C’est avec une joie indicible que j’ai pu prendre connaissance du courrier des lecteurs rédigé par plusieurs hospitaliers (Le Quotidien du Médecin du 9 mai 2025). Ce qui m’a énormément plu, c’est dans un premier temps de savoir que le Pr Casalino s’est associé aux propos d’autres chefs PU-PH en ce qui concerne la fin de vie.
J’ai un profond respect pour cet homme qui, en plus d’être très serviable (il m’assiste dans de nombreuses thèses en tant que président du jury), et il a toujours un mot aimable pour son personnel quelle que soit la fonction. De plus, il est tout à fait dans la ligne de conduite que j’adopte personnellement en ce qui concerne la fin de vie. Au-delà de ma prise de position le concernant, je souhaite également m’exprimer sur le sujet ô combien important qu’est celui des soins palliatifs.
La prise en compte de la fin de vie nécessite une meilleure approche du rôle du médecin, et des soignants en général
Je reste très attaché à mes patients, et en tant que médecin de famille je fais le maximum pour leur assurer une prise en charge optimale. C’est la raison qui m’a conduit, en accord avec certaines équipes infirmières (certaines ont été très volontaires pour que nous puissions travailler en collaboration), à développer les soins palliatifs pour les personnes prises en charge depuis mon installation. Nous avons œuvré pour définir, il y a plusieurs décennies de cela, les rôles de chacun dans cette optique.
Un investissement parfois difficile
Il est vrai qu’un tel investissement est parfois difficile tant sur un plan professionnel (les soins palliatifs s’ils sont prodigués de manière satisfaisante nécessitent du temps) que sur un plan psychologique. Il faut être sur le pied de guerre durant les phases critiques que nous (je parle de l’équipe qui gravite autour de moi, et qui agit avec moi) devons affronter dans ce combat entre la vie et la mort.
Bien entendu accepter de suivre une personne en soins palliatifs, cela veut dire accepter d’être appelé la nuit par les paramédicaux (ils ont un roulement qui leur permet de ne pas être épuisés). Cet investissement est la pierre angulaire de nos actions au chevet du patient, investissement que de nombreux collègues n’acceptent pas ou plus.
Ces soignants (le médecin n’en est qu’une des composantes) sont les chevilles ouvrières dans ce cadre. Ils savent adopter la posture la plus adéquate dans la plupart des situations. Cette façon de travailler permet au soignant d’avoir une vision globale du soin, mais aussi a l’avantage de mettre en lumière les joies d’un travail en pluriprofessionnalité. Cet investissement est à l’origine d’une plus grande complicité entre les professionnels de santé, mais c’est également une façon d’avoir une discussion approfondie sur le patient, et la complexité de sa prise en charge.
Nous pouvons aisément comprendre que la pratique des soins palliatifs peut conduire à des phases d’amertume ou de désillusion, surtout lorsque la famille baisse les bras (on oublie trop souvent que l’entourage est le maillon fort dans cette prise en charge), et n’accepte plus de rester auprès du patient. Nous acceptons parfois cet état de fait avec une pointe de regret car nous voulons avant tout conserver une proximité du malade avec son environnement auquel il est très attaché. Tout cela pour dire que les propos énoncés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) concernant le soin, et relayés par les PU-PH du courrier des lecteurs, sont tout à fait justes. L’OMS a voulu, avec quelques mots qui ont été récupérés par mes confrères, montrer le rôle que doit tenir le médecin pour assurer une prise en charge de qualité auprès des patients.
Ainsi les soignants doivent endosser certaines actions bien définies qui se caractérisent par : « L’ensemble des services dispensés aux individus ou aux populations pour promouvoir, maintenir, ou rétablir la santé ».
Je suis en accord total avec ces propos qui sont la base de ma pratique. Comme ont pu le dire dans le courrier des lecteurs du Quotidien nos têtes pensantes : « Le médecin ne doit pas provoquer la mort du patient, car la mort n’est pas un soin ».
Nous devons avant tout donner un confort de vie au patient qui est en phase terminale. Nous avons actuellement des dispositions qui évitent tout acharnement thérapeutique inutile, mais nous devons respecter la vie du patient, et faire de notre mieux pour apporter une qualité de service irréprochable. L’arsenal thérapeutique est actuellement suffisant pour éviter toute souffrance chez le patient en fin de vie.
En tant que médecin je suis heureux de savoir que la personne que j’ai suivie depuis plusieurs décennies va pouvoir finir sa vie auprès des siens, sans souffrance, en ayant reçu une prise en charge adaptée, et dans la dignité. On est souvent récompensé par les familles par le biais de leur attitude ou de leurs réflexions. Elles ont compris, dans la grande majorité des cas, les raisons de certains de nos actes. Elles savent parfaitement que le médecin endosse un rôle prépondérant auprès des patients de leur naissance jusqu’à leur mort.
Il reste le plus déontologique dans la mesure du possible, et il reste un professionnel investi dans sa tâche.
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