du fœtus. Enfin, d’après le Pr Olivier Picone, co-signataire du plaidoyer du CNGOF, aucun effet indésirable inattendu n’aurait pour le moment été observé dans les pays ayant ouvert la vaccination aux femmes enceintes comme les États-Unis ou Israël.
La grossesse, facteur de risque de forme grave
Si les données concernant la vaccination chez les femmes enceintes manquent encore, l’impact du Covid sur la grossesse se précise. Globalement, selon l’Académie de médecine, « la transmission du SARS-CoV-2 par voie intra-utérine apparaît rare et sans conséquence ». Après la naissance, « la transmission mère-enfant reste peu probable sous réserve d’une bonne application des mesures barrières ».
En revanche, « plusieurs éléments suggèrent un risque accru pour la mère ». En effet, comme le rapporte la HAS, de nouvelles données « majoritairement issues d’une étude américaine indiquent que la grossesse est un facteur de risque indépendant de développer des formes graves ». Par rapport aux autres femmes en âge de procréer, les femmes enceintes auraient près de deux fois plus de risques de décéder et trois fois plus d’être hospitalisées en soins intensifs ou ventilées. Un surrisque certes plus faible que celui associé par exemple au grand âge, mais majoré par l’âge de la grossesse et certaines comorbidités, « dont l’obésité (OR =1,8-2,3), le diabète (OR =1,7-1,8) et les maladies cardiovasculaires (OR =1,7) ».
Dans ce contexte, la HAS a récemment précisé sa position. Son avis du 2 mars sur la stratégie de priorisation des populations à vacciner indique en effet, noir sur blanc, que « les femmes enceintes de plus de 35 ans ou celles présentant d’autres comorbidités comme l’obésité ou le diabète ou les femmes enceintes susceptibles d’être en contact avec des personnes infectées du fait de leur activité professionnelle pourraient se voir proposer la vaccination ». Une position partagée par l’Académie de médecine – qui a invité il y a deux semaines à « vacciner toute femme enceinte professionnellement ou familialement exposée, ou porteuse d’une comorbidité ».
« Si la HAS a effectivement clarifié son positionnement, se réjouit le Pr Picone, il persiste une ambiguïté, regrette-t-il, puisqu’elle affirme que l’on peut vacciner face à des comorbidités mais que les femmes enceintes ne figurent pas de façon explicite dans la liste des publics à vacciner prioritairement. » D’où un risque que des professionnels de santé, faute d’informations claires, refusent la vaccination à des femmes enceintes qui y seraient en fait éligibles.
Ainsi, « nous demandons à tous nos collègues d’informer les patientes et les centres de vaccination sur la possibilité d’une vaccination après le premier trimestre de la grossesse chez toutes les femmes enceintes qui le souhaitent », milite le CNGOF.
Les vaccins à ARNm privilégiés pour le moment
Le cas échéant, « dans l’attente des résultats finaux des études menées chez l’animal pour le vaccin AstraZeneca et compte tenu des syndromes de type grippal ayant été rapportés avec ce vaccin », la HAS comme le CNGOF préconisent de privilégier les vaccins à ARNm. Par ailleurs, « une injection pendant le premier trimestre de grossesse est à éviter de principe », précise le Pr Picone.
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