Marie, 75 ans, consulte pour renouveler son traitement. Cette patiente très pudique décide de montrer des lésions cutanées survenues au niveau d’une zone où elle a été traitée il y a 10 ans pour un cancer du sein (mammectomie totale et radiothérapie). Cliniquement, il existe un réseau de télangiectasies au niveau de la zone irradiée (photo). Cette particularité dermatologique est une complication cutanée chronique classique qui fait suite à la radiothérapie.
INTRODUCTION
Parmi les traitements administrés en cas de néoplasie mammaire, la radiothérapie reste souvent la pierre angulaire. Ainsi, pour les cancers du sein in situ et infiltrants, ce traitement peut être utilisé en complément de la chirurgie. La radiothérapie locorégionale (mammaire ± ganglionnaire), réalisée en phase non métastatique du cancer, permet de réduire le risque de récidive locorégionale.
Au total, les patientes reçoivent généralement une dose de 50 Gy, délivrée au décours de 25 séances.
Deux types de complications peuvent survenir : précoces ou tardives.
LES COMPLICATIONS CUTANÉES PRÉCOCES
Ce sont les radiodermites aiguës. Le plus souvent, elles apparaissent au décours de la radiothérapie (premiers jours ou plusieurs semaines après avoir initié le traitement ; cela peut aller jusqu’à 6 mois après avoir débuté la radiothérapie).
Plusieurs facteurs conditionnent la survenue des radiodermites : la nature du rayonnement, la dose reçue, l’incidence du faisceau. Le follicule pileux est le premier élément à être touché par la radiothérapie (dès 20 Gy). à partir de 50 Gy, 70 % des glandes sudorales sont atteintes.
Quatre stades ou grades sont classiquement décrits pour la radiodermite aiguë (cf. encadré).
LES COMPLICATIONS TARDIVES
Elles s’inscrivent sur une durée très variable, et s’observent parfois au-delà de 30 ans après la radiothérapie.
Des phénomènes de fibrose sont souvent objectivés, celle-ci peut devenir rétractile et très inesthétique. Des troubles de la pigmentation et des nécroses cutanées plus ou moins importantes sont parfois présentes.
De manière classique, trois phases sont décrites :
– Le réveil radique qui se traduit par une réaction inflammatoire au décours de la deuxième année après la radiothérapie. Cliniquement, il existe une inflammation chronique, une douleur, un œdème et un prurit.
– La phase séquellaire, avec une peau sèche dépourvue de poils. à ce stade (cas de notre patiente), il existe des télangiectasies et un épaississement du tissu cutané.
– La phase tardive, se traduisant par une atrophie cutanée avec parfois une rétraction de la peau.
La radiothérapie majore les risques de cancers cutanés (basocellulaires ou spinocellulaires). Ces transformations malignes surviennent au centre de la zone irradiée, mais peuvent également se présenter en périphérie.
D’autres manifestations sont décrites. Il peut s’agir de morphées ou de pemphigoïdes radio-induites, un syndrome d’EPPER (Eosinophilic Polymorphic and Pruritic Eruption Associated with radiotherapy) qui se traduit par un prurit des extrémités ou du tronc. On l'observe dans les sept mois après la radiothérapie.
CONCLUSION
Les effets cutanés de la radiothérapie représentent une complication classique. Leur différenciation en quatre grades et leur survenue échelonnée dans le temps, parfois au-delà de trente ans, sont moins connues. Afin de réduire ce type de complications, les oncologues ont proposé de modifier les modalités de la radiothérapie. Plusieurs options sont actuellement proposées :
– Un fractionnement des doses qui permet de passer de 40 Gy en 15 séances plutôt que 50 Gy en 25 fractions.
– Une irradiation partielle et accélérée du sein (deux séances par jour avec des doses plus importantes de 3,4 à 3,8 Gy). Un équipement plus fiable, avec des accélérateurs à haute et moyenne énergie, permet de réduire les effets cutanés de la radiothérapie.
Stades de la radiodermite aiguë
• Grade 1 : érythème au début de la radiothérapie, ou dans les 3 semaines suivantes. Avec placards squameux, œdème et dépilation.
• Grade 2 : érythème modéré à intense, avec œdème et plaques exsudatives.
• Grade 3 : radiodermite exsudative. Avec des zones ulcérées, un fort œdème, parfois des décollements épidermiques. Des cicatrices dyschromiques peuvent apparaître.
• Grade 4 : radionécrose. Cette complication est exceptionnelle, liée à l’administration de doses importantes (souvent en surdosage). Avec des placards très inflammatoires, des hémorragies et des nécroses profondes (touchant parfois les muscles et tendons).
Bibliographie
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Cas clinique
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Etude et pratique
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